Merkel voudrait un nouveau traité européen encore plus contraignant

Par Romaric Godin  |   |  678  mots
Pour Angela Merkel, il s'agit surtout de s'assurer que les pays sous aide financière puissent rembourser les dettes qui leur ont été accordée et ensuite qu'ils n'aient plus besoin de l'aide des pays « forts. »
Selon le Spiegel, Angela Merkel veut renforcer le pouvoir de la Commission pour s’assurer que les Etats de la zone euro font bien leurs « devoirs. »

Ceux qui pensaient qu'Angela Merkel avait mis de l'eau dans son vin de l'austérité, que l'Allemagne de l'après-élection ne sera pas la même et que, enfin, on avait saisi à Berlin que l'austérité seule ne pouvait pas tout faire en seront pour leur frais.

Selon le Spiegel de ce lundi, Angela Merkel et Wolfgang Schäuble - qui devraient rester en place quelle que soit l'issue des négociations avec  la SPD - préparent un nouveau projet de modification des traités européens.

Renforcer le pouvoir de la Commission

L'idée est simple : renforcer le pouvoir de coercition de la Commission européenne pour faire respecter les engagements budgétaires des pays de la zone euro. Ces engagements, rappelons-le, ne sont pas seulement ceux compris dans le traité de Maastricht, mais aussi ceux inclus dans le pacte budgétaire, en vigueur depuis le 1er janvier  et qui prévoit de limiter le déficit structurel des pays de la zone euro à 0,5 % du PIB à partir de 2018.

L'article du Spiegel n'est pas très loquace sur les détails, mais il évoque des « contrats » que devraient respecter les pays pour « améliorer leur compétitivité » et « respecter leurs engagements budgétaires. » Autrement dit, il s'agit d'inscrire dans le marbre les « réformes structurelles » et les « politiques d'ajustement » mis en place dans le cadre des plans d'aide accordés aux pays en difficultés financières depuis 2010.

Une nouvelle structuration de l'Europe

Sur le plan plus général, c'est bien une nouvelle structuration de l'Europe que propose Berlin qui avance dans son projet de construire la zone euro autour du modèle allemand. L'idée est que chacun des pays qui disposent de l'euro fonde son modèle économique sur les exportations et non plus sur la demande intérieure afin de dégager des excédents commerciaux et courants.

Étrange projet d'intégration que celui-ci où, au final, les pays de l'Union économique et monétaire devraient tous exporter vers des pays tiers pour survivre. Si tout le monde exporte plus en Europe et importe moins, alors il faudra trouver des marchés ailleurs. Sans compter que l'on ne sait toujours pas ce que les pays où l'industrie est faible pourront bien exporter…

La priorité pour Angela Merkel

Il n'est certes pas sûr que ce soit là la priorité d'Angela Merkel. Pour elle, il s'agit surtout de s'assurer que les pays sous aide financière puissent rembourser les dettes qui leur ont été accordée et ensuite qu'ils n'aient plus besoin de l'aide des pays « forts. »

Autrement dit, il s'agit de s'assurer que la zone euro ne se transforme pas en une « union des transferts », la crainte absolue des conservateurs allemands.  Encore une fois, la CDU veut surtout épargner les contribuables allemands. C'est une des lignes directrices de sa politique européenne depuis 2010.

Au final, on comprend bien également qu'il s'agit, pour la chancelière, de réduire le besoin de solidarité au sein même de l'Europe. Là encore, il s'agit là d'un projet pour l'avenir de l'Europe dont on peut se demander s'il renforcera l'intégration et le sentiment d'appartenance à un ensemble commun.

Résistance de la SPD ?

Selon Der Spiegel, beaucoup de monde tente de résister à ce projet qui est en préparation au ministère fédéral allemand des Finances. Mais l'essentiel sera de savoir si la SPD refusera ce plan. A priori, on peut être pessimiste sur ce point. Les sociaux-démocrates ont permis au pacte budgétaire d'être adopté au Bundestag. Et Martin Schulz, le président SPD du parlement européen, combat le projet non sur le fond, mais sur la forme, sur la question de la révision des traités.

Il y a donc fort à parier que le projet d'Angela Merkel prenne forme, comme ce fut le cas pour le pacte budgétaire. Dans ce cas, « l'intégration » voulue par ce projet pourrait ouvrir la voie à une Europe nouvelle. Et pas forcément celle souhaitée par tous ses membres.