Biodiversité : la Caisse des dépôts appelle les entreprises à investir

Par Giulietta Gamberini  |   |  662  mots
La priorité est donnée aux solutions naturelles qui, "en plus d'être éprouvées depuis des milliers d'années, ont l'atout d'être intrinsèquement adaptatives et progressives", souligne Laurent Piermont, président de CDC Biodiversité.
Sa filiale, CDC Biodiversité, lance Programme 2050, destiné à financer des actions d'adaptation et de restauration des territoires français face au changement climatique. Il est intégralement financé, de manière volontaire, par le privé.

Démarche volontaire, financement intégralement supporté par les entreprises, effets sur les territoires français : ce sont les signes particuliers de Nature 2050, le programme pilote lancé lundi 18 octobre par la filiale de la Caisse de la Dépôts, CDC Biodiversité. Un an après le signature historique de l'Accord de Paris, et à la veille de l'ouverture de la COP22 à Marrakech, il met délibérément l'accent sur le lien - bio-univoque - entre climat et biodiversité : si d'une part le réchauffement climatique affecte les écosystèmes et les espèces vivantes, la perte de biodiversité risque pour sa part d'affaiblir la capacité de la nature d'absorber les gaz à effet de serre et donc d'aggraver le changement climatique.

Malgré cette relation forte, "la biodiversité reste en effet le parent pauvre de la lutte contre le changement climatique", souligne en effet Alain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Or, "investir dans la biodiversité, donc dans l'intérêt général, n'est pas l'apanage des ONG et des pouvoirs publics", souligne la secrétaire d'Etat Barbara Pompili, présente au lancement de Programme 2050.

Un programme complètement partenarial

Via Programme 2050, les entreprises sont donc invitées à financer des actions d'adaptation et de restauration des territoires agricoles, naturels et forestiers français. Soutenue par l'expertise - et la garantie contre le greenwashing - de partenaires tels que le Muséum national d'histoire naturelle, la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l'homme (FNH), France Nature environnement (FNE) et la LPO, CDC Biodiversité s'engage à protéger, jusqu'en 2050, un mètre carré de terre pour tous les 5 euros investis.

"Nous mettons ainsi l'accent sur le coût des actions, qui peuvent varier entre 3 et 30 euros, plutôt que sur leur valeur, inestimable", explique Laurent Piermont, président de CDC Biodiversité, qui accompagne déjà depuis sa création en 2008 les entreprises dans leurs actions de compensation réglementaires. "La mutualisation nous permet de raisonner en prenant pour référence une moyenne. Et cette métrique a un effet incitatif pour les entreprises, qui peuvent s'en servir pour déterminer leur engagement en décidant, par exemple, de verser 5 euros par mètre carré de surface possédée", précise-t-il.

En effet, "le programme est complètement partenarial : toutes les entreprises financent tous les projets. Les partenaires peuvent toutefois suggérer l'engagement d'actions collectives sur les territoires où elles sont implantées et où vivent leurs salariés". Les collectivités territoriales y sont associées.

Un projet ouvert

Les premiers projets ont été définis de manière à diversifier les domaines d'actions : de l'adaptation des territoires agricoles et forestiers avec une action de réhabilitation de la forêt Cévenole dans le Gard, à la protection des zone humides - qui jouent un important effet régulateurs dans les milieux tempérés - grâce au rétablissement du cours naturel de rivières limousines, en passant par la restauration de trames vertes et bleues dans la baie d'Aguillon et de la biodiversité en ville dans la friche Kodak à Sevran et le bois de Grâce en Seine-et-Marne. La priorité est donnée aux solutions naturelles qui, "en plus d'être éprouvées depuis des milliers d'années, ont l'atout d'être intrinsèquement adaptatives et progressives", souligne Laurent Piermont.

"Les moyens dont on dispose, correspondant à des millièmes de l'activité économique, peuvent néanmoins permettre d'atteindre des résultats significatifs", selon le président de CDC-Biodiversité. Le lancement d'aujourd'hui n'est d'ailleurs pas à ses yeux "un aboutissement" : si le nombre de partenaires a été initialement restreint pour des raisons d'efficacité, le projet est ouvert dans l'avenir à tous ceux qui veulent participer. "Des centaines d'autres actions restent à développer d'ici 2050", souligne Denez L'Hostis, président de FNE, qui voudrait notamment intégrer au programme des interventions en milieu marin et dans l'Outre-Mer. Et une extension temporelle, au-delà de 2050, est tout à fait envisageable, selon Barbara Pompili.