Triple A : Hollande évoque la "bataille perdue de Sarkozy", Fillon appelle à ne pas dramatiser

Par latribune.fr, avec agences  |   |  969  mots
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L'agence de notation financière Standard & Poor's a retiré à la France sa note d'excellence AAA, qui est notée désormais AA+. L'écart se creuse avec l'Allemagne dont le AAA est maintenu. Le candidat socialiste à l'élection présidentielle a fustigé la "bataille perdue" de Nicolas Sarkozy. A Matignon, François Fillon rappelle que la France conserve la deuxième meilleure note et accuse le PS d'avoir refusé de voter la règle d'or budgétaire.

Les réactions politiques pleuvent ce samedi depuis que l'agence de notation financière Standard & Poor's a rendu son verdict, en dégradant la France désormais notée seulement AA+, soit un cran de moins, avec une perspective négative. Selon S&P, il existe ainsi au moins une chance sur trois que le France soit à nouveau dégradée en 2012 ou en 2013, notamment "si elle dévie de sa consolidation budgétaire", explique l'agence.

François Hollande, candidat socialiste à l'élection présidentielle, a estimé samedi mati que la bataille de Nicolas Sarkozy pour le maintien du triple A "a été perdue". "La dégradation de notre note financière est grave", a dit le candidat socialiste lors d'une allocution télévisée qui a duré cinq minutes environ. Il a estimé que la politique du président français avait "manqué de cohérence, de constance, de clairvoyance et de résultats". "Cette politique (de Sarkozy) a été dégradée, pas la France", a noté François Hollande, qui souhaite en 2012 "mettre la France sur le chemin du redressement".

Alors que le chef de l'Etat, qui a présidé vendredi soir une réunion d'urgence avec le Premier mnistre et le ministre de l'Economie, est pour l'instant resté silencieux, c'est comme toujours, François Fillon qui est monté au front. Lors d'un point de presse à Matignon, le Premier ministre a lu une déclaration solennelle et très politique, pour tenter de dédramatiser la décision de S&P, qu'il a accusé de l'avoir"prise à contre-temps". Néanmoins, elle "constitue une arlerte qui doit pas être dramatisée, ni sous-estimée." Mais les agences de notation "ne feront pas notre politique et notre agenda", prévient-il, après avoir justifié les réformes "engagées" par le gouvernement. François Fillon a aussi fustigé l'opposition et le PS, à commencer par son candidat, François Hollande. "Ceux qui dramatisent la situation devraient y réfléchir à deux fois... Ce sont eux qui ont bloqué l'instauration de la règle d'or, qui aurait renforcé notre crédibilité." Rappelant que même à AA+, la France conserve la deuxième meilleure note, François Fillon a exclu, comme François Baroin la veille, tout nouveau plan de rigueur, estimant que les mesures budgétaires déjà prises étaient "suffisantes". "Nous pourrons procéder à des ajustements lorsque nous aurons davantage de visibilité sur la croissance", a-t-il déclaré.

Le choc est d'autant plus grand pour la France que la décision de S&P, intervenue qui plus est un vendredi 13, va s'inviter dans la campagne et que le jugement porté sur la France et les autres pays du sud de l'Europe tranche avec le maintien des notations AAA de l'Allemagne, des Pays-Bas, du Luxembourg et de la Finlande. L'Allemagne a cependant été placée sous surveillance négative. S&P a par ailleurs dégradé d'un cran l'Autriche, qui perd également son triple A, et de deux crans l'Italie (de AA- à BBB+), l'Espagne (de AA- à A) et le Portugal (de BBB- à BB). Au total, neuf pays de la zone euro sont concernés par la dégradation de S&P. Et quinze des dix-sept pays de la zone euro sont désormais placés sous surveillance négative.

" C'est un changement de note d'un cran (...), c'est une demi-surprise", avait indiqué le ministre de l'Economie sur France 2. "Ce n'est naturellement pas une catastrophe. C'est comme si vous demandiez à un élève qui a eu 20 sur 20 pendant très longtemps et qui passe à 19 si c'est une catastrophe ou non (...) C'est une excellente notation." "Ce n'est pas une bonne nouvelle, on aurait préféré ne pas l'avoir mais on ne s'y arrête pas. Ça ne fait que conforter et confirmer ce que nous souhaitons, c'est-à-dire stabiliser la zone euro dans sa gouvernance", avait-il cependant reconnu. "Dans les attendus de ce que nous dit Standard & Poor's, c'est clairement la gouvernance de la zone euro et l'instabilité de la zone et ce ne sont pas les réformes de structure qui sont engagées et qui sont au contraire saluées, ce ne sont pas les questions budgétaires puisque que nous sommes sur la voie de la réduction des déficits".

Les autres réactions politiques :

"L'agence de notation Standard & Poors déclare la guerre de la finance contre la France. Il faut résister (...) La Banque centrale doit annoncer immédiatement qu'elle prêtera à la France à un taux très bas. Faute de quoi il faut suspendre les versement français au budget de l'Union européenne et couvrir les prochaines tranches avec un emprunt forcé sur les banques françaises qui viennent d'être gavées par la BCE", a déclaré de son côté Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à la présidentielle.

"Nicolas Sarkozy est maintenant au pied du mur, ce n'est plus le temps des mesurettes", a réagi Christine Boutin, candidate du parti chrétien-démocrate à la présidentielle. "Ce matin, tout le monde débattait d'une inscription du mariage homosexuel dans le projet de Nicolas Sarkozy et maintenant, nous perdons le triple A... Je souligne le décalage dans l'urgence des décisions à prendre".

"C'est la fin du mythe du président protecteur (...) Cela disqualifie tous ceux qui de Nicolas Sarkozy à François Hollande, en passant par François Bayrou, ont défendu et imposé la monnaie unique", a déclaré pour sa part Marine Le Pen, candidate du Front national à la présidentielle.

La décision de l'agence S&P ont fait nettement décrocher les marchés d'actions qui se sont retournés à la baisse en Europe, tandis que l'euro chutait face au dollar, repassant sous 1,27 dollar.