Pourquoi l'année 2011 a changé l'Europe

Par Aline Robert  |   |  554  mots
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Mal gérée, la crise de la dette s'est propagée. Le recours à la planche à billets semble désormais inévitable.

Plutôt que de multiplier les euros, l'Europe a attaqué la crise de la dette frappant principalement la Grèce et l'Italie en multipliant... les sommets. Un choix par défaut. Recourir à la création monétaire pour alléger la charge de la dette des pays les plus endettés, comme le font les États-Unis, aurait été plus simple.

L'hypothèse n'a pas fait consensus au sein de l'Union, les pays les plus riches ne souhaitant pas payer pour les moins vertueux. Si bien que la situation s'est sévèrement détériorée en 2011. Le premier plan de sauvetage grec, dessiné en 2010, est brusquement apparu irréalisable, à la fin du printemps 2011, à la lumière de la détérioration des comptes publics du pays.

Après l'adoption d'un plan de rigueur supplémentaire par le Parlement grec en juin, les dirigeants européens se réunissent le 21 juillet pour un sommet censé être LE sommet historique et définitif : celui qui devait clore le sujet, avec un nouveau plan d'aide au pays de plus de 100 milliards de dollars, et un assouplissement des règles du FESF (Fonds européen de stabilité financière), créé pour jouer les pompiers de la crise de l'euro.

D'échec en échec

Las, les décisions prises lors de la rencontre ne convainquent personne. C'est même l'inverse qui se produit. Les détenteurs de dette grecque doivent oublier 21 % du montant de leur créance : une perspective sans précédent, qui fait plonger le cours des banques, lesquelles entraînent les marchés actions à la baisse.

C'est l'échec de ce sommet majeur qui entraîne leur multiplication. L'aggravation de la situation des finances publiques grecques se traduit par un nouveau sommet, le 27 octobre, qui a proposé aux créanciers de s'asseoir sur la moitié de leur dû. Un nouvel échec.

Le dernier des sommets de la dernière chance, celui du 9 décembre dernier, s'avère aussi le plus grave. En proposant un nouveau pacte budgétaire qui impose des règles de bonne conduite à tous les pays de l'Union, l'Allemagne et la France se heurtent à un os de taille : le refus du Royaume-Uni, inquiet de toute intégration européenne supplémentaire à l'heure où l'« euro bashing » est de bon ton d'y adhérer. « Il existe désormais deux Europe », a déclaré Nicolas Sarkozy. Vingt-six pays ont en effet signé ce pacte budgétaire aux contours juridiques flous. Qui place l'Europe, pour son 10e anniversaire qui sera célébré ce week-end, devant un mur. La contagion tant redoutée s'est produite, et plusieurs pays, dont sans doute la France, devraient se voir retirer leur triple A début 2012.

L'orthodoxie financière décidée fin décembre arrive trop tard : « Entre deux maux, orthodoxie et insolvabilité, le marché a choisi son camp et privilégie la planche à billets comme au Royaume-Uni, aux USA et au Japon. La BCE devra désormais adopter le même procédé que les autres ! » estime Christophe Brulé, d'Entheca Finance.

La crise de la dette a donc précipité l'Europe dans une crise de gouvernance majeure. Plongée dans la récession par les charges de la dette, elle se voit aujourd'hui contrainte d'appliquer la politique monétaire qu'elle cherchait à éviter à tout prix, au départ.