Chômage : hausse en décembre mais baisse sur l'année 2016

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  1152  mots
En 2016, si l'on tient compte de la seule catégorie "A", la courbe du chômage s'est réellement inversée avec 107.400 inscrits en moins. Mais d'autres catégories, moins visibles, sont elles en hausse. Au total, depuis l'arrivée de François Hollande à l'Elysée, il y a 550.300 inscrits en plus en "catégorie A". Le taux de chômage est également orienté à la baisse.
Le chômage a progressé en décembre de 0,8%, soit 26.000 inscrits de plus en catégorie "A". Mais sur l'ensemble de l'année 2016, dans cette même catégorie, on enregistre 107.400 inscrits en moins. Une inversion de la courbe réelle mais tardive et masquée par les 550.300 inscrits supplémentaires enregistrés depuis l'arrivée de François Hollande à l'Elysée.

C'est raté pour la passe des quatre. En décembre, le nombre des demandeurs d'emploi en catégorie « A » a progressé de 0,8%, soit 26.100 inscrits de plus par rapport à novembre. Et ce après trois mois de baisse consécutifs. Il n'en reste pas moins que si l'on se cantonne à « la courbe officielle » du chômage, celle qui prend en compte les inscrits en catégorie « A » en France métropolitaine, l'inversion s'est réellement produite en 2016... malgré les apparences.

107.400 inscrits de moins sur un an en catégorie "A"

Alors certes, politiquement parlant, ce retournement de tendance tant attendu, semble invisible, voire illisible tant, durant les quatre premières années du quinquennat, la progression a été forte. Pourtant, les données sont là. En 2016, sur douze mois de statistiques mensuelles, on a enregistré sept baisses. En trois mois, le nombre des inscrits dans la catégorie « A » a diminué de 17.400 (- 0,5%). Cela porte à 107.400 (- 3%) la baisse globale sur l'année 2016. C'est la première fois depuis... 2007, que le nombre des inscrits à Pôle emploi dans cette fameuse catégorie « A » est inférieur en fin d'année par rapport au début de l'année.

Fin décembre, il y a très exactement 3.473.100 inscrits en catégorie « A » en France métropolitaine (3.729.300 avec les DOM), contre 3.447.000 un mois plus tôt et surtout 3.580.500 fin 2015 (3.840.600 avec les Dom).

Si, cette fois, on inclut, les catégories « B et C », c'est-a-dire les demandeurs d'emploi ayant exercé une activité plus ou moins réduite dans le mois, le nombre total des inscrits « A, B, C » est resté stable sur un mois (5.475.700 pour la France métropolitaine et 5.782.200 avec les DOM)) et quasiment au même niveau sur un an (Ils étaient 5.478.000 en décembre 2015).

Boum des chômeurs en formation

Si l'on rentre dans le détail des catégories, sur un an, quelques mouvements importants sont à signaler. La catégorie « C » - demandeurs d'emploi ayant travaillé plus de 78 heures dans le mois - a ainsi fortement progressé sur un an, passant de 1.182.700 fin décembre 2015 (France métropolitaine) à 1.301.300 fin 2016, soit une hausse de 8,9%. Il s'agit là de personne exerçant un emploi mais qui sont inscrits à Pôle emploi dans l'espoir d'en trouver un autre. Quant à la catégorie « D », elle fait carrément un bond de 24,6% en un an, passant de 274.200 à 338.300. Il faut voir dans cet important mouvement l'un des effets du plan « 500.000 chômeurs » décidé par François Hollande, car la catégorie « D » accueille notamment les chômeurs en formation. Un "boum" qui va bien sûr donné lieu à de très nombreux commentaires sur les "tripatouillages".

A noter également que ce sont les jeunes de moins de 25 ans qui sont les principaux bénéficiaires de la baisse du chômage. Malgré une légère progression en décembre (+3.400, soit +0,7%), le nombre de jeunes demandeurs d'emploi sans activité diminue de 14.900 (-3,0 %) sur les trois derniers mois. Le bilan annuel est également favorable car leur nombre diminue pour la deuxième année consécutive : la baisse enregistrée en 2016 (-46.100, soit -8,8%) est même plus de deux fois supérieure à celle de l'année 2015 et permet au nombre de jeunes inscrits de retrouver son niveau de mi-2011.

Autre donnée plutôt positive, sur l'ensemble de l'année 2016, la baisse du nombre des chômeurs de longue durée (inscription depuis plus d'un an) atteint 58.300 (-2,4%).

Alors pourquoi cette baisse (tardive du chômage). Il y a bien sûr la politique des emplois aidés (sous toutes leurs formes), le plan « 500.000 chômeurs déjà évoqué » mais, indéniablement aussi, la (fragile) croissance. Selon l'Insee, près de 237.000 créations de postes ont été enregistrées dans le secteur marchand au cours des 18 derniers mois, dont 157.00 depuis le début 2016. Et selon l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss), les embauches en CDI en 2016 ont augmenté de près de 9% par rapport à 2015.

Une inversion politique invisible

Que penser alors de toutes ces données. François Hollande, qui a renoncé à briguer un second mandat, ou plutôt qui en a été empêché, avait eu la très malheureuse idée d'annoncer dès septembre 2012 une prochaine « inversion de la courbe du chômage ». Le ministre du Travail de l'époque, Michel Sapin, avait multiplié les circonvolutions pour expliquer les propos présidentiels... très imprudents.

En fait donc, il aura fallu attendre l'année 2016 pour que, réellement, cette courbe du chômage s'inverse. Bien trop tard dans l'esprit du grand public. Pourquoi ? Tout simplement parce que la hausse a été beaucoup trop massive sur les quatre premières années du quinquennat. Il faut en effet avoir à l'esprit que, à ce stade, depuis l'arrivée de François Hollande à l'Elysée en mai 2012, il y a tout de même 550.300 inscrits en plus en catégorie « A » et ce malgré la baisse de 2016.

Alors certes, on peut toujours accuser Pôle emploi de « bidouiller » les statistiques, notamment en faisant passer les chômeurs d'une catégorie à une autre. Tout ceci est faux mais le scepticisme demeure malgré tout...Et iI n'y a rien à faire.... Quel que soit le gouvernement en place, il est toujours soupçonné de faire pression sur Pôle emploi pour « truquer» les données mensuelles sur les demandeurs d'emploi en jouant notamment sur les radiations.

Le taux de chômage : le vrai juge de paix

Aussi, afin d'éviter toutes les polémiques sur la façon dont Pôle emploi comptabilise le nombre des demandeurs d'emploi, le vrai juge de paix est davantage constitué par un autre indicateur : le taux de chômage, le seul d'ailleurs reconnu sur le plan international.

Calculé par l'Insee, celui-ci a le mérite de neutraliser certaines données, telle l'augmentation de la population active. Ainsi, selon les dernières prévisions de l'Insee - les données définitives ne sont pas encore connues, il faudra attendre mars- le chômage devrait avoir reculé à 9,6% en métropole (9,9% en France entière) à la fin 2016, soit une baisse de 0,4 point depuis la fin 2015 quand il atteignait 10%. Et cette décrue se poursuivrait jusqu'à la mi-2017 pour atteindre 9,5% de la population active en métropole fin juin.

Reste aussi, qu'au-delà des statistiques officielles, selon une étude de l'OFCE, au total, en intégrant le sous-emploi et le  "halo du chômage" (temps partiel subi, chômeurs découragés qui ne s'inscrivent plus, etc.), ce sont près de 6 millions de personnes qui se trouvent dans une situation fragile vis-à-vis de l'emploi, soit... 8% de plus que quatre ans auparavant, ce qui correspond à 400.000 personnes supplémentaires. Un constat dur à avaler pour une majorité « de gauche » qui avait fait de la baisse du chômage sa priorité. Difficile dans ces conditions de "vendre", politiquement parlant, les récents bons résultats... pourtant réels.