Le décret sur la réforme contestée de l'assurance chômage publié au JO

Par AFP  |   |  759  mots
(Crédits : Eric Gaillard)
Le ministère du Travail a publié dimanche au Journal officiel le décret mettant en oeuvre la réforme vaste et controversée de l'assurance chômage annoncée le 18 juin. Ce texte de six articles comprend surtout une annexe de 190 pages qui constitue le nouveau règlement de l'assurance chômage.

>> Article du 28/07/2019 - 11:48 | mise à jour 29/07/2019 - 16:45

Comme annoncé, ce règlement modifie la durée minimale de travail exigée pour ouvrir des droits au chômage. A partir du 1er novembre, il faudra avoir travaillé "130 jours ou 910 heures", soit six mois, sur les 24 derniers mois au lieu de quatre mois sur les 28. Le seuil permettant un rechargement des droits sera également de six mois contre un aujourd'hui comme le précise le décret publié au Journal officiel.

Le règlement modifie également à partir du 1er avril 2020 les règles de calcul de l'allocation des personnes ayant travaillé de manière discontinue "afin de mieux prendre en compte la moyenne des rémunérations antérieures perçues sur la période de référence". Les salariés qui avaient un revenu du travail supérieur à 4.500 euros brut par mois verront leur indemnisation réduite, au début du 7e mois d'indemnisation, de 30%, avec un plancher à 2.261 euros net. Les salariés âgés de 57 ans ou plus ne seront pas concernés par la mesure.

Bonus-malus sur les contrats-courts

Le règlement met également en place la modulation ("bonus-malus") des contributions chômage patronales des entreprises "pour celles relevant d'un secteur d'activité à taux de séparation très élevés", c'est-à-dire recourant beaucoup à l'intérim et aux contrats courts. Le décret prévoit aussi une augmentation de la contribution de l'Unédic au budget de Pôle emploi pour financer les 350 millions d'euros d'accompagnement renforcé pour les chômeurs annoncés par le gouvernement.

Le ministère a publié un autre décret sur l'ouverture de l'assurance chômage aux démissionnaires ayant un projet professionnel ainsi que sur l'expérimentation prévue dans deux régions (Bourgogne-Franche-Comté et Centre-Val de Loire) "d'un journal de la recherche d'emploi" tenu par les chômeurs.

Bonus-malus, le mode d'emploi

Le bonus et le malus s'équilibreront au sein de chaque secteur, ce qui fait que le nombre d'entreprises gagnantes sera supérieur à celui des perdantes, les grandes entreprises, moins nombreuses, étant davantage consommatrices d'intérim et de CDD. L'objectif est d'inciter les entreprises qui abusent des contrats de quelques jours, voire quelques heures, à allonger la durée de ces contrats.

Pour ces entreprises, on calculera en 2020 leur taux de séparation: le nombre de séparations imputées à l'entreprise divisé par son effectif. Ces séparations englobent toutes les fins de contrats - CDI, CDD ou intérim - donnant lieu à inscription ou maintien à Pôle emploi à quelques exceptions près (démissions, fins de contrat d'apprentissage, de professionnalisation et d'insertion). Ce taux de séparation sera comparé au taux médian du secteur 2019-2020. En fonction de cette comparaison, l'entreprise verra en 2021 sa cotisation varier entre 3 et 5% de sa masse salariale contre un taux de 4,05% aujourd'hui.

Au grand regret des syndicats, l'exécutif a choisi de limiter ce bonus-malus à sept secteurs sur les 38 définis par l'Insee. Ils ont été choisis parce que leur taux de séparation médian 2016-2018 était supérieur à 150%, c'est-à-dire qu'il y avait plus de 3 contrats courts pour 2 CDI. Selon Pôle emploi, le secteur "fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac" est celui qui a le plus fort taux de rupture (326%).

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Le gouvernement justifie ce choix d'un taux de 150% en raison de l'écart entre les 176% du secteur classé 7 (travail du bois, papier et imprimerie) et les 136% du classé 8 (activités de services administratifs et de soutien). Mais ce seuil exclut de gros secteurs comme la construction (127%) ou l'hébergement médico-social (116%). Autre restriction importante: le bonus-malus ne s'appliquera qu'aux entreprises de plus de 11 salariés.

S'il fait partie des sept secteurs concernés, l'hébergement-restauration compte ainsi plus de 100.000 entreprises de moins de 11 salariés contre 18.000 de plus de 11.

Selon l'exécutif, sur l'ensemble de l'économie, 37% des fins de contrat des entreprises de plus de 11 salariés seront couvertes par le bonus-malus.

Le gouvernement prévoit aussi, dans le projet de loi de finances 2020, de faire adopter une taxe de 10 euros sur chaque "CDD d'usage". Ces CDD très flexibles (pas de limitation de durée, de renouvellement ni prime de précarité) et souvent très courts (une journée ou moins) se sont développés de manière anarchique. Les employeurs d'intermittents du spectacle ne seront toutefois pas concernés par cette mesure mais conserveront la cotisation patronale supplémentaire de 0,5% introduite en 2017.