Macron fut-il un bon ministre de l'Economie ?

Par Fabien Piliu  |   |  812  mots
Le passage d'Emmanuel Macron à Bercy a-t-il été un succès ?
Le ministre de l'Economie sera resté deux ans à Bercy. Quel est son bilan ? La loi sur la croissance, l'activité et l'égalité des chances reste son seul fait d'armes.

Emmanuel Macron fut-il un grand ministre de l'Economie ? La question taraude ceux qui suivent avec intérêt, ou avec regret, son parcours. Incarnation du virage libéral pris par François Hollande pour tenter de sortir l'économie française de la crise à coup de réformes structurelles, Emmanuel Macron, présente un maigre bilan. Pendant son passage,  le PIB a certes progressé mais pas assez pour faire reculer le nombre de demandeurs d'emplois. Pire, il a augmenté. Comment expliquer cette performance ?

Un passage rapide

D'une part, son passage fut assez court, ce qui permet de rappeler que l'Economie est un ministère très agité. A l'exception de Christine Lagarde, qui resta quatre années à Bercy avant de rallier Washington et le Fonds monétaire international (FMI), les ministres de l'Economie ne sont jamais restés très longtemps. Depuis 2012, Pierre Moscovici, également ministre des Finances, Arnaud Motebourg puis Emmanuel Macron ont occupé ce poste. Michel Sapin est le quatrième de cette longue liste. A titre de comparaison, Sigmar Gabriel, le ministre de l'Economie allemand est en fonction depuis décembre 2013. Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances est en poste depuis octobre 2009...

Nommé en août 2014 par le président de la République, Emmanuel Macron est donc resté deux ans à Bercy. Compte tenu des délais pour transformer des idées de réformes en avant-projet de loi, de rédiger ces textes, de les faire amender puis voter par le Parlement, ses initiatives marquantes sont peu nombreuses, même s'il a pris soin d'animer quotidiennement ou presque l'actualité.

La loi Macron, son seul fait d'armes

La plus célèbre ? Assurément, la loi sur la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi Macron, qui illustre parfaitement ce que d'aucun considèrent comme de l'inertie. Il aura en effet fallu huit mois au ministre de l'Economie pour faire adopter en août 2015 un texte qui ne ressemblait plus vraiment à l'original. Certaines mesures ont été supprimées. D'autres ont été ajoutées pour rendre le texte plus "socialiste", pour limiter la grogne des frondeurs. Résultat, après examen en commission spéciale, le texte ne comprenait  plus 106 mais 308 articles. A ces modifications se sont ajoutées celles provoquées par le vote d'une partie des 9.600 amendements déposés....

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Que dit ce texte, inspiré des travaux de la Commission Attali dont Emmanuel Macron fut le rapporteur général adjoint en 2007 ? Il instaure une extension du travail le dimanche, que les maires jugent limitée et complexe, une réforme des prud'hommes, et la liberté d'installation des notaires. Il libéralise également le transport par autocars qui aurait permis de créer 1.500 emplois et généré 21,5 millions d'euros de chiffre d'affaires, selon une étude présentée fin juin par l'autorité des transports routiers Arafer. Depuis l'entrée en vigueur de cette mesure, 4 millions de personnes auraient voyagé en autocar.

Quant à la réforme de la carte des notaires, pour sa part, elle pourrait entraîner l'installation de 1.650 notaires libéraux d'ici 2018, comme le précise l'Autorité de la concurrence). La réforme du permis de conduire devrait pour sa part se traduire par l'ouverture de 2.000 centres d'examen et une baisse de coûts pour les usagers.

Sur le plan macroéconomique, un rapport de l'OCDE remis à Bercy en septembre 2015 estimait  à 0,3 point de PIB supplémentaire sur cinq ans les conséquences possibles de cette loi. " Sa loi en faveur de la modernisation de l'économie aura  peu d'impact sur l'économie réelle, certaines mesures comme celles sur l'ouverture dominicale des commerces n'étant pas, c'est le moins que l'on puisse dire, synonyme de simplification ", commente la CGPME.

La loi Macron 2 ou le désaveu

Sur sa lancée, Emmanuel Macron avait pour ambition de réformer le code du travail. Après le départ de François Rebsamen, il a même tenté de rapatrier le ministère du Travail dans le giron de Bercy. Mais après les remous provoqués par la loi Macron, adopté grâce au 49.3 en raison des dissensions au sein de la majorité, et compte tenu des ses déclarations sur les 35 heures et sur le travail à vie des fonctionnaires, François Hollande a préféré jouer la carte de la prudence en nommant Myriam El-Khomri rue de Grenelle et en lui confiant la mission de simplifier le code du travail.

Avec ce texte, Emmanuel Macron ambitionnait également de moderniser  le financement de l'économie et la fiscalité du capital. Là encore, il a subi une déconvenue, certaines de ses mesures ayant été intégrées à la loi sur la transparence de la vie économique portée par Michel Sapin, alors ministre des Finances, désormais seul maître à bord du paquebot Bercy.