L'Espagne tente d'éteindre son incendie bancaire

Par Robert Jules  |   |  389  mots
Copyright Reuters
Le gouvernement espagnol a utilisé un montage acrobatique pour éviter un recours aux marchés financiers à ses banques, notamment Bankia, récemment nationalisée, qui a besoin de 19 milliards d'euros. Conséquence, les taux à dix ans sont revenus à des niveaux record et l'écart de taux avec l'Allemagne a atteint un seuil historique.

C'est un aveu d'impuissance inquiétant que le gouvernement espagnol a envoyé lundi sous la forme d'un montage singulier qui permet d'éviter le recours aux marchés financiers. En effet, pour recapitaliser Bankia, qui a besoin de 19 milliards d'euros, Madrid a décidé d'émettre de la dette pour la fournir à la maison-mère de Bankia, BFA, qui pourra ainsi présenter de tels titres en guise de collatéral au guichet de la Banque centrale européenne (BCE) en échange de liquidités. Cette option signale que le Fonds de garantie des banques espagnol (Frob) mis en place en février et qui dispose de 5 milliards d'euros n'est plus en mesure de prêter directement aux banques pour satisfaire leurs besoins.

La BCE n'a pas été alertée

"Le gouvernement n'a pas encore décidé s'il allait utilisé ou non cette dette pour recapitaliser l'établissement nationalisé (Bankia a été nationalisé le 9 mai), et il décidera d'ici à trois mois", a confié à l'agence Bloomberg un porte-parole du ministre de l'Economie, sous couvert d'anonymat. De son côté, le Premier ministre Mariano Rajoy a indiqué lors d'une conférence de presse lundi que son gouvernement n'avait pas alerté la BCE de cette démarche. Il a indiqué qu'il n'avait aucun intention de demander un sauvetage de ses banques à Bruxelles, et  répété que l'opération de recapitalisation de Bankia, dont les actifs représentent un tiers du PIB espagnol, n'affectera pas l'objectif de déficit budgétaire public prévu.

Spread historique

Outre la descente aux enfers du titre Bankia, qui s'est déprécié jusqu'à 29% de sa valeur lundi, les marchés financiers ont réagi en envoyant le taux espagnol à 10 ans sur un pic de 6,47%, l'écart de taux avec la référence allemande s'est élargi à 511 points de base - un spread historique - et la prime d'assurance mesurée par les CDS atteignait 556 points de base. Pour le gouvernement, le sauvetage relève d'une mission impossible car Bankia n'est pas un cas isolé. Selon le quotidien El Mundo, trois autres banques placées elles aussi sous tutelle - CatalunyaCaixa, NovacaixaGalicia et Banco de Valencia - réclament elles aussi une aide d'un montant cumulé de l'ordre de 30 milliards d'euros. Cette information a contribué à augmenter la méfiance des investisseurs sur les marchés.