Qui est Jean-Jacques Urvoas, le "Monsieur sécurité" du Parti Socialiste

Par Nabil Bourassi  |   |  573  mots
Jean-Jacques Urvoas est un ex-rocardien et ex-strauss-khanien.
En nommant Jean-Jacques Urvoas au ministère de la Justice, François Hollande choisit un homme réputé fidèle et acquis à sa cause. Celui qui est reconnu pour son expertise sur les questions sécuritaires atterrit au ministère de la Justice... Un paradoxe qui ne manquera pas d'être décrié par une frange de la gauche toujours très remontée contre l'exécutif en vue de la réforme constitutionnelle...

Il voulait le ministère de l'Interieur, il a eu celui de la Justice. C'est quasiment au pied levé que Jean-Jacques Urvoas a été parachuté ce mercredi 27 janvier place Vendôme pour succéder à « l'icône » Christiane Taubira. Il faut dire qu'à peine 24 heures auparavant, il était nommé rapporteur du projet de loi constitutionnelle.

Le Finistère, son fief

Ce juriste de 56 ans, socialiste depuis toujours (il a pris sa carte à 18 ans), a accompli presque toute sa carrière dans l'appareil du grand parti de gauche. Tour à tour assistant parlementaire, directeur de cabinet du maire de Quimper, puis député du Finistère, il fera de la Bretagne son fief politique. Une carrière parfois mise entre parenthèses lorsqu'il enseigna le droit constitutionnel. C'est à partir des années 2000 qu'il grimpe les échelons et devient président de la fédération PS du Finistère avant d'obtenir un siège au conseil national du Parti Socialiste.

Mais c'est Martine Aubry qui scellera son destin en lui confiant en 2009 les questions liées à la sécurité. Peut-être le regrette-t-elle aujourd'hui. Dès lors, il deviendra le spécialiste de ces questions au sein du parti. Il consacrera cette étiquette à travers un livre publié en 2011 et intitulé "11 propositions choc pour rétablir la sécurité".

"Il aurait mérité d'être ministre de l'Intérieur"

Dans les années 2000, la question sécuritaire était très en vogue dans le PS. Les Socialistes sont encore traumatisés par la défaite cinglante de Lionel Jospin en 2002, dépassé par Jean-Marie Le Pen. La leçon la plus communément admise de cet épisode par les socialistes s'est focalisée sur la faiblesse du volet sécuritaire du candidat Jospin. Dès lors, les socialistes se sont employés à se réapproprier ce terrain, au risque de diviser. Mais dans cet exercice, Jean-Jacques Urvoas excelle. Un chef de l'Unsa Police, cité par Libération, dira d'ailleurs de lui :

"C'est l'un des seuls au PS qui ait ce niveau de connaissance de la sécurité (...) il aurait mérité d'être ministre de l'intérieur".

L'expérience gouvernementale du président Hollande a ainsi montré que l'aspect sécuritaire resterait un marqueur de son mandat. Si Manuel Valls a incarné cette ligne, il a aussi pu compter sur Jean-Jacques Urvoas, alors président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale. Ce dernier a ainsi travaillé avec zèle sur le projet de loi sur le renseignement qui a fait suite aux attentats de Charlie Hebdo, malgré les fortes réticences à la gauche de la gauche. Mais Jean-Jacques Urvoas assume. Un paradoxe d'ailleurs, si l'on en croit un portrait au vitriol dressé par "Libération" qui rappelle son opposition à la loi Loppsi 2, la loi sur le renseignement portée par Nicolas Sarkozy.

Rocardien et strauss-khanien

Il reste néanmoins réputé pour son sérieux et sa capacité de travail. On dit même qu'il n'aime pas les vacances. Celui qui s'assumait rocardien, n'a jamais caché son émoi lors de la chute de Dominique Strauss-Khan, qu'il a soutenu jusqu'au bout, y compris dans la tourmente. Aujourd'hui, il est placé sur le devant de la scène. Il devra assumer le projet de loi constitutionnelle, un projet plus clivant à gauche qu'à droite. Il devra agir avec doigté s'il ne veut pas que son nom soit associé à l'explosion de la gauche comme le craignent certains politologues.