Institutions, impôts... Macron esquisse le second acte de son quinquennat

Par AFP  |   |  1825  mots
(Crédits : PHILIPPE WOJAZER)
Au cours de son discours prononcé devant 320 journalistes réunis à l'Élysée, le chef de l'État a présenté les premiers enseignements du grand débat qu'il avait lancé le 15 janvier, pour répondre à la crise sociale née en novembre avec le mouvement des "gilets jaunes". Retrouver en replay la vidéo de la première conférence de presse du quinquennat.

LES POINTS A RETENIR

  • Macron estime à "5 milliards" d'euros la baisse de l'impôt sur le revenu
  • Retraite : Macron ne veut pas relever l'âge légal, évoque un allongement de la durée de cotisation
  • Macron prêt à "abandonner" l'objectif de 120.000 suppressions de postes des fonctionnaires
  • Le "travailler plus" : Macron n'est "pas favorable" à la suppression d'un jour férié comme l'on a fait pour le Lundi de Pentecôte
  • Climat : Macron veut mettre en place un "conseil de défense écologique"
  • Macron assume des "désaccords" et des "confrontations" avec l'Allemagne
  • Macron : "je pense qu'il faut supprimer l'ENA"
  • À propose de l'échéance de 2022, "je me fiche de la prochaine élection, je veux réussir ce mandat"
  • Emmanuel Macron "ne regrette pas d'avoir embauché" Alexandre Benalla, mais déplore "des fautes très graves".

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Emmanuel Macron a débuté la conférence de presse de jeudi par saluer les "justes revendications" portées par les "gilets jaunes", qui ne doivent pas être "occultées par les violences de quelques-uns", dans le propos liminaire de sa conférence de presse organisée à l'issue du grand débat national.

Évoquant "un mouvement inédit", il a remarqué qu'il "s'est ensuite progressivement transformé, tiraillé entre les injonctions contradictoires", avant d'être "récupéré par les violences de la société".

"Mais je ne veux pas que les dérives de quelques-uns occultent les justes revendications portées à l'origine de ce mouvement et profondément soutenues", a-t-il souligné.

Pendant les trois mois de grand débat, il a dit avoir entendu "un profond sentiment d'injustice: injustice fiscale, injustices territoriales, injustice sociale", sentiment qui est "installé". Mais aussi "sentiment de manque de considération", notamment de la part des "élites, toutes les élites", et lui-même "au premier chef", a-t-il dit.

Il a également reconnu qu'"il est difficile de construire quelque chose lorsque la confiance n'est pas rétablie à l'égard de celles et ceux qui doivent être des tiers de confiance, qui décident dans la société".

"Une profonde réorganisation de l'administration"

Edouard Philippe présentera en mai "une profonde réforme de l'administration" destinée à déployer "plus de fonctionnaires sur le terrain" tout en supprimant des postes "en administration centrale", a déclaré jeudi Emmanuel Macron.

Déplorant qu'il n'y ait "plus assez de monde sur le terrain" pour "apporter des solutions", le chef de l'État a notamment annoncé la création dans "chaque canton", d'ici à "la fin du quinquennat", d'un "endroit où l'on puisse trouver une solution aux problèmes", baptisé "France services"

Plus de fermetures "ni d'hôpitaux ni d'écoles" d'ici 2022

Emmanuel Macron a souhaité jeudi "ne plus avoir d'ici à la fin du quinquennat de nouvelles fermetures, ni d'hôpitaux, ni d'écoles sans l'accord du maire".

"Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de réorganisation, elles sont parfois indispensables. Ça veut dire qu'il n'y aura plus de disparition, comme on l'a trop vécu", a-t-il ajouté lors de sa conférence de presse organisée à l'issue du grand débat national.

Reconduction de la prime exceptionnelle défiscalisée

Il a annoncé la reconduction de la prime exceptionnelle de fin d'année "sans charges ni impôts" versée aux salariés, pour "que le travail paye" et contribue ainsi à "corriger les injustices".

"Nous avons fait beaucoup" pour cela, mais "il nous faut aller plus loin", notamment avec "la répétition cette année de la prime exceptionnelle sans charges ni impôts décidée l'année dernière dans le cadre de l'intéressement des entreprises si elles décident d'apporter 1.000 euros de plus", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.

 Un "nouvel acte de décentralisation" début 2020

Cette nouvelle décentralisation doit être "adaptée à chaque territoire" et porter "sur la politique de la vie quotidienne" comme "le logement, le transport, la transition écologique pour garantir des décisions prises au plus près du terrain", a expliqué le chef de l'État au début d'une conférence de presse, qui clôt la séquence du grand débat national.

"Ce nouvel acte de décentralisation devra s'appuyer sur quelques principes simples, d'abord responsabilité, lisibilité et financement", a ajouté le Président, estimant que les décentralisations menées dans le passé ont été "tout sauf claires, et elles n'ont pas permis ni de faire de véritables économies ni d'avoir une culture de la responsabilité démocratique".

Selon Macron, "on a souvent transféré des bouts de compétences", mais "on n'a jamais transféré la responsabilité démocratique qui va avec".

 Mise en place un "conseil de défense écologique"

La mise en place d'un "conseil de défense écologique" réunira les ministres dédiés pour faire les "choix stratégiques" imposés par "l'urgence climatique".

"Je veux que nous mettions en place un conseil de défense écologique qui réunira le Premier ministre et les principaux ministres chargés de cette transition (...) que je présiderai de manière régulière pour à la fois prendre les choix stratégiques et mettre au coeur de toutes nos politiques cette urgence climatique", a-t-il déclaré devant la presse à l'Élysée, répétant également sa volonté de défendre au niveau européen la mise en place d'une taxe carbone aux frontières.

Les CAF auront des "prérogatives
pour prélever les pensions alimentaires impayées"

Emmanuel Macron souhaite que les caisses d'allocations familiales (CAF) aient la "prérogative pour prélever les pensions alimentaires familiales" et ainsi aider les familles monoparentales.

"Ces fameuses familles monoparentales sont souvent ces mères vivant seules", a souligné devant la presse le président de la République, estimant qu'"on ne peut pas faire reposer sur des mères l'incivisme de leurs anciens conjoints".

Le chef de l'État a également évoqué le cas des aidants familiaux, estimant qu'"il y a des millions de nos concitoyens qui sont là aussi comme oubliés" évoquant "celles et ceux, souvent les femmes, qui ont mis entre parenthèses ou sacrifié leur vie professionnelle pour s'occuper d'un enfant en situation de handicap, d'un proche, une personne de la famille devenue dépendante".

"Nous devons les reconnaître, les nommer, mais aussi dans nos politiques publiques leur bâtir une place pendant la réforme des retraites et leur construire des droits", a poursuivi Emmanuel Macron.

Macron revient sur la sous-indexation des retraites

Le président de la République Emmanuel Macron a annoncé jeudi que les retraites "de moins de 2.000 euros" seront réindexées sur l'inflation en 2020, mesure attendue, mais aussi qu'aucune pension n'augmentera moins vite que les prix à partir de 2021.

"Je souhaite que nous réindexions les retraites de moins de 2.000 euros et qu'il n'y ait plus de sous-indexation de quelque retraite que ce soit à partir de l'année 2021", a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse organisée à l'issue du grand débat national.

Mettre fin aux "grands corps" de la fonction publique

Le président Emmanuel Macron souhaitait mettre fin aux systèmes des "grands corps" de la haute fonction publique, dont les membres sont actuellement selon lui "garantis d'une protection à vie".

"On doit (...) mettre à l'épreuve les jeunes hauts fonctionnaires. Ils ne peuvent pas tout de suite accéder aux postes suprêmes et être garantis de ne jamais les quitter. Je souhaite que nous mettions fin aux grands corps", a dit le chef de l'État devant la presse à l'Élysée, sans évoquer la suppression de l'ENA, une "rumeur" selon lui.

Réduction des impôts et maintien de la suppression de l'ISF

Emmanuel Macron, tout en défendant la suppression de l'ISF, a annoncé son intention de réduire "significativement" l'impôt sur le revenu, une mesure financée "en travaillant davantage", en supprimant "certaines niches fiscales" pour les entreprises et en réduisant la dépense publique.

"Je ne veux pas de hausse d'impôts et je veux des baisses pour ceux qui travaillent en réduisant significativement l'impôt sur le revenu", a-t-il affirmé lors de sa conférence de presse organisée à l'issue du grand débat national pour répondre à la crise des "gilets jaunes".

"J'ai demandé au gouvernement de mettre en oeuvre cette baisse d'impôt en la finançant par la suppression de certaines niches fiscales pour les entreprises, la nécessité de travailler davantage et des réductions de notre dépense publique", a-t-il ajouté.

Une baisse des impôts financée en travaillant "davantage"

Le président de la République n'a pas précisé s'il envisageait de supprimer un jour férié supplémentaire pour financer cette baisse d'impôts.

"Il me semble que la meilleure orientation pour répondre aux besoins de justice fiscale n'est pas d'augmenter les impôts de tel ou tel, mais plutôt de baisser les impôts pour un maximum de nos concitoyens, en particulier pour celles et ceux qui travaillent", a-t-il affirmé, en se référant spécifiquement aux classes moyennes.

Emmanuel Macron a également défendu la suppression de l'Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) dès le début de son quinquennat, une mesure souvent critiquée lors du grand débat et lors des manifestations des gilets jaunes.

À ses yeux, il s'agit d'une "réforme pour produire, pas une réforme pour les plus fortunés". Il a toutefois souligné que la suppression de l'ISF serait "évaluée en 2020". "Nous regarderons son efficacité. Si elle n'est pas efficace, nous la corrigerons", a-t-il assuré.

Macron prêt à "abandonner" l'objectif de 120.000 suppressions de postes

Emmanuel Macron s'est dit prêt à "abandonner" l'objectif de 120.000 suppressions de postes de fonctionnaires qu'il avait fixé "si ce n'est pas tenable", demandant au gouvernement de lui "donner son analyse d'ici l'été".

"Quand on doit réinvestir dans la sécurité, dans l'éducation et dans la justice, je ne vais pas donner des injonctions contradictoires au gouvernement", a déclaré le chef de l'État lors d'une conférence de presse, ajoutant qu'il assumerait "totalement si ce n'est pas tenable d'abandonner cet objectif".

"Travailler plus" : Macron évoque un allongement
de la durée de cotisation

Emmanuel Macron a estimé que travailler plus ne pouvait pas passer par la suppression d'un jour férié ou un recul de l'âge légal de départ à la retraite, tout en relevant qu'on peut "laisser le libre choix" en ce qui concerne l'allongement de la durée de cotisation.

"Ce sur quoi peut travailler le gouvernement avec le Parlement, c'est de regarder si on peut allonger la période de référence sans bouger l'âge légal pour avoir un système de décote qui incite à travailler davantage, mais sans forcer tout le monde", a-t-il dit lors d'une conférence de presse à l'issue du grand débat national.