Bercy va muscler son arsenal juridique contre le blanchiment et le financement du terrorisme

Par AFP  |   |  567  mots
Plus grande transparence des "trusts" et des personnes physiques derrière les montages complexes, nouvelles professions obligées de déclarer d'éventuels soupçons d'opérations de blanchiment: le gouvernement va adopter mercredi en conseil des ministres plusieurs dispositions pour renforcer la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

Ce mercredi 12 février, le gouvernement doit adopter une ordonnance qui va muscler l'arsenal juridique de la France en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Malgré des efforts soulignés ces dernières années par les ONG, les scandales de blanchiment révélés par les médias et les lanceurs d'alerte ont marqué l'actualité ces dernières années. Ces mesures, qui transposent une directive européenne élaborée en 2016 après les attentats en France et adoptée en avril 2018, visent à la fois à durcir l'arsenal européen et à harmoniser les règles en vigueur dans les Etats membres. Pour Bruno Le Maire, "La criminalité financière est un fléau contre lequel nous devons tout mettre en œuvre pour prévenir, détecter, entraver les flux financiers illicites et poursuivre les criminels qui s'y livrent. Notre action doit s'adapter sans cesse aux nouvelles menaces [...] l'adoption de cette ordonnance, qui reprend les obligations fixées par l'Union Européenne dans sa 5ème directive, nous permet de renforcer considérablement l'arsenal juridique français."

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Eviter les failles en Europe

L'objectif est d'éviter les failles en Europe, explique-t-on au ministère de l'Economie, alors que les niveaux d'exigence diffèrent selon les pays. Parmi les nouvelles règles adoptées par la France figurent notamment de nouvelles obligations pour les professions obligées de déclarer à Tracfin (le service de renseignement financier) des opérations qui leur semblent litigieuses.

Il s'agit notamment des experts-comptables, banques et assurances, notaires, agents immobiliers, ou encore cercles de jeux, auxquelles vont s'ajouter les greffiers des tribunaux de commerce et les Caisses des règlements pécuniaires des avocats (Carpa).

Elles devront désormais consulter le registre des bénéficiaires effectifs des personnes morales avant de conclure toute opération avec un client potentiel. Ce registre, créé en 2016, permet d'identifier les personnes physiques derrière les personnes morales ou structures juridiques (entreprises, sociétés civile immobilière, etc.). Une obligation similaire est mise en place pour identifier les bénéficiaires des trusts, ces montages anglo-saxons opaques montrés du doigt après le scandale des "Panama Papers".

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Registre accessible au grand public

Dans un souci de transparence, le registre concernant les personnes morales sera dans quelques mois accessible au grand public, sur le site de l'Inpi (l'Institut national de la propriété industrielle). En revanche, celui sur les trusts ne sera accessible qu'aux autorités et, sur demande, aux personnes qui peuvent démontrer "un intérêt légitime" à le consulter, par exemple un agent immobilier lors d'une transaction. En 2016, la France avait déjà tenté de créer un tel registre consultable par le public, mais cette mesure avait été censurée par le Conseil constitutionnel.

Par ailleurs, la nouvelle réglementation prévoit des dispositions pour certifier les systèmes d'identification à distance utilisés notamment par les banques en ligne, par exemple pour vérifier l'identité d'un client à l'ouverture d'un compte. La directive européenne prévoit d'autres mesures sur le contrôle des utilisateurs de cryptomonnaies ou de cartes de paiement prépayées, mais qui sont déjà en vigueur en France.