"Gilets jaunes" : après l'Acte XVIII, la riposte sécuritaire de l'exécutif

Par latribune.fr  |   |  919  mots
(Crédits : Reuters)
Limogeage du préfet de police de Paris, interdictions de manifester et augmentation des amendes : le Premier ministre Édouard Philippe s'est voulu ferme, lundi 18 mars, en annonçant plusieurs mesures après les violences et pillages survenus à l'occasion du 18e samedi de manifestations des "Gilets jaunes".

Les événements qui ont secoué les Champs-Élysées samedi dernier ont été "intolérables". Le Premier ministre Édouard Philippe a dévoilé lundi sa riposte sécuritaire pour tenter d'endiguer la violence lors des manifestations des "Gilets jaunes" qui menace de faire dérailler l'issue du Grand débat national, conçu comme une réponse à quatre mois de mobilisation. Certains lieux seront désormais interdits pour les manifestations, la participation à une manifestation interdite sera plus lourdement sanctionnée, et le maintien de l'ordre sera réorganisé.

En quarante-huit heures, les réunions de crise se sont multipliées - dimanche à Matignon, lundi matin à l'Elysée autour d'Emmanuel Macron, rentré samedi soir de la station de ski de La Mongie, en présence des ministre et secrétaire d'État à l'Intérieur, Christophe Castaner et Laurent Nunez, et de la garde des Sceaux Nicole Belloubet.

À Bercy, le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a pour sa part reçu les organisations professionnelles pour évaluer les conséquences économiques du mouvement, évaluées à 170 millions d'euros depuis le 17 novembre, sans compter samedi dernier.

Christophe Castaner et Bruno Le Maire doivent être entendus ce mardi devant deux commissions sénatoriales.

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Les manifestations sur les Champs-Elysées interdites

Dès samedi prochain, les manifestations dans les quartiers les plus touchés par les violences, comme les Champs-Élysées à Paris, la place Pey-Berland à Bordeaux et la place du Capitole à Toulouse, seront donc interdites si des éléments radicaux sont présents. Les forces de l'ordre « procéderont à la dispersion immédiate de tous les attroupements », a dit Édouard Philippe.

Le montant de la contravention encourue pour participation à une manifestation interdite, 38 euros actuellement, sera quant à lui "nettement augmenté". Le Premier ministre a indiqué avoir demandé à la Garde des Sceaux de porter l'amende à 135 euros.

Des unités anticasseurs dotées d'une plus "large capacité d'initiative"

Concernant la doctrine de maintien de l'ordre, qui avait déjà été modifiée après les violences du 1er décembre sur les Champs-Élysées, elle n'a « pas été correctement exécutée », a reconnu Édouard Philippe, et sera donc renforcée.

« Pour obtenir l'efficacité sur le terrain que nous n'avons pas obtenue samedi », le maintien de l'ordre va être « réorganisé en accordant une plus grande autonomie aux forces sur le terrain qui seront à Paris placées sous un commandement unifié et dotées d'une large capacité d'initiative », a-t-il précisé.

Les détachements d'action rapide vont être transformés en unités anticasseurs « dotées d'une capacité de dispersion et d'interpellation » susceptible d'intervenir rapidement.

Afin de procéder à davantage d'interpellations, des officiers de police judiciaire vont être déployés "au plus près du terrain" et des "moyens supplémentaires de transport" vont être mis en place, a poursuivi Édouard Philippe, évoquant également le recours aux drones et aux produits marquants.

Le préfet de Paris limogé, la doctrine renforcée

Déplorant que « des consignes inappropriées (aient) été passées pour réduire l'usage » des lanceurs de balle de défense (LBD) - selon lui non pas de la part du gouvernement, en visant implicitement la préfecture de police -, le chef de l'exécutif a dit sa volonté de « renforcer la fermeté de notre doctrine de maintien de l'ordre ».

Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, régulièrement donné partant entre affaire Benalla et polémiques à répétition sur la gestion de l'ordre public dans la capitale, en a fait les frais. Il est remplacé par Didier Lallement, jusqu'alors préfet de la région Nouvelle-Aquitaine. Réputé pour avoir un caractère bien trempé, est une figure connue de l'exécutif (secrétaire général du ministère de l'Intérieur de 2012 à 2014, puis nomination à la Cour des comptes).

« Nous avons constaté samedi soir que les consignes qui relevaient de la stratégie que nous avions définie à la suite du 1er décembre n'avaient pas été correctement mises en oeuvre », a expliqué Edouard Philippe au journal de 20h00 de France 2, précisant, à la demande de la journaliste, que la démission du ministre de l'Intérieur n'avait pas été envisagée.

Davantage de soutien pour les commerçants touchés

Selon la Chambre de commerce et d'industrie de Paris et d'Île-de-France, 91 commerces ont été touchés à Paris en marge de l'acte XVIII des "Gilets jaunes", notamment sur les Champs-Élysées "où la très grande majorité des commerces" ont été atteints. Parmi eux, 80% ont été assez lourdement touchés (casse, vols, incendies...).

En marge d'un déplacement dans une usine Schneider Electric dans l'Eure lundi, Bruno Le Maire s'est dit déterminé à ce que "qu'aucun commerçant ne mette la clé sous la porte". Plusieurs mesures ont déjà été mises en place ces dernières semaines pour soutenir les entreprises, dont un dispositif d'étalement de charges sociales et fiscales, qui vient d'être prolongé jusqu'à fin avril.

Un formulaire « permet à tous les artisans, tous les commerçants qui seraient menacés de faillite en raison des événements liés aux manifestations de déclarer leur situation sur le site (du fisc, ndlr) et de voir leurs impôts directs, impôt sur les sociétés ou impôt sur le revenu, annulés », a-t-il annoncé.

(avec AFP et Reuters)