La France marche sur des oeufs pour éviter un troisième confinement

Par latribune.fr (avec AFP)  |   |  933  mots
(Crédits : GONZALO FUENTES)
Chaque jour compte pour tenter d'éviter un nouveau confinement, mais chaque jour pourrait aussi en rapprocher la France un peu plus, a martelé le gouvernement dimanche, à l'aube d'une semaine où les indicateurs de l'épidémie de Covid-19 seront scrutés de près.

En n'annonçant pas le troisième confinement, vendredi, le Premier ministre Jean Castex a-t-il reculé pour mieux sauter ? "L'idée, c'est de gagner du temps, de limiter la casse", a déclaré le ministre de la Santé Olivier Véran au JDD, ce dimanche. Autrement dit : le confinement est loin d'être abandonné, et les indicateurs épidémiques de cette semaine seront scrutés à la loupe. S'ils s'aggravent, le confinement deviendra inévitable.

"Le moindre mois, la moindre semaine, le moindre jour de confinement qu'on peut éviter aux Français, il faut qu'on le prenne. On le doit à nos commerçants, à nos artisans, aux PME et aux Français, pour qui c'est extrêmement difficile depuis près d'un an", a renchéri le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, dimanche sur BFMTV.

"La légère décélération des contaminations peut nous permettre d'observer, durant quelques jours, ce qu'il va se passer", a poursuivi M. Véran, en détaillant ce qui a guidé le choix de ne pas (encore) reconfiner.

Lorsque la décision "a été prise vendredi en conseil de défense, l'incidence, c'est-à-dire le nombre de nouveaux cas quotidiens, avait peu augmenté depuis quatre jours. C'est encore le cas aujourd'hui".

Par ailleurs, la circulation du variant anglais "s'intensifie - de 50 % chaque semaine - mais de manière moins intense qu'à l'étranger où des hausses de 70 à 100 % ont été relevées", a ajouté M. Véran. Il se base sur les résultats préliminaires de la deuxième enquête flash sur les variants, qui ne sont pas encore publics. "Il y a un chemin pour éviter le confinement. Ce n'est pas une autoroute, mais c'est un chemin réel", a insisté M. Attal.

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Fenêtre des vacances

Le Conseil scientifique "a indiqué (...) que nous ne prenions pas de risque à prendre une semaine pour bien observer ce qu'il se passait". "Mais si l'incidence repartait à la hausse, nous n'hésiterions pas. Nous n'avons jamais dit que nous ne reconfinerions pas dans les quinze jours à venir si c'était nécessaire", a conclu M. Véran.

Les indicateurs sont toujours à un niveau élevé et la maladie a fait plus de 75.000 morts en France. Actuellement, près de 27.000 malades du Covid sont hospitalisés, pas loin des pics de la première et de la deuxième vagues (32.000 et 33.000). Environ 3.000 sont en réanimation, moins que les pics des précédentes vagues (4.900 à l'automne, 7.000 au printemps).

Et la pression reste forte, puisque sur les sept derniers jours, on recense en moyenne 20.000 nouvelles contaminations quotidiennes. Face à ces chiffres, les experts sont partagés et reconnaissent qu'un confinement se décide selon plusieurs critères: sanitaire d'un côté, économique et social de l'autre.

En tant que médecin, "je pense que s'il faut prendre des décisions de confinement difficiles, il faut les prendre tôt", a déclaré sur franceinfo Philippe Juvin, chef des urgences de l'hôpital Georges Pompidou et maire LR de La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine). "Maintenant, si vous demandez au citoyen ou homme politique que je suis, je comprends que le président de la République a pris sa décision car les Français ont un niveau d'acceptabilité du confinement qui est devenu limite", a-t-il ajouté.

"Le confinement reste très probable. La question, c'est: quand surviendra-t-il?", a commenté dans le JDD l'infectiologue Anne-Claude Crémieux, pour qui "la réflexion actuelle sur le niveau de restrictions à mettre en place est compréhensible".

Selon elle, le gouvernement pourrait "agir pendant les vacances scolaires, qui génèrent une diminution de l'activité et donc de la circulation du virus". Les vacances de février débuteront samedi pour les premières zones. Au total, elles s'étaleront sur quatre semaines dans les trois zones.

Bientôt trois vaccins

De son côté, le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a demandé de réfléchir à des confinements uniquement locaux. "Partout où il y a un risque de voir le variant anglais l'emporter rapidement dans tel ou tel département, pourquoi est-ce qu'on ne confine pas, quitte à ce que les départements alentours ne le soient pas?", a plaidé M. Faure, invité d'Europe 1 - Les Echos - CNews.

En attendant, la nouvelle mesure la plus visible est la fermeture des centres commerciaux non-alimentaires de plus de 20.000 m2. Près de 400 centres ou magasins sont concernés. En outre, les frontières avec les pays hors Union européenne sont désormais fermées, "sauf motif impérieux", et pour revenir d'un pays de l'UE, un test PCR négatif est exigé (sauf pour les travailleurs transfrontaliers).

Enfin, dans cette course contre la montre, la France poursuit sa campagne de vaccination. Près de 1,48 million de personnes ont reçu au moins une dose de vaccin, dont 41.000 qui en ont eu deux.

On constate toutefois un ralentissement, attribué aux difficultés d'approvisionnement. "Je regrette que près de 50.000 rendez-vous aient dû être reportés", a admis M. Véran. Selon lui, la Haute autorité de santé (HAS) se prononcera mardi sur le vaccin d'AstraZeneca, approuvé au niveau européen vendredi.

Il ne fait aucun doute qu'il va devenir le troisième autorisé en France, mais il n'est pas certain qu'il sera recommandé aux plus âgés. Les instances spécialisées allemande et italienne l'ont déconseillé pour ces populations, par manque de données sur son efficacité, prenant ainsi le contre-pied de l'Agence européenne des médicaments (EMA).