Biodiversité mondiale : la grande distribution française en première ligne

Le WWF a identifié les 500 entreprises ayant le plus d'impact sur les zones où la biodiversité est la plus menacée. Parmi les 25 entreprises françaises concernées, toute la grande distribution, les acteurs de la construction, les coopératives et des leaders mondiaux comme Danone, L’Oréal ou Michelin.
Dominique Pialot
Parmi les 500 entreprises ayant le plus d'impact sur la biodiversité dans le monde, 25 sont françaises.

Les acteurs français de la grande distribution font partie des entreprises qui ont le plus d'impact sur la biodiversité dans le monde. C'est ce qui ressort d'un rapport publié ce mercredi 20 avril par le WWF France.

Celui-ci s'inscrit dans une initiative plus large de "transformation des marchés" entamée depuis 2010 par l'ONG au niveau mondial, portant sur 16 matières premières agricoles (soja, huile de palme, ressources halieutiques -saumon, thon, poisson blanc, crevette sauvage et d'élevage, poisson fourrage- bois d'œuvre, pâte à papier, hévéa, produits laitiers, bœuf, canne à sucre, biomatériaux et coton) dont les modes d'exploitation menacent directement 35 régions à la biodiversité particulièrement fragile (Amazonie, Bassin du Congo, Bornéo et Sumatra, Triangle du Corail, etc.). L'impact climatique, global par définition, et celui sur la ressource en eau n'ont pas été pris en compte.

L'effet de levier des leaders

A partir des volumes de ces matières consommées, WWF a identifié les 500 entreprises qui exercent directement ou non la plus grande pression sur ces éco-régions, et disposent donc de la plus grande marge de manœuvre pour alléger cet impact. Et ce, d'autant plus qu'en tant que leaders, elles jouissent d'un effet d'entraînement auprès de leur chaine d'approvisionnement et de l'ensemble de leur secteur.

Les entreprises françaises sont les plus représentées du classement mondial avec les américaines. « Ce qui n'a rien d'étonnant, rappelle Pascal Canfin, directeur du WWF France, puisque la France compte plusieurs leaders mondiaux. »

La France a beau être le quatrième pays forestier d'Europe, ses forêts restent peu exploitées, ce qui la rend très dépendante des importations. Idem pour le soja, massivement importé pour l'alimentation animale.

En plus de la grande distribution, dont tous les acteurs français sont représentés, la restauration collective, les grandes coopératives, les entreprises de la construction, mais aussi Danone, L'Oréal et Michelin (premier acheteur mondial d'huile de palme) figurent dans la liste de 25 noms dévoilée par l'ONG. Mais cette liste a aussi le mérite de faire apparaître des noms peu connus du grand public, tels que Tereos (3e sucrier mondial), Sodiaal et Savencia (produits laitiers), ou encore Cooperl (1er producteur français de porc) ou Avril (ex.Sofiprotéol).

Entreprise et biodiversité - WWF

De la certification à la refondation du modèle économique

« Il ne s'agit en aucun cas d'un classement », souligne Pascal Canfin, pointant l'impossibilité de comparer, par exemple, une tonne de soja et une tonne de crevettes et insistant  sur un point: « Si ces entreprises font partie du problème, elles font donc également partie de la solution. »

WWF prône en effet le dialogue, en direct ou dans un cadre collectif. D'ailleurs, parmi les entreprises citées, plusieurs ont d'ores et déjà mis en place des politiques destinées à limiter leur impact, dont certaines (Bouygues, Carrefour, Michelin ou Sodexo) travaillent avec le WWF. Il s'agit essentiellement de démarches de certification de leurs achats, notamment pour l'huile de palme ou le soja. Mais au vu de  leurs volumes, même celles-ci disposent encore de marge de manœuvre pour s'améliorer. Certaines revisitent même leur modèle économique, à l'instar de Michelin, qui s'intéresse à toutes les nouvelles formes de mobilité. Une démarche sans doute plus simple pour un Michelin que pour un distributeur.

Toutes en tous cas ont été prévenues en amont, et plusieurs avaient fait le déplacement pour assister à la présentation de l'étude. Vinci fait le lien avec ses actions en matière de ville durable au travers de son think tank « la Fabrique de la Cité », tandis que Total (qui appartient à un secteur avec lequel le WWF ne travaille pas) s'étonne que ses faibles volumes de production d'agro-carburants de première génération le fassent apparaître parmi les plus gros consommateurs français d'huile de palme.

Des engagements sur toute la chaîne de valeur

« Les entreprises sont conscientes de ces enjeux et désireuses d'améliorer leurs pratiques, mais ça n'est pas toujours simple », reconnaît Marie-Christine Korniloff, directrice déléguée au monde économique du WWF France.

Bien qu'elle ne soit pas systématique sur le plan juridique (en attendant le vote cet été de la loi relative au devoir de vigilance), la responsabilité des entreprises s'étend sur toute leur chaîne de valeur. C'est d'ailleurs sur ce périmètre que portent les engagements volontaires les plus récents.

Au-delà des entreprises elles-mêmes, c'est aussi en amont (du côté des usiniers, des intermédiaires et des petits producteurs) qu'il faut agir. La formation des petits producteurs d'hévéa indonésiens, par exemple, peut être prise en charge par le WWF avec le soutien de fonds provenant des agences de développement. Une bonne partie de la réponse se trouve aussi en aval, du côté du consommateur. Mais les entreprises peuvent-elles les inciter elles-mêmes à modifier leur comportement d'achat au risque de pénaliser leur activité ?

Dominique Pialot

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Commentaires 2
à écrit le 20/04/2016 à 21:47
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C'est inutile d'aller à l'autre bout de la planète pour trouver des atteintes caractérisées à l'environnement, les plus gros bétonneurs de terres fertiles en France sont Auchan et Décathlon !

à écrit le 20/04/2016 à 19:21
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Le WWF a fait perdre 20 ans à l'écologie en France. Sa politique d'accompagnement des entreprises n'a rapporté qu'un seul bilan comptable : son argent mais par contre rien de positif en biodiversité. Pire elle a discrédité celles et ceux qui prônaien...

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