Le "fixing" du prix de l'or devrait devenir électronique et plus transparent

Par latribune.fr  |   |  715  mots
Un nombre limité de banques -- actuellement Barclays, HSBC, Scotiabank et Société Générale -- se concertent pour fixer un prix de référence au métal précieux. De nombreux spécialistes pensent que ce fixing, qui sert de référence à de nombreuses transactions (entre 2 et 4 millions d'onces seraient échangées chaque jour sur cette base selon le CPM Group), est susceptible d'être "manipulé".
Ce lundi, à Londres, se réuniront les principaux acteurs du marché du métal jaune pour réformer et moderniser une institution qui date de 1919 : le "fixing" du prix quotidien de l'or entre quelques banques. Le but est d'en finir avec le soupçon de manipulation des cours.

Les acteurs du marché des métaux précieux se réunissent  ce lundi à Londres sous l'égide du Conseil mondial de l'or (CMO) pour discuter de la modernisation du processus de fixation du prix de référence de l'or, jugé vétuste et potentiellement manipulable.

"Le fixing de l'or est anachronique à l'âge moderne des échanges électroniques", assène Mark O'Byrne, directeur de la recherche chez le courtier GoldCore, interrogé par l'AFP.

Peu d'évolution depuis 1919

Depuis sa création le 12 septembre 1919, le fixing n'a en effet évolué qu'à la marge : il est effectué deux fois par jour au lieu d'une depuis 1968 et via une réunion téléphonique et non plus physique depuis 2004.

Hormis cela, c'est encore aujourd'hui un nombre limité de banques -- actuellement Barclays, HSBC, Scotiabank et Société Générale -- qui se concertent pour fixer un prix de référence au métal précieux.

C'est pourquoi beaucoup pensent que le fixing, qui sert de référence à de nombreuses transactions (entre 2 et 4 millions d'onces seraient échangées chaque jour sur cette base selon le CPM Group), est susceptible d'être "manipulé".

"Les traders travaillant pour les institutions impliquées dans le fixing peuvent conclure des échanges pour influencer le prix dans un sens bénéfique à leur portefeuille", estime ainsi Caroline Bain, économiste chez Capital Economics.

Le fixing "manque de transparence, ce qui signifie que les prix peuvent être truqués pour bénéficier aux banques, aux dépens des producteurs, des courtiers, des investisseurs, des joailliers et des autres acteurs du marché", abonde M. O'Byrne.

Barclays mis à l'amende

Un exemple de manipulation a été mis au jour avec l'amende de 26 millions de livres (32,7 millions d'euros) infligée en mai à Barclays par le gendarme des marchés britannique (FCA).

Un employé de l'établissement avait agi illégalement le 28 juin 2012 en tentant d'influencer la fixation du prix de l'or au-dessous d'un certain seuil afin d'éviter d'avoir à payer un client.

"Il est vrai qu'il s'agissait plus de problèmes internes à Barclays, qui n'a pas surveillé l'activité de ce courtier, mais cela souligne le fait que le fixing de l'or peut être manipulé", signale Mme Bain.

La FCA n'est pas la seule à s'être penchée sur le fixing de l'or, le régulateur financier allemand, la BaFin, ayant lancé en décembre dernier une enquête officielle sur la façon dont sont fixés les prix des métaux précieux.

Vers l'adoption d'un système électronique

Alors que plusieurs scandales bancaires ont éclaté ces dernières années (Libor, devises, etc.), les acteurs du marché semblent cette fois vouloir prendre les choses en mains.

"Le secteur voit ce qui va inexorablement arriver et essaye de prendre les devants", confirme M. O'Byrne.

Le fixing de l'argent, établi selon la même méthode mais une fois par jour, doit ainsi disparaître dans sa forme actuelle mi-août et être remplacé par un système électronique basé sur des enchères et pouvant être audité.

La démarche lancée par le CMO devrait aboutir à des résultats similaires pour le fixing de l'or.

"Améliorer la transparence"

Un système électronique "ne sera pas non plus la panacée", estime toutefois M. O'Byrne, rappelant que "les marchés avec des échanges électroniques ont été manipulés ces derniers mois".

"Mais c'est évidemment une bonne chose d'améliorer la transparence et de prendre des mesures pour que le marché ne soit pas sujet à manipulation", estime Mme Bain.

Selon elle, le changement ne devrait pas avoir d'impact notable sur le cours de l'or, le fixing ayant perdu de son influence ces derniers temps.

De son côté, le directeur de la recherche de GoldCore estime qu'un "fixing plus transparent et fiable pourrait mener à une hausse des prix de l'or" car "les prix actuels sont artificiellement bas et ne reflètent ni le délicat équilibre entre la demande et l'offre ni le degré de risques systémique et géopolitique dans le monde".

Un cours qui a baissé de 25% en 2013

Après avoir atteint un pic historique de 1.921,15 dollars l'once en septembre 2011, le cours de l'or a baissé, surtout en 2013 (-25%), et évolue depuis le début de l'année entre 1.200 et 1.400 dollars.