La BCE s'inquiète de la "montée du populisme en Europe"

Par latribune.fr  |   |  588  mots
Peter Praet, économiste en chef de la Banque centrale européenne (BCE)
La montée du populisme devrait être un signal d'alarme, estime l'économiste en Chef de la BCE. Mais, paradoxalement, il estime qu'elle devrait encourager les gouvernements aux réformes

La montée du populisme en Europe constitue un signal d'alarme pour les gouvernements de la région qui devraient donner la priorité aux réformes, estime Peter Praet, l'économiste en chef de la Banque centrale européenne (BCE), dans un entretien à la presse allemande publié mercredi.

"La montée du populisme devrait être un signal d'alarme. Les gouvernements doivent donner la priorité aux décisions politiques difficiles et mener à terme les réformes si nécessaires", déclare M. Praet dans une interview au quotidien économique allemand Börsen-Zeitung.

Ces propos interviennent alors que la Grèce est en proie à une nouvelle crise politique, après l'échec lundi du Parlement grec à élire un nouveau président de la République, qui s'est traduit par une dissolution du Parlement et l'annonce d'élections législatives anticipées.

Le parti anti-austérité Syriza est donné favori du scrutin, une perspective qui inquiète les créanciers du pays et fait ressurgir les craintes d'une sortie de la Grèce de la monnaie unique.

Les partis populistes aux recettes désastreuses

"Les partis populistes dans certains pays promettent des solutions rapides, mais ils n'offrent que des recettes désastreuses", a affirmé M. Praet.

"Tous les pays ont eu leur raison pour entrer dans la zone euro: le vieux système de dévaluation permanente ne fonctionnait pas. Ce qui est désormais requis, c'est de mener les ajustements structurels nécessaires. Une politique de dévaluation ne résout aucun problème structurel", a-t-il poursuivi.

Résoudre les imperfections institutionnelles

"Nous devons aussi résoudre les imperfections institutionnelles au niveau de l'Union européenne. Nous avons une union monétaire avec une banque centrale très forte, mais les autres institutions se sont révélées faibles", a reconnu le banquier central.

Egalement interrogé sur les politiques conduites par Paris et Rome, M. Praet a constaté qu'"il y a eu un changement important". "En France, le gouvernement prend pour la première fois de vrais risques politiques pour améliorer le marché du travail. En Italie, il y a également des progrès significatifs, au moins dans les intentions. (...) Mais ce qui est important désormais, c'est la mise en oeuvre" des réformes, a-t-il ajouté.

Une réponse globale

Selon le banquier central, "il faut une réponse globale maintenant: toutes les autorités doivent assumer leurs responsabilités, au niveau budgétaire, structurel et monétaire".

Face au risque de déflation en zone euro, la BCE étudie quant à elle plusieurs options d'assouplissement quantitatif ou "QE", c'est-à-dire des achats d'actifs à très grande échelle.

L'institution achète d'ores et déjà des titres financiers et a mis à disposition des banques des prêts bons marchés très abondants pour relancer la dynamique des prix, très faible ces derniers mois. Pour les analystes, ces mesures risquent toutefois de ne pas suffire et il semble acquis que la banque centrale va s'engager très prochainement dans des rachats massifs d'obligations souveraines sur le modèle de la Réserve fédérale américaine.

L'institution monétaire avait promis d'agir davantage à deux conditions: que les mesures déjà mises en oeuvre se révèlent insuffisantes et que les perspectives d'inflation, un agrégat très regardé par les banquiers centraux, se dégradent. "Désormais nous avons un peu des deux" et "il y a le risque" que les outils déjà déployés ne suffisent pas, a affirmé M. Praet.