La démission de Sylvie Goulard, un problème pour le MoDem

Par Florence Autret  |   |  768  mots
Sylvie Goulard.
La ministre des Armées qui a démissionné pour répondre du soupçon d'emploi fictif d'un assistant consomme la rupture avec le MoDem qui lui a donné deux investitures de député européen, mais avec lequel elle n'a jamais été en phase.

La démission du gouvernement de Sylvie Goulard dans le cadre de l'enquête sur des assistants parlementaires fictifs du MoDem a jeté un froid à Bruxelles. La ministre des Armées était un des symboles, plus encore un des gages, de la relance de l'intégration européenne par Paris et Berlin voulue par le président Macron. C'est aussi une source d'embarras pour le parti du garde des Sceaux François Bayrou.

Une personnalité respectée

Classée par le site Politico, avant sa nomination dans le gouvernement d'Edouard Philippe, comme l'une des personnes les plus influentes sur la place de Bruxelles, elle y a laissé le souvenir d'une députée extrêmement investie dans ses dossiers de membre de la commission des Affaires économiques et monétaires, tout en continuant à publier régulièrement des essais aux tonalités fédéralistes. Elle se présentait volontiers comme plus Européenne que Française.

A Bruxelles, elle employait comme assistants accrédités (basés à Bruxelles) un Belge et une Britannique. Son assistant en circonscription, Stéphane Thérou, collaborateur de longue date du MoDem et proche de François Bayrou (dont il a été membre de cabinet au ministère de l'Education), sur l'emploi duquel porte l'enquête en cours, lui avait été vivement recommandé par le général Morillon, député européen sortant en 2009.

« Peut-être qu'elle est sincère (en affirmant démissionner pour pouvoir se défendre), mais cela a des effets collatéraux énormes. Cela met une pression énorme sur Marielle (de Sarnez) et (François) Bayrou », soulignait mardi une source européenne.

Selon nos informations, l'accord avec le parti noué en 2009 prévoyait que son collaborateur en France consacre les trois quarts de son temps aux relations entre la toute nouvelle députée européenne MoDem et ses électeurs, le quart restant devait être consacré à l'Institut de formation démocrate, une succursale du Modem. Elle était alors élue dans la grande circonscription de l'Ouest (en 2014 elle le sera à nouveau dans le Sud-Est), lui basé à Paris où il traitait les demandes de rendez-vous, d'information, d'intervention adressées à la députée.

Stéphane Thérou, dont le nom n'est pas mentionné parmi les collaborateurs de Sylvie Goulard sur son site, a quitté son emploi d'assistant début 2016, pour devenir le directeur de cabinet de François Bayrou à la mairie de Pau, et préparer l'échéance présidentielle.

« Si l'enquête judiciaire porte sur le parti, çà ira car elle n'y avait pas de responsabilité. Si c'est ad nominem, ce sera plus compliqué », estimait mardi une source européenne.

« Jamais vraiment membre du MoDem »

Les relations de l'ex-ministre avec le président du MoDem étaient notoirement froides et ses relations avec le parti, pour le moins, distantes, notamment depuis l'altercation, en 2009, entre François Bayrou et Daniel Cohn-Bendit, respectivement candidats du Modem et des Verts, lors d'un débat télévisé avant les élections européennes. Elle ne partageait pas non plus les positions du maire de Pau aux connotations souverainistes. Appeler à « acheter français » lui semblait totalement incompatible avec la préservation du marché unique, socle de l'intégration européenne.

Elle n'appartenait pas aux instances de direction d'une organisation dominée de longue date par le tandem Bayrou-de Sarnez. En 2014, elle avait obtenu une nouvelle investiture à la force du poignet. Forte de sa crédibilité sur les sujets financiers et inlassable chroniqueuse et conférencière en Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni, Sylvie Goulard était devenue une des rares « vitrines » du parti de François Bayrou, indique une source européenne.

"Elle n'a jamais été vraiment député Modem", tranche celle-ci.

Ses communiqués de presse, tout comme les quatrièmes de couverture de ses essais, ne mentionnent pas le parti français, mais uniquement, à l'occasion, son appartenance à l'Alliance des Libéraux et Démocrates Européens (ALDE), qui forme un groupe parlementaire charnière au Parlement européen.

Une autre poste plus opérationnel ?

Son arrivée au ministère des Armées avait été une surprise, en raison de son inexpérience en matière de défense. D'aucun estime qu'elle pourrait aspirer à l'avenir à une position plus opérationnelle au moment où les planètes semblent prêtes à s'aligner à nouveau entre Paris et Berlin.

« Elle aime le concret, pas l'apparat. Si vraiment il y a une relance européenne franco-allemande, c'est la personne idoine pour négocier avec Berlin », estime cette source.

Reste à savoir s'il lui sera proposé un autre poste dans le « dispositif » Macron et si elle l'acceptera.

(mis à jour à 21h25)