Le ministre du Travail veut durcir l'accès à l'indemnisation du chômage en cas d'abandon de poste

Par latribune.fr  |   |  945  mots
Il n'existe pas de statistiques sur ces abandons de postes mais les députés LR assurent dans leur amendement que « c'est un phénomène de plus en palpable par les milieux professionnels ».
Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, s'est dit ouvert à durcir l'accès à l'indemnisation du chômage dans le cas « d'un abandon de poste », quand un salarié ne vient plus travailler sans justification et finit par être licencié par son employeur ». Le gouvernement veut ainsi travailler à « lutter contre les tensions de recrutement ».

Un licenciement pour abandon de poste constitue un licenciement pour faute et ne prive donc pas aujourd'hui le licencié de son droit à bénéficier de l'assurance chômage, bien que l'abandon de poste soit volontaire. « Il y a une faille : un salarié qui procède à un abandon de poste a accès à des conditions d'indemnisation plus favorables qu'un salarié qui démissionne », a relevé, Olivier Dussopt, ministre du Travail devant le ministre devant la commission des Affaires sociales de l'Assemblée qui examine son projet de loi sur l'assurance chômage. « Nous sommes ouverts à ce que ces conditions soient alignées », a-t-il ajouté, alors qu'un amendement LR a été déposé dans ce sens, tout en veillant « à ce que les salariés qui abandonnent leur poste pour des raisons de sécurité ne soient pas pénalisés ».

Pas de statistiques sur les abandons de poste

Il n'existe pas de statistiques sur ces abandons de postes mais les députés LR assurent dans leur amendement que « c'est un phénomène de plus en palpable par les milieux professionnels ». Ils argumentent : « Le salarié qui veut quitter son emploi pour se retirer du marché du travail tout en ayant pour objectif de conserver un revenu ne va pas démissionner mais simplement ne plus revenir au travail afin que l'employeur, de guerre lasse, procède à son licenciement. Et, alors que le démissionnaire est tenu par un préavis qui permet à l'employeur de s'organiser, l'employé fantôme, en abandonnant son poste du jour au lendemain, perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise ».

Pour lutter contre les tensions de recrutement, le ministre s'est en revanche montré plus réservé sur la volonté de certains députés de durcir l'accès au chômage pour un CDD refusant un CDI. Olivier Dussopt a rappelé que lorsqu'un salarié refuse un CDI proposé dans les mêmes conditions que son CDD, alors la prime de précarité de 10% n'est pas due par l'employeur, une disposition méconnue selon lui.

On rappelle que l'assurance chômage est en principe réservée aux personnes qui sont privées involontairement d'emploi. Pour les démissionnaires, il y a quelques exceptions limitées. Parmi elles, le fait de suivre un conjoint a concerné 14.000 cas en 2021 selon l'Unédic. Depuis 2019, la possibilité est également ouverte une fois tous les 5 ans à ceux qui ont un projet professionnel (12.000 cas en 2021).

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ZOOM - Moduler l'indemnisation selon la conjoncture, un cap fixé par Emmanuel Macron

L'exécutif souhaite moduler les conditions de l'assurance chômage selon la situation du marché du travail, à l'image de ce qui se fait par exemple au Canada. « Quand ça va bien, on durcit les règles et, quand ça va mal, on les assouplit », résumait, début septembre, le ministre du Travail Olivier Dussopt. Il reprenait là le cap fixé par Emmanuel Macron : une assurance chômage « plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé ». Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, répondait alors qu'il ne « tomberait pas dans ce piège » d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage pour moduler l'indemnisation selon la conjoncture, accusant l'exécutif de vouloir « appuyer sur la tête des demandeurs d'emploi ».

 Olivier Dussopt a par ailleurs écarté la réduction du montant de l'allocation mensuelle, car « il y aurait une forme de contradiction » alors que « nous sommes dans une période de défense du pouvoir d'achat ». En revanche, on peut « agir sur la durée maximale d'indemnisation, qui est aujourd'hui de 24 mois, et sur les conditions pour être éligible ». Ainsi, « aujourd'hui, il faut avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers. Est-ce que ce sera 7 ou 8 mois ou est-ce que ce sera 6 mois sur 18 au lieu de 24 ? », s'interrogeait-il début septembre.

Les demandeurs d'emploi alternant chômage et activité pénalisés par la dernière réforme

Selon des données de l'Unédic, on dénombrait 6,5 millions de personnes inscrites à Pôle emploi en décembre 2021, mais seulement 2,6 millions (40%) d'entre elles étaient indemnisées. L'organisme qui gère le régime d'assurance chômage prévoit qu'elles seront 2,4 millions fin 2022. Le montant net moyen d'indemnisation est de 960 euros pour l'ensemble des indemnisés (1.070 euros pour les allocataires qui ne travaillent pas et 720 euros pour ceux qui travaillent et complètent ainsi leur revenu). Les allocataires consomment en moyenne 68% de leurs droits.

Avec la dernière réforme, depuis le 1er octobre 2021, le calcul du salaire journalier de référence (SJR), base de l'allocation chômage, a été modifié. Il prend en compte à la fois les jours travaillés et les jours non travaillés durant les 24 mois précédant le chômage (avec un plancher garantissant une allocation minimale). Cela pénalise les demandeurs d'emploi alternant chômage et activité, les « permittents ». L'indemnisation était auparavant calculée en divisant les revenus par les seuls jours travaillés pendant la période de référence.

Pour ouvrir des droits, il faut aussi, depuis le 1er décembre, avoir travaillé six mois (soit 130 jours travaillés ou 910 heures) au cours des 24 derniers mois (36 mois pour les plus de 53 ans). Auparavant, il fallait avoir travaillé 4 mois. Pour les chômeurs de moins de 57 ans ayant perçu une rémunération supérieure à 4.500 euros brut, une dégressivité de -30% des allocations s'applique à partir du 7e mois.

Enfin, un assouplissement des conditions d'ouverture des droits à l'allocation chômage des travailleurs indépendants est entré en vigueur en mai dernier, via la suppression de l'obligation de se retrouver en situation de liquidation judiciaire pour y prétendre.

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