Pourquoi la Grèce n'échappera pas à un troisième plan d'aide

Le gouvernement grec prépare un budget 2014 sous le double signe de la croissance et de la restructuration de sa dette. Selon les médias helléniques, Athènes prévoit de dégager l'an prochain un excédent public primaire (hors service de la dette) de 1,5 % du PIB, soit de 2,8 milliards d'euros, contre un budget primaire quasiment à l'équilibre cette année (avec un excédent de 300 millions d'euros, mais grâce à l'appui de la BCE).Retour à la croissance l'an prochain ?Le gouvernement Samaras fait reposer cet objectif sur un net retour à la croissance de l'économie grecque l'an prochain. Le PIB hellénique progresserait ainsi pour la première fois depuis 2008 de 0,6 %, après un recul de 4 % en 2013 et de plus d'un quart en quatre ans. Cette anticipation est en ligne avec les économistes les plus optimistes, comme ceux de HSBC, par exemple. Elle repose sur une stabilisation de la demande intérieure et sur un rebond des exportations et sur un apport substantiel du tourisme.Des prévisions beaucoup moins optimistesCe scénario semble fort optimiste. Les économistes de S&P, par exemple, ne prévoyait ainsi la semaine dernière de retour à la croissance qu'en 2015 (avec une hausse du PIB de 1 %). Pour 2014, l'agence table plutôt sur un recul de 1 % « compte tenu du recul du revenu disponible, de nouvelles destructions d'emplois, de salaires encore en baisse et de la poursuite de la consolidation budgétaire. »JP Morgan, dans une note du 27 septembre, se voulait tout aussi prudent : « l'économie grecque semble certainement s'être stabilisée, mais il est difficile de savoir si elle va recommencer à croître dans les prochains trimestres. »Rassurer les bailleurs de fondsEn réalité, le gouvernement Samaras entend surtout rassurer ses bailleurs de fonds. La question qui hante aujourd'hui les discussions autour de la Grèce est celle des besoins du pays une fois le plan d'aide actuel terminé en 2014. Selon le FMI, la Grèce aura encore besoin de 11 milliards d'euros de financement entre 2014 et 2016. Mais le FMI table sur un déficit public de 3 milliards d'euros en 2014, Athènes seulement sur 600 millions d'euros."Tenir" sans nouvelle aide ?Comment combler ce besoin de financement ? Le gouvernement grec prétend pouvoir s'en sortir sans nouveau plan d'aide. JP Morgan insiste ainsi sur les réserves dont dispose Athènes : 7 milliards d'euros non utilisés pour la recapitalisation des banques, les privatisations, la possibilité pour les banques centrales nationales européennes de ne pas exiger le remboursement des obligations qu'elles détiennent et, enfin, l'émission de bons du trésor à court terme, marché dont la Grèce n'a jamais été exclue.Mais pour « tenir » avec ses moyens, Athènes ne peut plus se permettre d'écart, ni en termes de croissance, ni en termes d'excédent primaire (il faudra atteindre 4,5 % du PIB en 2016), ni encore en termes de privatisations.Le poids de la detteL'ennui, c'est que la reprise est faible et fragile. Toute accélération de la consolidation budgétaire par la réduction des dépenses publiques peut faire déraper le processus. Surtout, le poids de la dette demeure élevé (176 % cette année) et risque d'asphyxier l'économie pour de nombreuses années. Athènes devra donc sans doute demander une troisième aide européenne ou une nouvelle restructuration de sa dette.Des obligations à 50 ans ?Cette dernière option est plus que jamais combattue par Berlin. Car désormais, les trois quarts de la dette grecque sont détenus par des créanciers publics ou parapublics : Etats de la zone euro, MES, BCE, FMI… Pas évident donc de faire payer in fine le contribuable pour la Grèce !Certes, ce week-end, certains responsables grecs évoqués par Reuters ont envisagé d'échanger les dettes bilatérales issues du premier plan d'aide de 2010 contre des dettes de 50 ans de maturité. Ceci permettrait de lisser les remboursements qui doivent débuter en 2025, mais ne règlerait pas les problèmes de financement urgents. En réalité, une vraie restructuration ne semble pas possible aujourd'hui.Vers un troisième plan d'aide ?Il faudra donc en passer par un troisième plan d'aide. Il sera certes moins élevé que les précédents ( l'Institut DIW de Berlin l'a évalué à 10 milliards d'euros minimum), mais pour passer sous les fourches caudines du Bundestag, il y aura des conditions. Athènes pourra toujours mettre en avant le risque politique et celui lié à la croissance pour réduire la facture. Mais la négociation sera sans aucun doute assez rude. Le MES devrait notamment exiger une accélération des privatisations, un des points de friction qui demeure entre la Grèce et la Troïka.
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