"Fraude fiscale pour tous" : sept ans requis contre le fondateur de France Offshore

Par latribune.fr  |   |  719  mots
La banque lettonne Rietumu est également dans le viseur du parquet national financier.
Surnommé "le roi de l'off-shore", l'ancien banquier Nadav Bensoussan risque sept ans de prison et 9 millions d'euros d'amende pour avoir organisé un vaste système d'évasion fiscale et de blanchiment d'argent.

Il promettait il y a quelques années de mettre le paradis fiscal à la portée des petits patrons et des indépendants en France. Mais ses promesses ne risquent pas d'être tenues. Le parquet national financier (PNF) a requis sept ans de prison et une amende de 9 millions d'euros à l'encontre de Nadav Bensoussan qui a selon lui monté un système "industriel" de fraude fiscale et de blanchiment. La justice accuse également Nadav Bensoussan d'avoir entretenu "une clientèle sulfureuse et confidentielle de délinquants financiers".

Le PNF a requis 90 millions d'euros contre France Offshore

Selon les enquêteurs, France Offshore aurait aidé à blanchir plus de 700 millions d'euros au minimum pour le compte de "simples fraudeurs" (petits commerçants, professions libérales) ou de "délinquants" impliqués dans toutes sortes d'escroqueries. Le préjudice pour le fisc est estimé à quelque 300 millions d'euros. Le parquet a également requis une lourde amende de 90 millions d'euros à l'encontre de l'établissement lui-même, soit un peu plus que son dernier bénéfice net. Mais Nadav Bensoussan n'est pas le seul à être impliqué.

Les procureurs Patrice Amar et Ulrika Delaunay-Weiss ont aussi, au nom du PNF, étrillé la banque lettonne Rietumu, maillon indispensable selon le parquet d'un système de "l'offshore pour tous", passé de "l'artisanat" à une dimension "industrielle" entre 2008 et 2012, malgré des avertissements du fisc.

Les réquisitions ont également été importantes à l'encontre de l'avocate Magali Schinazi. Elle a été décrite comme "la formaliste" du système France Offshore et qui a selon Ulrika Delaunay-Weiss a "violé son serment" et "éclaboussé sa robe".  Trois ans de prison dont deux avec sursis, et une interdiction d'exercer pendant cinq ans ont été demandés. Enfin le PNF a également requis un an de prison ferme contre Yaakov Vogel, mystérieux prévenu, actuellement détenu en Argentine. Cette personne aurait joué "les gérants de paille" dans les montages mis en place par France OffShore.

Quant aux salariés de France Offshore concernés, des peines de prison et des amendes ont été requises. Mais Ulrika Delaunay-Weiss leur a trouvé des "circonstances atténuantes", relevant l'influence exercée par Nadav Bensoussan sur des salariés souvent "particulièrement jeunes", en situation "précaire", et généralement dotés de "personnalités dociles".

Un "autoditacte" de la défiscalisation

Lors de la description de son parcours pendant une audience au début du mois de mars, Nadav Bensoussan a expliqué être un "autodidacte" de la finance qui n'a aujourd'hui "plus de doutes" sur l'illégalité de son activité. Il a a ajouté avoir "un parcours très atypique" en ayant suivi "un cursus d'études uniquement religieuses" en France et aux Etats-Unis. Une étape va constituer un tournant dans son parcours. A l'âge de 20 ans, il part quelques mois en stage dans une banque suisse aujourd'hui disparue. Il raconte qu'au début des années 2000, les banques "ouvraient des comptes avec toute la solennité du secret bancaire suisse et dans des structures offshore. C'était normal, anormalement normal [...] Les gens n'allaient pas en Suisse pour faire autre chose. Il n'y a rien à faire d'autre à Genève, c'est ennuyeux au possible".

Par la suite, il revient en France et fonde une société dans le secteur de l'immobilier, puis il se lance dans la défiscalisation à grande échelle, en exploitant les débuts d'internet et en s'associant en particulier avec une banque lettone. Mais les choses se compliquent en 2008. La même année, il est visé par une enquête des inspecteurs du fisc et développe encore son activité.

A partir de 2010, ses activités sont médiatisées en France et à l'étranger, notamment en Lettonie. Il est présenté dans un reportage de France 5 comme "un ancien banquier converti à cette mode de l'expatriation fiscale". Avec son implantation dans ce pays balte, il cible les petits patrons qui veulent  "payer des impôts, mais peu, et ailleurs"qu'en France, sans disposer de fortunes". France Offshore assurait à l'époque que ces pratiques étaient parfaitement légales. Mais la justice va finir par convoquer l'homme d'affaires pour son procès qui s'est ouvert lundi dernier et qui devrait se terminer le 30 mars prochain.

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(avec AFP)