Qu'y a-t-il derrière la proposition de référendum de Schäuble en Allemagne ?

Par Marc Meillassoux, à Berlin  |   |  561  mots
Wolfgang Schäuble, Le ministre des Finances allemand /Copyright AFP
A la veille du Conseil européen, la proposition de Wolfgang Schäuble fait débat. Certains y voient un "coup" de la part du ministre des Finances, d'autres une étape démocratique nécessaire dans l'intégration européenne.

A quoi joue Wolfgang Schäuble? Le ministre des Finances allemand a pris tout le monde de court en déclarant dans le Spiegel du lundi 25 juin vouloir organiser un référendum en Allemagne pour déléguer plus de pouvoirs à l'Union européenne (UE). Quelques jours auparavant, la Cour constitutionnelle de Karlsruhe avait demandé au président Joachim Gauck de ne pas ratifier le paquet fiscal et le Mécanisme européen de solidarité (MES) avant qu'elle ait pu étudier la question plus avant. Face aux problèmes que posent les Sages de Karlsruhe à la marche forcée des plans de sauvetage, la possibilité de modifier la loi Fondamentale en amont est un pari osé pour Schäuble.

« Maître à penser »

Les réactions ne se sont pas faites attendre et d'aucuns saluaient la proposition de Wolfgang Schäuble. Alors que les Sages avaient déjà dénoncé « un déficit de démocratie » lors du premier sauvetage de la Grèce, le ministre-président de Rhénanie-Palatinat, Kurt Beck (SPD), estime que « l'Allemagne ne peut plus se permettre de jouer à chaque fois des coups de poker devant la Cour suprême en ce qui concerne les affaires européennes ». Comme l'explique l'ancien ministre des Finances Peer Steinbrück dans le Frankfürter Zeitung, le référendum est inévitable : « Quiconque a écouté attentivement le verdict de la Cour constitutionnelle sait qu'il ne peut en être autrement ». De son côté, Angela Merkel s'est réjouie de la proposition de son ministre des Finances, voyant en lui un « maître à penser de l'Europe ».

« Un coup tactique »

Tous au Bundestag ne sont pourtant pas convaincus du sérieux de la proposition. Le député eurosceptique Frank Schäffler explique à la Tribune : « Schäuble n'a fait qu'un coup tactique. Il n'est pas question de soumettre le paquet fiscal ou l'ESM au référendum, comme je le défends mais d'organiser « un jour » un référendum. C'est seulement pour donner une perspective et calmer les critiques dans son propre camp ». D'après le député, Wolfgang Schäuble peut d'un côté promettre à ses concitoyens qu'ils auront leur mot à dire sur les questions européennes et de l'autre jouer la carte de l'intégration européenne qu'il prêche à ses partenaires européens, tous aussi mal à l'aise sur les questions de souveraineté.

« Sous cinq ans »

Joachim Spatz, député FDP délégué aux Affaires européennes du FDP, nuance toutefois : « Schäffler ne représente qu'une minorité au sein des libéraux, le FDP pense que le vote des deux chambres est largement suffisant pour adopter le paquet fiscal et l'ESM. Par ailleurs, je ne crois pas que Schäuble cherche à influencer ses partenaires ». Comme la plupart de ses homologues, il est favorable à l'annonce du ministre des Finances mais reconnait que le terme - « sous cinq ans » selon Schäuble - est une question sensible : « Si le débat est calme et bien préparé, le référendum a toutes ses chances d'aboutir. Mais il est vrai qu'en temps de crise, il est facile pour certains de mettre en avant les aspects négatifs de l'Europe. » Pour le possible candidat socialiste à la chancellerie, Peter Steinbrück, « un tel référundum pourrait avoir lieu au plus tôt en 2013, 2014 ». Sûrement pas avant les législatives de 2013...