La France va-t-elle mieux, comme l'annonce François Hollande ?

Par Fabien Piliu  |   |  782  mots
" Oui, ça va mieux. Nous sommes aujourd'hui sur un rythme de création nette d'emploi ", a déclaré jeudi soir François Hollande, tablant sur 160.000 emplois nets supplémentaires en 2016.
Lors de son entretien télévisé, le chef de l'Etat a indiqué que la France allait mieux. Que nous disent les indicateurs macroéconomiques ?

Lors de son entretien télévisé sur France 2, François Hollande a assuré que la France allait "mieux". Est-il optimiste ? Y croit-il vraiment ? Le chef de l'Etat est insondable. De toute façon, sa fonction lui impose une posture volontariste.

" Oui, ça va mieux : il y a plus de croissance, moins de déficit, moins d'impôts, plus de compétitivité, plus de marges pour les entreprises, plus de pouvoir d'achat pour les salariés", a-t-il déclaré, précisant toutefois que la France ne va pas forcément bien mais " mieux ". Même sur le front de l'emploi, le chef de l'Etat est optimiste tablant sur 160.000 emplois nets supplémentaires en 2016. Soit 60.000 de plus qu'en 2015. A priori, le taux de chômage de la population active ne repasserait donc pas au-dessus la barre des 10 %, barre au-dessous de laquelle il s'est établi au premier semestre selon l'Insee. Mais au regard du nombre actuel de chômeurs, c'est une bien maigre consolation. En effet, plus de six millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi.

Une reprise poussive

A-t-il raison d'être optimiste ? Que nous enseignent les récents indicateurs macroéconomiques ?

Pour l'instant, le gouvernement vise une croissance de 1,5 % cette année. C'est mieux qu'en 2015 et qu'au cours des années précédentes. Indéniablement, la reprise est en marche mais elle est poussive. Et elle est fragile. Le Fonds monétaire internationale a annoncé mercredi que le PIB tricolore ne progresserait que de 1,1 % cette année. La Commission européenne table sur une croissance annuelle de 1,3 %. Les économistes de l'OFCE envisagent une hausse de 1,6 % de l'activité cette année. Mais rares sont leurs confrères qui sont sur la même longueur d'ondes.

Peut-on en déduire que l'économie française se porte mieux ? Comme le précise l'Insee, l'indicateur de retournement pour l'ensemble de l'économie est passé en mars dans la zone indiquant une conjoncture incertaine.

Par ailleurs, son modèle de croissance reste bancal. Si la consommation recule, les espoirs de reprise vigoureuse seront douchés. Or, la résilience de la consommation - l'indicateur mesurant la confiance des ménages de l'Insee, reste inférieure à sa moyenne de longue période - puise en grande partie ses origines dans la chute des cours du pétrole. Il ne faudrait pas que ceux-ci remontent. L'investissement, et encore moins le commerce extérieur, n'étant en mesure de prendre le relais.

Un niveau de défaillances toujours très élevé

En effet, l'investissement des ménages reste faible, ce qui explique les déboires de la construction. Quant à celui des entreprises, il s'éveille à peine, après plusieurs années d'atonie, en dépit de la remontée du taux de marge des entreprises. Par ailleurs, en dépit des gains de compétitivité offerts par la chute des cours du pétrole et les allégements de cotisations contenus dans le Pacte de responsabilité, qui s'ajoutent au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), le taux de couverture import/export reste défavorable. La France continue à importer plus qu'elle n'exporte.

L'industrie retrouve en effet des couleurs, mais celles-ci sont encore bien pâles. Certes, la production manufacturière affiche une hausse annuelle de 1,5 % en février, mais cette moyenne masque les profondes difficultés de certains secteurs, ce qui explique que la production industrielle n'a progressé que de 0,6 % sur cette période. C'est particulièrement le cas du secteur de la construction dont la production en février 2016 est inférieure de 16,9 points à celle observée en moyenne en 2010 et la cokéfaction et le raffinage, impactés par la chute des cours du brut (-16,1 points). C'est également le cas du bois-papier-imprimerie (-12,9 points), des équipements électriques (-11,8 points), des industries extractives (-8,1 points) et la métallurgie et produits métalliques (-4,2 points).

Par ailleurs, il faut rappeler que la sinistralité des entreprises reste élevée. En 2015, les défaillances d'entreprises ont augmenté de 1 % pour s'élever à 63.081 selon le cabinet Deloitte.

La France va mieux ? Si tel est le cas, ce retournement se fait à crédit, sur le dos des générations futures. En effet, comme le précise le gouvernement dans le Pacte de stabilité qu'il présente à Bruxelles, la dette publique de la France devrait continuer à augmenter en 2016 et 2017. En effet, selon les prévisions de Bercy, elle atteindra 96,2 % du PIB en 2016 et 96,5 % en 2017, contre respectivement 96,5 % et 96,9 % selon les précédentes estimations. Il ne faudrait pas que France ne tienne pas sa promesse de réduction du déficit public. Pour l'instant, le ministère des Finances prévoit toujours 3,3 % du PIB en 2016 et 2,7 % en 2017.