Pass sanitaire : les chefs d'entreprise face à des dilemmes, le gouvernement fixe "une semaine de rodage"

Par latribune.fr  |   |  895  mots
Le pass sanitaire fera bien son entrée en vigueur officielle dans les restaurants, bars, salons professionnels, foires, les hôpitaux, les trains et cars longue distance et vols intérieurs, jusqu'au 15 novembre. (Crédits : MAXIM SHEMETOV)
Les professionnels sont-ils prêts à mettre en place dès lundi l'obligation de présentation du pass sanitaire ? Dans l'entreprise, l'employeur risque de vivre des "cas de conscience" selon le Medef. Quand, à l'hôpital, des adaptations seront nécessaires : "quand vous avez une urgence ou quand vous venez accompagner un malade en fin de vie, on ne va pas vous demander un pass sanitaire pour entrer à l'hôpital. C'est du bon sens", a expliqué le porte-parole du gouvernement.

La loi est désormais publiée au Journal officiel depuis ce vendredi 6 août. Trois jours plus tard, le pass sanitaire fera bien son entrée en vigueur officielle, - après les lieux de culture et de loisirs depuis le 21 juillet -, dans les restaurants, bars, salons professionnels, foires, les hôpitaux, les trains et cars longue distance et vols intérieurs, et ce, selon le texte, jusqu'au 15 novembre. De quoi chambouler la vie de l'entreprise et ajouter des contraintes aux chefs d'entreprise, dans la lutte contre la propagation du Covid-19.

Au lendemain de sa promulgation, des questionnements apparaissent. Pour les chefs d'entreprises, l'application de la loi sur le pass sanitaire (attestant de la double vaccination, d'un test PCR négatif de moins de 48 heures, ou d'un certificat de rétablissement du Covid) "sera un cas de conscience", a ainsi décrit vendredi Patrick Martin, président délégué du Medef, sur franceinfo.

"Le fait est que ce sera très compliqué pour une entreprise (...) d'engager une procédure de licenciement contre un salarié qui ne se conformerait pas au pass sanitaire", constate M. Martin. Mais par ailleurs les dirigeants d'entreprises voudront protéger salariés, clients et autres contacts.

"Moi je ne pense pas que massivement les chefs d'entreprise joueront avec cette réglementation", a-t-il avancé.

Pour rappel, la rupture d'un CDD avant son terme - si un salarié en contrat déterminé ou un intérim ne présente pas de pass sanitaire - n'a pas été validée par le Conseil constitutionnel. En revanche, un salarié pourra être suspendu, sans salaire.

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"Les petits problèmes du pass sanitaire" plutôt qu'un reconfinement

Sauf que la période est difficile pour le recrutement, souligne le Medef. "Les entreprises hésiteront donc à se séparer d'un salarié, a fortiori d'un salarié qui par ailleurs donne satisfaction", a expliqué Patrick Martin.

Patrick Martin a rappelé que son organisation soutenait le pass sanitaire. Même s'il est d'ores et déjà clair que l'activité a baissé dans les premiers établissements à l'appliquer (parcs d'attraction, cinémas), mais "entre cela et un reconfinement, très sincèrement on préfère gérer les petits problèmes de mise en place du pass sanitaire", a-t-il conclu.

Une semaine de rodage, du "bon sens" à l'hôpital

De son côté, le gouvernement a tenu à faire preuve de souplesse en accordant "une semaine de rodage" pour les professionnels qui devront mettre en place le pass dès lundi à l'entrée de leurs établissements. Ils pourront ainsi "se l'approprier", a justifié vendredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.

M. Attal a assuré que le gouvernement "n'ignore pas" l'"impact" du pass en termes d'organisation au quotidien, "notamment quand on est restaurateur et quand on a une grande terrasse".

Concernant l'hôpital, le gouvernement veut en "faire un sanctuaire vis-à-vis de l'épidémie", a souligné le porte-parole. "Maintenant, évidemment, quand vous avez une urgence ou quand vous venez accompagner un malade en fin de vie, on ne va pas vous demander un pass sanitaire pour entrer à l'hôpital. C'est du bon sens et c'est évidemment un humanisme dont font preuve au quotidien tous les professionnels de santé", a-t-il ajouté.

"Nous considérons que le pass sanitaire est une mesure utile à court-terme pour stimuler le rythme de la vaccination, mais souhaitons alerter, de nouveau, sur la difficulté à l'appliquer dans les établissements hospitaliers", a réagi de son côté la Fédération hospitalière de France (FHF).

Dans les Ehpad, où les visiteurs devront présenter le pass, "on s'organise", assure Florence Arnaiz-Maumé, Déléguée générale du Synerpa, fédération d'Ehpad privés. "Beaucoup d'établissements ont déjà téléchargé l'application qui permet de vérifier les QR code" et "nous proposions déjà des tests antigéniques rapides" aux visiteurs, détaille-t-elle, ajoutant que "les familles qui ne sont pas vaccinées, c'est epsilon". "Le plafond de verre, il est plus sur les salariés".

Emmanuel Macron poste "un grand merci"

Interrogé sur les manifestations anti-pass et anti-vaccination, Gabriel Attal a distingué les personnes qui "doutent le plus sincèrement du monde" d'"une très petite minorité" qui est "dans une instrumentalisation politique de l'épidémie, du pass sanitaire, à des fins parfois électoralistes, médiatiques", ce qui est "irresponsable".

Dans une douzième vidéo postée sur les réseaux sociaux Instagram et Tik Tok Emmanuel Macron a également réagi suite à la validation du Conseil constitutionnel.

"D'abord un grand merci à nos restaurateurs, à nos cafetiers, à nos directeurs de cinémas, de théâtres, de festivals, je sais les efforts qui leur sont demandés et je les remercie infiniment". "Merci à chacun d'entre vous aussi d'accepter ces règles collectives", commence-t-il, en référence au pass qui sera exigé pour ces lieux publics.

Et puis un deuxième message très simple: "faites-vous vacciner, faites-vous vacciner, faites-vous vacciner."

Le gouvernement estime enfin que l'objectif de 50 millions de personnes ayant reçu une première dose de vaccin anti-Covid d'ici la fin août devrait être atteint.

(avec AFP)

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