Grève titanesque des ouvriers chinois de Yue Yuan, leader mondial de la basket

Par latribune.fr  |   |  476  mots
"Personne n'ose se lever et prendre la tête de la contestation, car nous avons tous peur que l'usine exerce des actions de représailles par la suite", confie une salariée du site. (Photo : Reuters)
Plus de 30.000 travailleurs chinois refusent de se remettre au travail dans une des usines chinoises de Yue Yuan, sous-traitant de Nike, Adidas, Converse et d'autres. Ils réclament le versement de leurs allocations sociales dues.

C'est "probablement la grève d'ouvriers chinois la plus importante de ces dernières années" pour l'ONG américaine China Labor Watch. Plus de 30.000 employés de l'usine Yue Yuen de la ville de Dongguan (province du Guangdong) sont en grève mercredi et refusent depuis la semaine dernière de reprendre le travail. Ils protestent contre leurs conditions salariales, des contrats d'embauche lacunaires et des carences dans les paiements liés à leur sécurité sociale.

L'usine appartient au groupe taïwanais Pou Chen., le plus grand fabricant de chaussures de sport au monde et sous-traitant notamment des marques Nike, Adidas ou encore Converse.

"Ça fait 10 ans que l'usine nous dupe"

Le mouvement social, engagé depuis plusieurs jours, a pris une telle ampleur que les autorités ont déployé un important contingent de forces de l'ordre, a rapporté China Labor Watch.

L'ONG a diffusé une série de photos montrant le déploiement de centaines de policiers autour de l'usine, certains équipés de matériel anti-émeute et d'autres tenant en laisse des bergers allemands. Selon China Labor Watch, les policiers ont frappé ou interpellé plusieurs ouvriers depuis le début de la grève. Sur le réseau social Weibo, les photos du mouvement social se multiplient.

Un ouvrier chinois a expliqué à l'Associated Press que l'entreprise n'avait pas payé comme il se doit la couverture sociale de ses employés. Un élément qu'il a découvert après s'être blessé dans l'usine. "Ça fait 10 ans que l'usine nous dupe", renchérit un autre travailleur en colère.

"Les travailleurs poursuivent leur grève, et leur nombre a sans douté augmenté", a commenté Dong Lin, membre d'une association de défense des droits, basée à Shenzhen et proche des ouvriers. Dong Lin a estimé à 40.000 le nombre des grévistes, qui exigent le paiement d'allocations sociales.

Crainte de voir l'usine délocaliser en représailles

La direction de l'entreprise s'est engagée à effectuer un rattrapage dans ces versements d'ici fin 2015, a relaté, sous couvert de l'anonymat, une salariée du site. Mais cette proposition a été rejetée par les ouvriers en grève, inquiets par la perspective que la direction puisse brusquement décider de fermer l'usine pour la délocaliser, sans honorer ses promesses, un cas de figure classique en Chine.

"Personne n'ose se lever et prendre la tête de la contestation, car nous avons tous peur que l'usine exerce des actions de représailles par la suite", a-t-elle confié, en ajoutant:

"La presse locale n'ose même pas mentionner l'existence de notre grève."

Parfois surnommée "l'usine du monde" car elle concentre une part importante de l'industrie manufacturière chinoise travaillant pour les exportations, la province méridionale du Guangdong connaît de plus en plus de conflits sociaux. Et ce malgré l'absence d'organisations syndicales indépendantes.