Le monde tousse, les Brics s'enrhument

Par Aline Robert  |   |  416  mots
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Les Brics seraient-ils devenus un "Bloody Ridiculous Investment Concept" ? Le ralentissement de la croissance mondiale révèle en tout cas de profondes différences au sein de ce groupe de pays.

Voilà dix ans que le concept de Bric a été inventé par Jim O'Neill, banquier chez Goldman Sachs, pour décrire les quatre économies du monde dont la croissance était la plus rapide. Le Brésil, la Russsie, l'Inde et la Chine forment le noyau dur de ce bloc, auquel l'Afrique du Sud, le « s », est venue s'arrimer plus tard. Mais avec le ralentissement économique des pays de l'OCDE, les Brics tirent la langue à leur tour. Au point de susciter un véritable débat sur la réalité de leurs points communs et de leurs succès.

Albert Edwards, stratégiste à la Société Générale, envisage même de rebaptiser les Bric(s) en « Bloody Ridiculous Investment Concept » : un « thème d'investissement carrément ridicule ». Selon lui, l'atterrissage brutal de l'économie chinoise représentera un des plus gros chocs de 2012, qui pourrait prendre de court les autres Brics, d'autant qu'il interviendra après deux années déjà décevantes pour les investisseurs.

Divergences majeures

Les indices boursiers des Brics ont davantage plongé que les indices européens cette année. Leurs marchés actions ont subi de plein fouet les resserrements monétaires successifs, initialement destinés à modérer l'inflation. Bilan : cette dernière est toujours là, et la croissance bat de l'aile par endroits. Au Brésil, elle est même nulle au troisième trimestre. En Inde, elle rase les pâquerettes, à son plus bas niveau depuis deux ans. Les élections fantaisistes en Russie semblent entraîner une vague de contestations qui pourrait ébranler la confiance déjà ténue des investisseurs dans les institutions du pays. Et les économistes ne cessent de réviser à la baisse les perspectives de croissance de l'Afrique du Sud, dont l'économie est très liée aux Vieux Continent.

Avec une croissance mondiale moindre les divergences majeures entre les chemins empruntés par les différentes pays réapparaissent, et les problèmes structurels refont surface : corruption en Russie, manque d'infrastructures en Inde et au Brésil, et des classes moyennes pénalisées par l'inflation, promptes à protester, un peu partout. Chez Goldman Sachs, le « père » du concept des Bric, désormais associé, y croit encore dur comme fer, mais modère son propos. « Dans les dix ans à venir, les Brics vont probablement voir leur poids économique doubler, avec une croissance cumulée de 12.000 à 13.000 milliards de dollars, mais avec des taux de croissance plus faibles qu'avant. » Le débat est ouvert.