L'Eurogroupe au bord de la crise de nerfs : "le message aux Grecs est clair, ça suffit ! "

Par latribune.fr avec AFP  |   |  895  mots
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Les ministres des Finances de la zone euro ont fait savoir samedi à la Grèce qu'ils ne pouvaient donner leur feu vert à la restructuration de sa dette détenue par le secteur privé en l'absence de garanties. La Grèce doit conclure un accord avec les banques d'ici au 13 février si elle veut éviter la faillite. L'exaspération des membre de l'Eurogroupe est à son comble : "il y a beaucoup de frustration parce qu'ils traînent les pieds. Ils doivent se décider et commencer à parler honnêtement".

Les représentants de l'Union européenne, de la Banque centrale européenne et Fonds monétaire international négocient toujours les conditions d'octroi d'une aide de 130 milliards d'euros à Athènes. La troïka exige que les partis représentés dans le gouvernement grec de coalition s'engagent sur de nouvelles mesures d'austérité. Les créanciers internationaux réclament que les partis représentés au parlement grec s'engagent entre autres sur une diminution du salaire minimum et sur une réduction des primes de congés payés dans le secteur privé, mais Athènes redoute une aggravation de la récession et des mouvements sociaux.

Les ministres espéraient se réunir lundi pour finaliser ce second plan d'aide de 130 milliards d'euros qui doit être mis en oeuvre d'ici à la mi-mars pour éviter une faillite des comptes publics, mais le rendez-vous a été reporté du fait des réticences d'Athènes à s'engager en faveur des réformes demandées. La réunion a été remplacée par une conférence téléphonique.

Le message aux Grecs: ça suffit !

"Tous les participants de la téléconférence de samedi ont adressé un message très clair aux Grecs: ça suffit", a déclaré un membre de l'Eurogroupe. "Il y a beaucoup de frustration parce qu'ils traînent les pieds. Ils doivent se décider et commencer à parler honnêtement, de façon décisive et rapide avec la troïka des aspects du programme qui restent à finaliser, comme les reformes fiscales et celles du code du travail", a-t-il ajouté.

Le secteur privé devrait accepter une décote de l'ordre de 70% de ses obligations dans le cadre du programme d'échange de dette. Cette mesure permettra de faire baisser de 100 milliards d'euros l'endettement de la Grèce, qui représente actuellement 160% de son produit intérieur brut (PIB). Les représentants des banques dans les négociations sur l'effacement d'une partie de la dette privée de la Grèce devaient revenir à à Athènes samedi, a annoncé un porte-parole de l'Institut de la finance internationale, qui représente le lobby bancaire. Son directeur général Charles Dallara et le conseiller de la direction de BNP Paribas qui mène le comité bancaire, Jean Lemierre, étaient attendus à Athènes. Le gouvernement grec négocie un effacement de 100 milliards d'euros de dette sous la forme d'une décote de 50% de la valeur nominale des obligations détenues par les créanciers privés (banques, caisses d'assurance ou fonds d'investissement).

Pour éviter la cessation de paiement, la Grèce doit conclure un accord avec les banques d'ici au 13 février. Le remboursement de 14,5 milliards d'euros de prêts l'attend le 20 mars.

Vénizelos pointé du doigt

Les ministres des Finances de la zone euro jugent en outre que leur homologue grec Evangélos Vénizelos se soucie davantage des élections d'avril que de la situation financière.
"Il y a beaucoup de frustration en ce qui concerne le ministre Vénizelos, qui est très difficile à mobiliser parce qu'il est très pris par la campagne pour la direction du Pasok. IL n'est donc pas disponible pour rencontrer les membres de la troïka.
"Il prépare son propre avenir politique, plutôt que celui de son pays", a déploré le responsable de l'Eurogroupe.
L'intéressé a quant à lui parlé de "grande impatience et de fortes pressions, non seulement de la part des trois institutions qui composent la troïka, mais aussi des Etats membres de la zone euro". Evangélos Vénizélos a également reconnu que la conférence téléphonique avait été "très difficile". "Le moment est décisif. Tous doit être conclu avant demain soir", a-t-il souligné.

Juncker n'y croit plus

Le chef de file de l'Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, a évoqué aujourd'hui le risque d'une "faillite" de la Grèce en mars si les réformes exigées par ses créanciers ne sont pas menées à bien, dans une interview à l'hebdomadaire allemand Der Spiegel.

"Si nous devions constater que tout va à vau-l'eau en Grèce, alors il n'y aurait pas de nouveau programme" de refinancement du pays pour lui permettre d'honorer ses dettes, a déclaré le chef de gouvernement du Luxembourg. "Cela signifierait une faillite en mars", a-t-il ajouté. "La Grèce doit savoir que nous ne reculerons pas sur le thème des privatisations", a-t-il poursuivi, regrettant pas ailleurs qu'il y ait "des éléments de corruption à toutes les échelles de l'administration" grecque.

La résidence du président caillassée

Une trentaine de jeunes ont lancé des pierres aujourd'hui contre la résidence du président grec Carolos Papoulias dans le centre d'Athènes, causant de légers dégâts au bâtiment, a-t-on appris de source policière.

Carolos Papoulias, âgé de 82 ans, qui a été pendant de nombreuses années ministre des Affaires étrangères dans des gouvernements socialistes, est l'un des hommes politiques les plus respectés en Grèce. Sa popularité a cependant été sérieusement écornée après qu'il eut été accusé au cours des six derniers mois de se plier aux injonctions de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI) pour la mise en oeuvre d'un sévère plan d'austérité pour faire face à la crise de la dette.