La Troïka dans une impasse en Grèce

Par Romaric Godin  |   |  709  mots
La Grèce ne remplit plus depuis octobre les critères du Mémorandum.
La revue d'automne des représentants de la BCE, de la Commission et du FMI reprendra en janvier. La situation semble bloquée.

Alors que la Vouli, le parlement grec, a voté samedi soir, un nouveau budget de rigueur, les inspecteurs de la Troïka continuent de faire pression sur le gouvernement d'Athènes. Les représentants de la Commission européenne, de la BCE et du FMI, chargés de constater le respect du « plan d'ajustement » imposé à la Grèce en échange de « l'aide » du Mécanisme européen de Stabilité (MES), ont ainsi prévenu qu'ils ne pourraient conclure leur « revue d'automne » - débutée en septembre - qu'en janvier. Les discussions reprendront mardi.

La Grèce ne remplit plus les critères de la Troïka

En réalité, la troïka parvient au bout de sa propre logique. Le « plan d'ajustement » établi en 2012 est de moins en moins réaliste à mesure que l'on approche de sa conclusion « théorique » en juillet 2014. Le « Mémorandum », le protocole d'accord signé par la Grèce en mars 2012, prévoyait en effet une accélération des performances du pays en fin de programme afin de parvenir à un autofinancement du pays.

La réalité est évidemment différente. Selon le quotidien athénien Kathimerini, la situation se détériore ainsi. Athènes aurait ainsi rempli 80 % conditions du Mémorandum en juillet 2013, 58 % en août, 28 % en septembre, 20 % en octobre. En novembre et décembre, la Grèce ne serait pas parvenue à remplir un seul des critères prévus… Autrement dit, il manquerait 75 des 135 conditions prévues à Athènes pour réussir la « revue d'automne. »

Des résultats insuffisants ?

Pourtant, la Grèce n'a pas ménagé ses efforts. Si, certes, le programme de privatisation demeure encore peu avancé, le pays est en avance sur ses prévisions budgétaires et pourrait dégager un excédent structurel dès cette année. Le FMI, l'OCDE ou le World Economic Forum ont salué le chemin parcouru. Mais ces efforts ne sont pas suffisants pour effacer le poids insoutenable d'une dette qui dépasse 170 % de la richesse nationale. Sans des mesures concrètes de restructuration de sa dette, Athènes ne pourra pas remplir les critères du Mémorandum. A moins de mener une politique encore plus sévère de rigueur.

La situation difficile d'Antonis Samaras

Or, le gouvernement d'Antonis Samaras doit également se montrer politiquement et socialement extrêmement prudent. Les sondages restent très préoccupants. Beaucoup donnent la coalition de la gauche radicale Syriza - très opposée au Mémorandum - en tête. Et le parti néo-nazi Aube Dorée frôle les 10 % d'intentions de vote et a ainsi récupéré une grande partie de ce qu'il avait perdu après le meurtre d'un musicien militant anti-fasciste par un de ses membres. Il importe donc de ne pas briser la légère reprise de l'économie enregistrée depuis quelques mois.

Résistances en zone euro

Le problème, c'est qu'il sera difficile de convaincre les gouvernements de la zone euro - et en particulier Berlin - d'apporter une nouvelle aide à Athènes si le pays ne respecte plus les critères du Mémorandum. Convaincre le Bundestag de venir encore soutenir une Grèce qui « ne fait pas ses devoirs », comme on dit en Allemagne, sera compliqué.

D'autant que la CDU et la CSU allemande craignent désormais le parti anti-euro Alternative für Deutschland, surtout avant les élections européennes. D'autant que cette fois, il faudra entrer « dans le dur » et notamment transformer les « garanties » accordées par les gouvernements européens en pertes pures et simples. Or, les exécutifs de la zone euro ont toujours promis à leurs électorats que l'aide à la Grèce ne coûterait rien…

Une solution avant juillet

La Troïka semble également peu prête à faire des concessions, car elle a le sentiment d'en avoir fait déjà beaucoup. Un de ses représentants a déclaré à Kathimerini qu'il ne voulait pas d'accord « à tout prix. » Sauf que le temps presse. En juillet, la Grèce ne pourra plus faire face à ses échéances si une solution n'est pas trouvée d'ici là, particulièrement sur la dette. L'inconscience du plan de la troïka en 2012 pourrait coûter cher à la zone euro…

 

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