BCE : ce qu'a vraiment dit Mario Draghi

Par Julien Bonnet et Sophie Rolland  |   |  672  mots
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La Banque centrale européenne (BCE) va lancer un nouveau programme, baptisé "Outright monetary transactions" (OMT), en raison "des perturbations graves observées sur le marché des obligations publiques qui proviennent de craintes infondées de la part des investisseurs sur la réversibilité de l'euro", a déclaré jeudi son président Mario Draghi. Retrouvez les principales annonces faites lors de sa conférence de presse.

Le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi a présenté jeudi le nouveau programme de rachat de titres de dette d'Etats de la zone euro, annonçant également la fin de l'ancien programme de rachat lancé en mai 2010, le SMP. Ce dernier, dont il a toujours été dit qu'il était limité en temps et en montant, n'était pas suffisamment efficace, a précisé Mario Draghi.

Tour d'horizon des principales caractéristiques du nouveau programme de rachat, baptisé "OMT" (pour "Outright Monetary Transactions"), sur lequel Mario Draghi était particulièrement attendu :

Montant et maturité : L'institution de Francfort achètera sur le marché secondaire des obligations d'Etat de maturité allant de 1 à 3 ans et ne fixera "pas de limite quantitative" à ces achats, a indiqué Mario Draghi. Ces deux points étaient attendus: annoncer une enveloppe d'un montant fixe aurait en effet poussé les marchés à tester la BCE et une intervention sur des maturités inférieures à trois ans s'apparente à des opérations classiques sur le marché monétaire (et non à un financement monétaire des déficits publics).

Eligibilité : Ce programme sera soumis à la stricte condition que les Etats qui souhaitent en bénéficier aient auparavant fait appel à l'aide des fonds de secours européens, le FESF, provisoire, et le MES, son futur successeur. Ce qui implique, de la part de ces pays, des efforts accrus d'assainissement de leurs finances publiques. La BCE avait déjà indiqué qu'il n'y aurait pas d'achat de dettes sans signature préalable d'un accord pour activer l'intervention du FESF. Un appel à l'aide auquel s'est pour le moment refusé Madrid et Rome.

Stérilisation : Comme pour le SMP, la BCE a annoncé que la liquidité créée à travers le programme OMT sera complètement stérilisée. A chaque fois qu'elle rachètera la dette d'Etat, la BCE retirera ailleurs dans le système monétaire un montant équivalent de liquidités.

Cibles d'intervention : Contrairement au scénario qui avait circulé dans la presse, la BCE ne va pas viser de niveaux spécifiques sur les écarts de taux d'emprunt (spreads) entre les Etats de la zone euro au-delà desquels elle interviendrait en achetant des titres de dette. "Nous n'avons pas d'objectif d'écart de taux spécifique", a déclaré Mario Draghi. L'écart observé est celui entre les taux d'emprunts des pays de la zone euro et les taux d'emprunt de l'Allemagne, pays qui fait référence dans la région.

Séniorité : Mario Draghi a confirmé que la BCE acceptait d'être traitée "pari passu" avec les autres créditeurs. Autrement dit, elle renonce à son statut de créancier senior. De quoi corriger un des défauts majeurs du SMP. Les achats de la BCE reléguaient alors les autres créanciers plus loin bas dans l'ordre de remboursement. Difficile dans ces conditions de restaurer l'appétit pour les titres de dette concernés !

Outre ces questions relatives au rachat de dettes publiques des pays membres, Mario Draghi s'est exprimé sur deux autres dossiers importants aux mains de la BCE:

Exigences de collatéraux pour les banques : La BCE va par ailleurs de nouveau alléger ses critères pour les garanties qu'elle exige des banques de la zone euro en contrepartie des prêts qu'elle leur accorde via ses opérations de refinancement. Elle va notamment "suspendre l'application d'un seuil de notation financière minimum" pour les garanties exigées ("collatéraux") dans le cas de titres de dette d'Etats membres de la zone euro, est-il détaillé dans un communiqué.

Politique monétaire conventionnelle: Avant la conférence de Mario Draghi, la BCE avait annoncé qu'elle laissait son principal taux de refinancement inchangé à 0,75%, son plus bas niveau historique. A l'issue de son Conseil des gouverneurs, l'institution de Francfort a également maintenu son taux de dépôt au jour le jour (0%) et son taux de prêt marginal (1,50%).


> (Re)voir l'intervention du 6 septembre du Mario Draghi

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