Fraude fiscale : le gouvernement "accepte" de supprimer le verrou de Bercy

Par latribune.fr  |   |  597  mots
Ces derniers mois, Gérald Darmanin s'était dit "ouvert" à des "aménagements" du verrou de Bercy, tout en se disant défavorable à sa suppression pure et simple. (Crédits : CHARLES PLATIAU)
Le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin s'est dit prêt à soutenir l'amendement parlementaire de la députée LREM Émilie Cariou qui prévoit de fixer dans la loi les critères de transmission à la justice des dossiers de fraude fiscale. Si l'amendement est voté par les députés, il pourrait bien mettre fin à ce monopole dont jouissait le ministère du Budget depuis les années 1920.

Le verrou de Bercy bientôt supprimé ? Le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin a en tout cas apporté son soutien sur France Inter aux aménagements proposés par la rapporteure du texte Émilie Cariou (députée LREM de la Meuse), chargée d'une mission sur le décrié "verrou de Bercy". Cette déclaration intervient quelques heures avant l'examen du projet de loi sur la fraude fiscale en Commission des Finances de l'Assemblée nationale (qui doit se terminer ce 25 juillet) et quelques jours après son passage devant les sénateurs, début juillet. L'examen en séance publique à l'Assemblée nationale devrait avoir lieu à la rentrée.

Le "verrou de Bercy" confère à l'administration le monopole des poursuites pour fraudes fiscales. Et si cet amendement est adopté par les députés, "ce ne sera plus le ministère du Budget qui décidera quand on transmet ou non des plaintes au parquet", a ajouté le locataire de Bercy. En effet, ce monopole dont jouissait le ministère était la cible de nombreuses critiques venant des magistrats et des ONG, qui l'accusent de favoriser une certaine forme d'opacité.

Ces derniers mois, Gérald Darmanin s'était dit "ouvert" à des "aménagements" du verrou de Bercy, tout en se disant défavorable à sa suppression pure et simple.

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La dénonciation des faits se fera de façon automatique

Début juillet, le Sénat avait en effet porté un premier coup à ce mécanisme, en fixant trois critères "cumulatifs" pour la transmission des dossiers à la justice : un montant de droits fraudés élevé (fixé par décret en Conseil d'État), l'application de pénalités d'au moins 80%, et la réitération des faits.

Mais l'amendement proposé par Émilie Cariou aux députés va encore plus loin. Il rend automatique la transmission des dossiers les plus graves, sans consultation préalable de la Commission des infractions fiscales (CIF), selon des critères inscrits dans la loi. Jusqu'à présent, c'est cette commission qui était chargée de présélectionner les dossiers et qui décidait ensuite de l'opportunité de les transmettre au juge (ou pas). Par contre, le fisc pourra transmettre à la CIF des dossiers dont les montants sont inférieurs à 100.000 euros si la gravité des faits le justifie.

L'amendement prévoit aussi de nouvelles règles dans le cas d'une fraude fiscale découverte en marge d'une enquête portant sur un autre délit : le juge concerné pourra alors "poursuivre directement" la fraude fiscale, selon l'amendement parlementaire consulté par l'AFP.

"Doubler le nombre de dossiers fiscaux transmis à la justice"

À l'heure actuelle, moins de 1.000 dossiers, sur les quelque 50.000 contrôles effectués chaque année, sont transmis à la justice. Avec ce nouveau cadre légal, Gérald Darmanin espère "doubler le nombre de dossiers fiscaux que nous transmettrons à la justice de façon automatique".

Les sénateurs socialistes ont déjà salué la décision du ministre dans un communiqué, jugeant qu'il s'agissait d'un "premier pas vers plus de transparence et de justice".

"Après avoir refusé à deux reprises cette année la suppression du verrou de Bercy, le gouvernement semble enfin se décider à supprimer cette procédure", ont-ils assuré, estimant que "les conditions du nouveau dispositif" devront "continuer à être améliorées".

(avec AFP)