L'Allemagne a réussi "quelque chose de décisif en France : regagner la confiance" (Schäuble)

Par latribune.fr  |   |  730  mots
"Avec ses baisses de charges et d'impôts, le pacte de responsabilité est le bon chemin et il crée une nouvelle confiance. Le climat devient meilleur en France", estime Wolfgang Schäuble.
Le ministre des Finances allemand, dans une interview croisée avec son homologue français Michel Sapin, insiste sur la nécessité, en France comme dans l'Union européenne, de relancer les investissements privés. Il émet une mise en garde sur des risques de bulle spéculative sur le marché immobilier.

"Qu'a fait l'Allemagne mieux que les autres?"  À la flatteuse question posée par les quotidiens économiques Les Échos et Handelsblatt, le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, répond au premier abord avec modestie: "(...) Nous avons aussi eu un peu de chance". Pour ajouter toutefois immédiatement:

"Et puis, nous avons réussi quelque chose qui est maintenant décisif en France. Nous avons regagné la confiance".

Le principal en matière d'économie, c'est la psychologie

Interrogé  dans le cadre d'une interview croisée avec Michel Sapin publiée lundi par les deux quotidiens économiques d'une rive et de l'autre du Rhin, Wolfgang Schäuble explique: "Le principal en matière d'économie, c'est la psychologie". Il rassure néanmoins son homologue français:

"Avec ses baisses de charges et d'impôts, le pacte de responsabilité est le bon chemin et il crée une nouvelle confiance. Le climat devient meilleur en France et quand le climat est meilleur, les investissements et la demande privée augmentent".

>>LIRE: Pacte de responsabilité : que peuvent espérer les entreprises ?

"Nous avons besoin de plus d'investissements privés"

Ces deux facteurs, "confiance" et "investissements", selon le ministre des Finances allemand sont non seulement essentiels en France: ils devraient aussi être au centre de la politique économique européenne. Il précise:

"Nous ne devons pas tout de suite assimiler investissements à investissements publics. Nous avons besoin de plus d'investissements privés. Nous pouvons financer les infrastructures beaucoup plus par ce biais. Nous travaillons sur ce sujet en Europe. Il y a tellement de moyens en Europe qui n'ont pas été utilisés ces dernières années. Ce n'est pas par manque d'argent que nous avons trop peu d'investissements".

Sapin veut encourager le privé sans réduire le public

De son côté, Michel Sapin tempère ces propos. Sur les colonnes des Échos et de Handelsblatt, le ministre socialiste français s'empresse de préciser:

"Ce qui est crucial en France et en Europe, c'est l'investissement, public et privé. En France, nous prenons garde à ne pas réduire l'investissement public et à encourager l'investissement privé, nous réduisons en revanche les dépenses de fonctionnement de l'Etat".

Pour Michel Sapin, c'est surtout ce "sérieux budgétaire" que nécessite la croissance (en outre que "des mesures de structure favorables" et "des programmes d'investissement"). Un chantier qui s'imposerait à la France même "si elle était toute seule", mais dans lequel l'Allemagne est sans doute un modèle:

"Le jour ou je présenterai un budget à l'équilibre comme Wolfgang, j'apporterai quatre caisse de champagne!", plaisante-t-il.

En affirmant espérer "trouver avec les autres (Etats membres de l'UE: ndlr) le bon timing" pour concilier rigueur et croissance, il souligne:

"Nous n'en sommes pas encore là mais nous faisons des économies absolument drastiques (...)".

Le Pacte de stabilité: à appliquer plutôt qu'à interpréter

Selon les deux ministres, cependant, il n'ya a pas besoin d'une nouvelle interprétation du Pacte de stabilité et de croissance pour parvenir aux objectifs qu'ils se fixent.

"Le débat sur une nouvelle interprétation n'aide pas à surmonter la crise de confiance qui est apparemment là", souligne Schäuble.

"Le mot interprétation est dangereux et peut donner lieu lui-même à interprétations, selon Sapin.

Il s'agit plutôt d'appliquer les règles déjà existantes, s'accordent-ils. Et donc "de raisonner au-delà des questions de personne", de la crainte "très subjective" - selon les termes de Miochel Sapin - exprimée des deux côtes du Rhin quant à l'identité du futur commissaire européen censé appliquer le Pacte de stabilité.

"Ces décisions ont une portée symbolique et on doit avoir cela en tête", insiste Wolfgang Schäuble.

"Des signes de bulle spéculative"

Enfin, ce dernier interrogé sur les effets sur l'économie réelle de la politique monétaire menée par la Banque centrale européenne, affirme que:

"Nous devons réussir les réformes structurelles menées avec détermination et ensuite la confiance reviendra. (...) Nous n'avons pas trop peu de liquidités."

Plus spécifiquement, sur le marché immobilier, qui aux yeux de  Michel Sapin nécessite d'importants investissements, Le ministre allemand des Finances dit observer "des signes de bulle spéculative", et pas seulement en Allemagne. 

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