Jean-Louis Borloo ou la difficulté de s'affranchir

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  654  mots
Copyright Reuters
Ministre sans discontinuer de 2002 à 2010 sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Fidéle soutient radical valoisien du RPR puis de l'UMP , Jean-Louis Borloo aurait eu à rendre crédible sa "troisième voie" lors des prochaines échéances électorales. Il a préféré renoncer.

"Si jean-Louis Borloo est candidat, alors Sarkozy ne sera pas au second tour de la présidentielle", pronostiquait il y a quelques semaines le politologue Stéphane Rozès, président de "Conseils, Analyses et Perspectives" (CAP). Il a été entendu. Dimanche 3 octobre, le leader de "l?Alliance des centres" a renoncé à se présenter en 2012. Un geste qui dégage sacrément le terrain à droite pour l?actuel locataire de l?Elysée, puisqu?il semble aussi acquis que Dominique de Villepin ne sera pas en situation. Certes, avec les probables candidatures ? encore leur faudra t-il obtenir les 500 signatures de parrainage - de Christine Boutin et Nicolas Dupont-Aignan, Nicolas Sarkozy ne sera pas complètement en situation de monopole. Mais rien de très ennuyeux pour le chef de l?Etat. Le seul vrai danger était représenté par l?hypothèse Jean-Louis Borloo, avec ses 7 à 9% d?intentions de vote? Une fourchette élevée qui aurait pu empêcher Nicolas Sarkozy d?accéder au second tour alors que Marine Le Pen (FN) se maintient à un niveau élevé (entre 15 et 19%).

Pour autant, l?actuel président de la république n?en a pas fini avec les candidatures centristes. D?abord, après le retrait de Jean-Louis Borloo, Hervé Morin, président du Nouveau Centre, pourrait se sentir pousser des ailes. Mais l?ancien ministre de la Défense n?a pas le charisme de son rival de Valencienne et il peinera rassembler derrière son nom.

Reste aussi l?éternel rebelle du centre : François Bayrou. Le président du Modem attend son heure. Certes, il n?est plus dans la position de 2007 où sa candidature - il avait rassemblé plus de 18% des voix au premier tour - était apparue aux yeux de beaucoup comme la seule pouvant faire vraiment barrage à Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal paraissant un peu "légère". Il n?en reste pas moins que l?élu du Béarn dispose, lui, d?une vrai capacité de nuisance face à l?actuel majorité. On le sait en effet capable de passer des alliances avec les socialistes, voire même d?appeler à voter pour la candidat PS au second tour de la présidentielle. Ce qui n?aurait probablement pas été le cas de Jean-Louis Borloo.

Car là était tout le problème de l?ex-ministre de l?Environnement : comment afficher son autonomie et se présenter comme le partisan d?une "autre voie, entre le PS et l?UMP" quand on a été ministre sans discontinuer entre 2002 et 2010, sous les présidences de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ? Comment Jean-Louis Borloo aurait il pu apparaître comme porteur de valeurs humanistes, quand son silence fût retentissant durant l?été 2010 au lendemain du discours présidentiel de Grenoble stigmatisant les étrangers ? Comment aurait il pu être crédible sur le terrain économique ? Lui qui a avalisé la loi Tepa de 2007 instituant le bouclier fiscal à 50% et qui a avalé les couleuvres du quasi-total renoncement aux mesures arrêtées dans le cadre du Grenelle de l?Environnement.

Alors, certes, le leader centriste tentait de se refaire une virginité en défendant, par exemple, l?idée d?instituer un prélèvement exceptionnel durant trois ans de 2% sur les bénéfices avant impôts de toutes les entreprises cotées en bourse. Où encore, en se disant favorable à une "réflexion" sur la séparation des activités de dépôt et d?investissement des banques. Où aussi en prônant une régulation des "hedge funds".

Rien de bien clivant, in fine, par rapport à la majorité présidentielle. D?ailleurs, nombreuses sont les voix à l?UMP, de Marc-Phillippe Daubresse, secrétaire général adjoint du mouvement, à Thierry Mariani, ministre des Transports et leader de la Droite populaire, à prier Jean-Louis Borloo de revenir le plus vite possible dans la grande famille de la majorité présidentielle.