Budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale : les économies devront atteindre « au moins 20 milliards d'euros » en 2025

Par latribune.fr  |   |  1159  mots
Les économies à réaliser sur les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale devront atteindre « au moins 20 milliards d'euros » en 2025. (Crédits : Reuters)
Après que Bruno Le Maire a annoncé ce mercredi matin que le déficit public sera au-dessus des 4,9% en 2023, Thomas Cazenave a affirmé que des économies devront être réalisées sur les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale.

[Article publié le mercredi 06 mars 2024 à 16h32 et mis à jour à 17h15] Les économies à réaliser sur les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale devront atteindre « au moins 20 milliards d'euros » en 2025, et non plus les 12 milliards envisagés jusqu'ici. C'est ce qu'a annoncé ce mercredi le ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave.

« Compte tenu des résultats 2023 » des finances publiques et « de la révision de nos prévisions de croissance en 2024 », abaissée de 1,4% à 1%, « je dois vous dire en transparence que (...) nous devons vraisemblablement porter notre effort de douze à au moins 20  milliards d'euros d'économies supplémentaires », a annoncé lors d'une audition à l'Assemblée nationale le ministre, venu avec son collègue de l'Economie Bruno Le Maire présenter l'annulation de dix milliards d'euros de crédits de l'Etat pour 2024.

Moins de deux semaines après l'annonce d'un plan d'économies controversé de 10 milliards d'euros, les deux ministres répondaient ce mercredi aux questions des députés et sénateurs sur ces vastes coupes dans le budget de l'Etat. Les 20 milliards porteront pour leur part à la fois sur l'Etat et la Sécurité sociale.

« Nous sommes entrés dans un nouveau contexte des finances publiques marqué par une conjoncture moins favorable et des taux d'intérêt élevés », a pointé Thomas Cazenave.

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Un déficit public qui dérape

Des économies d'autant plus nécessaires d'après le gouvernement que Bruno Le Maire a indiqué encore ce matin que le déficit public sera « significativement au-delà des 4,9% » en 2023, autrement dit au-delà de l'objectif fixé par l'executif. En cause : des recettes fiscales moins dynamiques qu'espéré en 2023. Une situation qui s'est prolongée en janvier 2024, où les recettes fiscales encaissées par l'Etat ont diminué de 2,3 milliards d'euros par rapport au mois de janvier 2023.

Dans un entretien accordé au journal Le Monde, le ministre de l'Economie a martelé vouloir réduire la dépense publique, d'où l'annonce récente de 10 milliards de coupes budgétaires en 2024 qui « ne sont pas un coup de rabot mais un frein d'urgence ». Ces coupes, qui visent notamment la transition écologique, le travail ou l'éducation, devaient permettre au gouvernement de respecter son objectif de réduire le déficit public à 4,4% du produit intérieur brut en 2024, ce qui semble donc compromis. Et ce, sous le regard des agences de notation, qui vont se pencher sur la dette de la France au printemps.

« A un moment donné, il faut simplement refroidir la machine, parce que la croissance subit les conséquences du nouvel environnement géopolitique et que les recettes fiscales diminuent. Quand on gagne moins, on dépense moins », a fait valoir le ministre de l'Economie.

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Objectif de croissance à la baisse

D'autant que le gouvernement a déjà revu à la baisse son objectif de croissance 2024 comme indiqué précédemment : lui qui tablait sur 1,4% n'espère désormais plus que 1% sur l'année. Or qui dit moins de croissance, dit moins de recettes fiscales pour l'Etat.

Le nouveau chiffre de 1% de croissance « est encore très largement gonflé », a estimé mardi soir Eric Coquerel, le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, qui auditionne justement Bruno Le Maire et le ministre délégué aux Comptes publics Thomas Cazenave depuis 15h00 à propos de cette première coupe de 10 milliards d'euros.

« Quand vous avez un risque de récession économique, ce n'est pas le moment de baisser les dépenses publiques, qui sont aussi une façon de faire fonctionner l'économie », a poursuivi le député LFI dans une vidéo publiée sur le réseau social X (anciennement Twitter).

Du côté du Sénat, qui doit entendre les deux ministres à compter de 17h00, le rapporteur général du budget Jean-François Husson (LR) a fustigé mardi dans Les Echos un plan de coupes qui « arrive un peu tard ».

« Le Sénat avait proposé cet automne 7 milliards d'économies à l'issue de 150 heures de débats, alors que les hypothèses de croissance de Bercy paraissaient déjà hors d'atteinte », a-t-il rappelé, proposition alors « balayée d'un revers de main ».

 L'assurance chômage dans le viseur

Pour Bruno Le Maire, ces premiers dix milliards d'économies ne sont en plus qu'une « première étape » avant un possible « projet de loi de finances rectificative à l'été, si nécessaire ». Mais comme lui, Thomas Cazenave a considéré que les économies de 2024 « ne sont pas une cure d'austérité » :

« Nous ne renonçons en rien à notre ambition écologique (...) nous ne remettons pas en cause les effectifs prioritaires dans les services publics ou pour la protection des Français, nous respectons les engagements des lois de programmation des armées, de l'intérieur, de la recherche, nous ne remettons pas en cause les chantiers prioritaires de l'éducation nationale », a-t-il énuméré. Avant d'ajouter : « Nous n'arrêtons pas notre soutien au développement de l'aide publique au développement ».

Du côté du chômage, depuis trois mois, le gouvernement manifeste également sa volonté de durcir encore les droits à l'assurance-chômage, après deux réformes controversées en ce sens en 2019 et 2023.

Ainsi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a plaidé mercredi pour une reprise en main « définitive » par l'Etat de l'assurance-chômage, pour laquelle une nouvelle réforme est envisagée par le gouvernement afin d'en durcir encore les droits.

« Il est indispensable de poursuivre les réformes de structure. Une réforme de l'assurance-chômage est nécessaire pour atteindre le plein-emploi, le Premier ministre a raison de le rappeler », déclare le ministre dans un entretien au quotidien Le Monde.

« Nous gardons une durée d'indemnisation la plus longue parmi les pays développés: dix-huit mois. La responsabilité des partenaires sociaux, ce sont les salariés. La responsabilité de l'Etat, ce sont tous ceux qui sont au chômage. Pour ma part, je considère que l'Etat devrait reprendre la main sur l'assurance-chômage de manière définitive », rajoute-t-il.

Pour rappel, le régime de l'assurance-chômage est actuellement piloté par l'Unédic, organisme paritaire. Les partenaires sociaux renégocient les règles tous les 2 à 3 ans pour tenir compte des évolutions du marché du travail, ces règles étant formalisées dans une convention que l'Etat valide. Mais depuis 2018, leurs marges de manœuvre sont restreintes car le gouvernement leur adresse en amont une « lettre de cadrage » qui fixe des objectifs (notamment d'économies) à atteindre. Sans accord, l'Etat reprend la main avec un « décret de carence ».

(Avec AFP)