Michel Rocard est décédé

Par latribune.fr, avec AFP  |   |  907  mots
Michel Rocard était âgé de 85 ans.
Premier ministre de François Mitterrand de mai 1988 à mai 1991, il était âgé de 85 ans.

L'ancien premier ministre français Michel Rocard est décédé samedi à l'âge de 85 ans, a annoncé son fils Francis à l'AFP. Il avait été chef du gouvernement de François Mitterrand de mai 1988 à mai 1991.

Durant le premier septennat de M. Mitterrand, Michel Rocard avait également été ministre du plan et de l'aménagement du territoire (1981-1983) et ministre de l'agriculture (1983-1985). Il avait ensuite été premier secrétaire du parti socialiste français (PS) entre 1993 et 1994.

Il s'est éteint dans l'après-midi dans un hôpital parisien, a précisé son fils.

Michel Rocard était né à Courbevoie, près de Paris, le 23 août 1930 dans une famille de la bourgeoisie, catholique par son père - un des scientifiques à l'origine de la bombe atomique française -, protestant par sa mère.

Socialiste réformiste, Michel Rocard a été Premier ministre de 1988 à 1991 de François Mitterrand, avec lequel il a toujours eu des relations conflictuelles, avant de diriger le PS en 1993 et 1994.

Père de la "deuxième gauche", il entendait incarner une vision rénovée de la gauche, prenant en compte "les contraintes de l'économie mondialisée" sans "renoncer aux ambitions sociales".

En 2007, il a été victime d'une grave hémorragie cérébrale lors d'un voyage en Inde. Plus récemment, en mars 2012, en visite à Stockholm, il avait dû être hospitalisé cinq jours, après un malaise qui conduisirent les médecins suédois à résorber un caillot sur la partie droite du cerveau.

En début de semaine, M. Rocard, qui travaillait à la rédaction d'un livre-testament, avait reporté sa participation à l'émission "Questions d'info" LCP-Le Monde-France Info-AFP, programmée mercredi prochain. Il devait participer à celle du 13 juillet.

Dans un entretien la semaine dernière au Point, il fustigeait la gauche française, "la plus rétrograde d'Europe" à ses yeux, et jugeait que "les droits des citoyens ne se résument pas aux +acquis sociaux+" et que "le véritable socialisme, c'est l'accès pour tous aux activités de l'esprit".

De son passage chez les scouts, il reçoit un surnom qui le suivra toute sa vie: "Hamster érudit". Licencié ès lettres, diplômé de Sciences-Po et du Centre d'études des programmes économiques (CEPE), il sort en 1958 de l'Ecole nationale d'administration (ENA), où il côtoie Jacques Chirac, et rejoint l'Inspection des finances.

Des relations difficiles avec Mitterrand

Hostile à la guerre d'Algérie, il devient patron du PSU (Parti socialiste unifié) en 1967 qu'il dirige jusqu'en 1973 et qui sera un "laboratoire d'idées" pour la gauche. En mai 68, il s'oppose à la tendance "dure" du PSU et parvient à faire condamner le recours à la violence.

Il obtient 3,6% des suffrages à l'élection présidentielle de 1969 et devient député des Yvelines, puis maire (1977-94) de Conflans-Sainte-Honorine. Il sera réélu député plusieurs fois.

En 1980, il annonce sa candidature à la candidature du PS pour la présidentielle de 1981 mais doit s'effacer devant François Mitterrand. Une fois la gauche au pouvoir, il est nommé ministre d'Etat, ministre du Plan et de l'Aménagement du Territoire (1981-83), de l'Agriculture (1983) dont il démissionne en avril 1985, en pleine nuit, pour marquer son hostilité à la proportionnelle pour les législatives de 1986.

A Matignon en 1988, il pratique l'ouverture, ramène la paix en Nouvelle-Calédonie et instaure le RMI. En mai 1991, M. Mitterrand lui demande de démissionner. En 1993, il devient premier secrétaire du PS (jusqu'en 94). Mais, à nouveau, il ne parvient pas à se mettre en position favorable pour représenter le parti à la présidentielle de 1995.

Il a été ensuite parlementaire européen (1994-2009), sénateur socialiste des Yvelines (1995-97), ambassadeur chargé de la négociation internationale pour les pôles Arctique et Antarctique (depuis 2009), co-président (avec Alain Juppé) de la Commission sur le grand emprunt, sur décision du président Nicolas Sarkozy.

Michel Rocard avait eu quatre enfants de trois mariages.

François Hollande a rendu hommage à "un rêveur réaliste, un réformiste radical, animé par le mouvement des idées, le sort de la planète et de la destinée humaine". "Jusqu'à son dernier souffle, il a continué à avancer des idées et à proposer ses solutions. Jamais il n'exprimait une nostalgie ou un regret. Seul comptait l'avenir. Michel Rocard a réussi à être un homme d'Etat respecté, un intellectuel brillant et un militant fidèle à l'idéal pour lequel il avait très jeune décidé de consacrer sa vie", dit le chef de l'Etat dans un communiqué.

De son côté, Manuel Valls, issu lui-même du rocardisme et qui avait travaillé à Matignon auprès de M. Rocard, a salué sur France 2 "un mentor",  "qui a apporté de la rigueur dans les idées", "l'homme du parler-vrai", qui incarnait "la morale, la droiture en politique", pour qui "le changement dans ce pays devait passer par des réformes et non par la rupture." "Il me manque déjà beaucoup. Toute la gauche qui gouverne doit se sentir héritière de Michel Rocard", a ajouté le Premier ministre.

"Précurseur et militant, il aura changé le visage de la gauche, réconcilié l'Etat avec la société civile, et repensé l'économie sociale de marché. (...) Européen passionné, il aura pour elle mené nombre de batailles. (...) Il va manquer au pays. Il va manquer aux engagés. Ses idées doivent lui survivre et être servies", a réagi le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, dans un communiqué.