Comment François Hollande pousse les élus locaux socialistes à la dissidence

Par Jean-Pierre Gonguet  |   |  627  mots
François Hollande avec les élus bretons, à l'hôtel de Brienne, à Paris, en décembre dernier. | DR
Avec leur Big Bang Territorial, François Hollande et Manuel Valls ont clairement fait comprendre aux élus locaux socialistes qu’ils faisaient une croix sur les élections départementales et régionales de 2015 et assumaient la débacle annoncée. Des milliers d’élus vont perdre leur poste et ils sont enclins à refuser la réforme et à assumer une dissidence

Le ministère de l'Intérieur vient de réaliser un calcul un peu spécieux et très confidentiel mais qui fait peur aux socialistes : en reportant le vote des municipales sur les élections des conseils départementaux et régionaux, le Parti socialiste garderait moins de 20 départements sur soixante et perdrait toutes les régions, sauf la Martinique et, peut être, le Nord Pas-de-Calais. 

Bien sûr, nul ne sait ce qu'il peut advenir d'ici 2015, mais François Hollande qui, en 2012, avait la majorité dans les grandes villes, les régions, les départements et les deux Assemblées, pourrait ne plus avoir, en 2015, que l'Assemblée nationale. Sans compter les Métropoles, dont celle du Grand  Paris qu'il aurait du gagner mais qu'il a offertes à l'opposition.

 

Le pari de la croissance laisse les élus PS sur la touche

Les élus socialistes ont donc le moral dans les chaussettes. D'autant plus que le Président n'a absolument pas l'air de se soucier de leur sort s'ils en croient ce que laissent filtrer quelques visiteurs du soir. Pour eux,  le Président aurait décidé d'enjamber toutes les élections intermédiaires et de jouer son va tout sur un retour de la croissance d'ici 2016. D'ailleurs, les parlementaires bretons invités mardi soir par Jean Yves Le Drian, en ont eu la confirmation : François Hollande s'est invité et leur a tenu le même discours qu'en décembre dernier.

C'était « comme si rien ne s'était passé » et qu'il n'y avait pas de débâcle électorale annoncée, a expliqué l'un des élus présents. C'était un discours « hors sol » a dit un autre, des propos désincarnés qui les ont tous laissés un peu pantois. Les tweetos en ont même oublié de tweeter… Depuis la nomination de Manuel Valls, les élus socialistes se sentent abandonnés. Même les députés socialistes : en réunion de groupe mercredi matin ils ont regardé I Télé pour entendre Manuel Valls mais surtout André Vallini expliquer face caméra la réforme territoriale alors qu'il était supposé venir leur annoncer en premier !

 

La dissidence corroborée par le calendrier 

Du coup, beaucoup d'élus locaux pensent qu'ils vont devoir faire un choix. Car comment un socialiste peut il faire campagne aux élections départementales alors que Manuel Valls a dit que les départements n'existeraient plus en 2021? Comment être candidat aux régionales alors que le conseil régional a une chance sur deux de disparaitre dans la foulée ?  La réponse est simple : en refusant la réforme et en rentrant en dissidence s'il le faut. Un président de région ou de conseil général qui veut « sauver sa peau » va devoir expliquer qu'il est contre la réforme et que toute façon elle ne s'appliquera jamais.

Et le calendrier joue en fonction des dissidents : si les régions ne fusionnent pas, le ministère de l'Intérieur le fera d'autorité fin 2017. Si les intercommunalités ne se restructurent pas comme l'a demandé Manuel Valls, l'Etat tranchera fin 2018. Quant aux départements ce sera fin 2021. Question : François Hollande sera-t-il encore Président en 2017 ? Si les élus locaux socialistes pensent que non, ils refuseront les réformes, joueront la dissidence ouverte ou larvée et attendront que la droite annule ces réformes comme elle ne manquera pas de le faire !

Les élus socialistes en parlent beaucoup. Et c'est un peu normal  car toute réforme territoriale est d'abord une réforme du marché de l'emploi des élus. Là, des milliers d'entre eux sont en train de comprendre qu'ils viennent de se faire licencier. Et comme tout licencié, un élu peut réagir