Borne voudrait « renouer le dialogue » avec les syndicats sur un agenda social

Par latribune.fr  |   |  1252  mots
Elisabeth Borne entend tourner la page des retraites en associant les organisations syndicales à la construction de nouvelles mesures sociales. (Crédits : Reuters)
La Première ministre Elisabeth Borne entend « renouer le dialogue avec les organisations syndicales dès le début du mois de mai ». Elle promet de « transcrire fidèlement dans la loi » tout accord entre syndicats et patronats, notamment sur l'emploi des séniors. Le tout dans le cadre d'un « nouveau pacte de la vie au travail ». La CGT lui a déjà opposé une fin de non-recevoir.

[Article publié le jeudi 27 avril 2023 à 11h08 et mis à jour à 14h19] Invitée de France 2 ce jeudi matin, Elisabeth Borne a déclaré vouloir officiellement reprendre « de discussions avec les organisations syndicales dès le début du mois de mai ».

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« C'est très important qu'on change de regard sur les seniors, qu'on facilite les parcours professionnels, les fins de carrière », « des sujets dont je souhaite que les organisations syndicales et patronales puissent se réemparer », a déclaré la Première ministre, alors que le Conseil constitutionnel a invalidé certaines dispositions de la réforme des retraites sur ces thèmes. « Avec le président de la République on a déjà vu les organisations patronales. On leur a dit que c'étaient des sujets importants sur lesquels on souhaite avoir des négociations », et « dès qu'il y aura un accord, on le transcrira fidèlement dans la loi », a-t-elle ajouté.

La gouvernance de l'assurance chômage à clarifier

Lors d'une rencontre avec l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis) ce jeudi, la locataire de Matignon s'est montrée sévère, assurant que les partenaires sociaux « ne souhaitent pas se saisir » du sujet de la gouvernance de l'assurance chômage, qui figurait initialement dans les chantiers du ministère du Travail.

« Ca fait partie des sujets qu'on doit clarifier, parce qu'il y a quelques mois, il y avait une forte demande des organisations syndicales et patronales. Les derniers échos qu'on peut en avoir, c'est qu'ils ne souhaitent pas se saisir de ce sujet »" de la gouvernance, a déclaré Elisabeth Borne.

« Si c'est le cas, il va falloir qu'ils nous le confirment », a-t-elle ajouté. Cette négociation sur la gouvernance de l'Unédic, régime paritaire de l'indemnisation chômage, où l'Etat s'invite de plus en plus, figurait parmi les chantiers du ministère du Travail présentés en septembre 2022. Le gouvernement souhaitait que patronat et syndicats planchent sur une nouvelle gouvernance pour « mieux définir les rôles respectifs du gouvernement, du parlement et des partenaires sociaux ».

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L'idée initiale était que les partenaires sociaux adoptent cette nouvelle gouvernance avant de négocier, comme habituellement, un nouveau régime d'indemnisation qui sera en vigueur à partir de 2024. Selon la Première ministre, « il faudra qu'on organise dans l'agenda social le fait qu'il puisse y avoir cette négociation sur les règles de l'assurance chômage ».

En présentant sa feuille de route gouvernementale, mercredi, la Première ministre a dit souhaiter bâtir avec les partenaires sociaux un « agenda social » pour un « nouveau pacte de la vie au travail ».  Un projet de loi « qui embarquera le résultat des négociations » entre les partenaires sociaux devrait être déposé en fin d'année ou en début d'année 2024, a-t-on précisé mercredi à Matignon.

Former les bénéficiaires du RSA pour qu'ils retrouvent un emploi

Par ailleurs, s'agissant des bénéficiaires du RSA, la Première ministre a confirmé l'engagement présidentiel d'un accompagnement intensif de 15 à 20 heures hebdomadaires d'insertion. « Une partie de ceux qui touchent le RSA pourraient travailler. Et donc, on va les accompagner, on va avoir un contrat d'engagement réciproque, avec des droits et des devoirs, pour retrouver le plus vite possible un emploi », a-t-elle expliqué.

« Il ne s'agit pas de les faire travailler sans les payer, il s'agit de leur permettre de découvrir des métiers, de se former. C'est ça les 15 à 20 heures d'activité dont on parle », a précisé la cheffe de l'Etat, tout en ménageant une exception pour les femmes qui ont un problème de garde d'enfants. « Un tiers des bénéficiaires du RSA sont des femmes seules avec enfant », a-t-elle rappelé.

Mercredi, à l'issue du Conseil des ministres, elle s'est aussi dite « confiante » dans sa capacité à trouver des majorités « projet par projet » pour chaque nouveau texte législatif qui sera présenté. « Ma volonté c'est effectivement sur chacun des textes de chercher une majorité », a-t-elle martelé. Interrogée sur sa volonté affichée de ne plus recourir au 49.3, hors textes budgétaires, elle a seulement évoqué son « objectif » de trouver des accords au cas par cas à l'Assemblée.

« Nous n'irons pas à l'Élysée pour parler de mesures régressives » (Sophie Binet, CGT)

 « S'il n'y a pas de retrait de cette réforme des retraites, il y a un contexte de défiance très fort vis-à-vis de l'exécutif (...) et la page sera compliquée à tourner », a indiqué Sophie Binet, la nouvelle secrétaire générale de la CGT, sur RTL en réponse à Elisabeth Borne. S'il s'agit « d'une main tendue pour venir discuter de la mise sous conditionnalité du RSA et de la stigmatisation des personnes qui sont privées d'emploi, pour nous, c'est non », a affirmé celle qui vient de succéder à Philippe Martinez à la tête du syndicat.

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 « Si c'est pour venir parler emploi des seniors alors qu'on a une réforme qui s'applique de façon extrêmement violente au 1er septembre et qui va reporter l'âge de départ pour des milliers de personnes sans qu'il y ait aucune mesure pour les seniors, ce n'est pas non plus ce sur quoi on est demandeurs », a-t-elle poursuivi. « Si c'est pour parler augmentation des salaires immédiate, c'est une proposition qu'on examinera. Mais pour l'instant, c'est pas du tout les propositions de la Première ministre, qui nous demande de parler de sujets clivants », a-t-elle encore dit. « Nous n'irons pas à l'Élysée pour parler de mesures régressives ».

Borne veut aller au bout du « bras de fer » sur l'intérim médical

Près d'un mois après le plafonnement des tarifs de l'intérim médical dans les hôpitaux publics, Elisabeth Borne s'est déclarée prête, jeudi, à aller « au bout du bras de fer » avec les praticiens « mercenaires », malgré les fermetures de services déjà constatées.

« Il faut qu'on aille au bout de cette forme de bras de fer, pour que les médecins acceptent des niveaux de rémunérations qui ne sont pas extravagants et qui ne sont pas décourageants pour leurs collègues », a déclaré la Première ministre lors d'une rencontre avec l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis).

Le gouvernement a décidé d'appliquer strictement depuis le 3 avril la loi encadrant les rémunérations des médecins intérimaires dans le secteur public, plafonnées à 1.390 euros brut pour une garde de 24 heures.

Un tarif qui « n'est pas négligeable », a estimé Elisabeth Borne, soulignant « la nécessité de mettre fin aux dérives » de certains médecins « qui demandent des rémunérations de 5.000 euros par jour ». « Non seulement c'est coûteux pour l'hôpital, mais en plus c'est délétère », a-t-elle insisté, expliquant que « ça ne peut que décourager les praticiens » en poste « qui voient passer ces mercenaires qui, quelque part, gâchent un peu le métier ».

Sauf qu'une partie de ces intérimaires refusent de travailler au tarif légal, obligeant des dizaines de petits hôpitaux à fermer - totalement ou partiellement - certains services essentiels comme les urgences ou la maternité.

(Avec AFP)