Le gouvernement se prononce sur l'avenir du RSI

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  957  mots
Artisans et commerçants ont dénoncé la gestion de leur régime de protection sociale (RSI). Le gouvernement va prendre des mesures
Manuel Valls reçoit ce lundi soir les conclusions d'un rapport commandé à deux députés sur le fonctionnement du Régime social des indépendants (RSI). Selon nos informations, le rapport devrait suggérer la mise en place de"l'auto déclaration" des cotisations RSI ainsi que l’application d'un "rescrit RSI"

Ça commence à aller mieux mais il reste beaucoup de travail. C'est, en substance, le ton du rapport sur le Régime social des indépendants (RSI) qui sera remis ce soir au premier ministre. Ce rapport d'étape qui comprend une trentaine de propositions émane des deux députés PS Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier qui avaient été chargés de cette mission après l'importante manifestation anti RSI organisée en mars.
Il faut dire que le RSI rend fou un certain nombre d'artisans ou de commerçants : erreurs de calcul des cotisations, retard de paiement, harcèlement administratif, impossibilité de joindre un correspondant...
Depuis sa création en 2006, le RSI est accusé de tous les maux. Surtout depuis 2008, quand il est devenu l'Interlocuteur social unique (ISU) pour la protection sociale des artisans, industriels et commerçants - même si ce sont les Urssaf qui assurent le recouvrement de l'ensemble des cotisations sociales.

De multiples dysfonctionnements

C'est d'ailleurs à la suite du rapprochement entre le RSI et les Urssaf que s'est produit en 2008 un gigantesque bug informatique - les deux systèmes étaient incompatibles ! - qui s'est soldé par l'écrasement de millions de données.
Résultat, pendant des années, les quelque 6,1 millions de chefs d'entreprise indépendants et leurs ayants droit affiliés se sont arrachés les cheveux devant la somme d'erreurs. Aussi, plusieurs organisations patronales comme la CGPME ou les artisans de l'UPA ont interpellé le gouvernement sur cette question, lui demandant de remettre de l'ordre dans le système.
Au Parlement également, l'opposition - Bruno Le Maire, député « Les Républicains » de l'Eure, en tête - s'était saisie du sujet et avait demandé l'ouverture d'une mission d'information sur le RSI. Preuve également que la question commence à sérieusement inquiéter le gouvernement, le secrétaire d'État au Budget, Christian Eckert, et la secrétaire d'État chargée du Commerce, Carole Delga, s'étaient rendus ce 4 mars à Nantes pour rencontrer agents et usagers du RSI.
A cet égard, dans un entretien au Figaro, Carole Delga avait mis en garde contre les travailleurs indépendants tentés de se désaffilier du RSI, pourtant obligatoire:


"C'est parfaitement illégal et passible de sanctions pénales (...). Le phénomène reste très limité: 769 assurés au 31 décembre 2014 ont engagé une démarche de désaffiliation (...). Le RSI est un régime obligatoire de sécurité sociale. Le gouvernement se réserve la possibilité de mener des actions en justice contre ceux qui propagent l'idée contraire."

Une allusion à ceux qui prônent une "désaffiliation sauvage" au profit de systèmes privés de de protection sociale installés dans d'autres pays européens. Mais d'autres indépendants se débrouillent aussi pour (re)devenir salarié de leur propre entreprise pour ne plus avoir à traiter avec le RSI... Quitte à cotiser davantage.
Il fallait donc réagir devant la montée de ce mécontentement. Déjà, Carole Delga avait pris des dispositions en début d'année. Ainsi, depuis le 1er janvier, le système a évolué. Les cotisations sont désormais calculées sur la base des revenus déclarés l'année précédente (et non plus N-2).

Nommination de médiateurs RSI


Le rapport Bulteau/Verdier constate d'ailleurs que l'amélioration du fonctionnement des organisations du RSI est réelle et encore en marche, bien qu'elle ne se traduise pas "encore par une amélioration suffisante de la relation avec les usagers ". Le rapport souligne aussi que les mesures d'amélioration "ont encore trop récentes pour que leur impact soit perceptible". Par exemple, la simplification de l'appel à cotisation a réellement débutée début mai et les équipes mixtes RSI/Urssaf ne sont « pas encore totalement déployées ».

Ainsi, il reste encore beaucoup à faire car « des insuffisances demeurent qui pénalisent la qualité du service ». Notamment, demeurent des « anomalies persistantes » sur l'appel de cotisation et le recouvrement. Des « sujets majeurs de mécontentement des assurés »... C'est le moins que l'on puisse dire.
Pour améliorer le RSI, le rapport préconise notamment de « mettre en place des groupes de travail RSI/usagers pour améliorer la lisibilité des courriers », de créer des "médiateurs indépendants", de « supprimer l'automaticité des envois de courriers en recommandé », « avoir un contact préalable avant tout envoi de contrainte ou d'huissier », « mettre en place au moins un point d'accueil physique dans chaque département », « assurer la traçabilité des appels » d'assurés avant fin 2015 et « rappeler les numéros qui ont appelé trois fois » sans obtenir d'interlocuteur.

Vers l'auto déclaration?

Selon nos informations, le rapport pourrait même aller en plus loin - mais ces questions ne sont pas encore totalement tranchées - en suggérant d'instituer  un "rescrit RSI" qui permettrait de considérer qu'au-delà d'un certain délai, l'absence de réponse à un courrier d'un cotisant envoyé avec accusé de réception équivaudra à une réponse positive. De même, il pourrait aussi proposer le principe de l'auto déclaration: l'indépendant verserait un acompte de cotisations puis solderait le reste dû en fin d'année s'il y a lieu.
Des préconisations qui rejoignent en partie des recommandations émises par la CGPME.
Reste à savoir ce que va faire Manuel Valls. Il devrait annoncer ses intentions sur l'avenir du RSI demain mardi 9 juin, à l'issue du conseil restreint de ministres qui va plancher sur les mesures à prendre pour encourager l'emploi dans les PME et les TPE. On saura si le RSI reste autonome, s'il est fusionné dans le régime général ou bien encore s'il se rapprochera administrativement de la Mutualité sociale agricole (MSA)