Régionales : fausse défaite du Front national, pour la presse étrangère

Par latribune.fr  |   |  1034  mots
Arrivée en tête au premier tour dans le Nord-Pas-de-Calais, Marine Le Pen a finalement échoué à l'issue de ce scrutin régional. Avec 57,77 % des voix, selon le décompte définitif, la liste d’union de la droite de Xavier Bertrand l’a devancée de plus de quinze points.
Officiellement, le Front national a échoué à conquérir la moindre région. Mais les frontistes confortent leur position, et réalisent un score historique avec 6.600.253 de voix (contre contre 6.421.426 au scrutin présidentiel de 2012). Pour la presse étrangère, le "ouf" de soulagement est unanime, mais la menace latente... pour le scrutin de 2017.

Sept régions pour la droite, cinq pour la gauche et zéro pointé pour le FN. En dépit du résultat qui ressemble -de prime abord- à un camouflet pour le parti frontiste, la presse internationale souligne la progression du Front national et l'impasse dans laquelle se retrouvent désormais la gauche et la droite en France. Revue de détail.

La victoire "avance masquée"

Certes, Le Soir lance un "ouf !" en guise de soulagement. Mais la défaite du FN est néanmoins, "une victoire qui ne dit pas son nom, qui avance masquée". Car "l'évidence est là", le parti frontiste "connaît une montée inexorable", explique le quotidien.

"Le FN, qui se nourrit de peur pour baver de la haine - haine de la différence, haine de l'autre, haine de l'Europe, etc. -, n'a pas dit son dernier mot (...)", prévient le quotidien belge.

Le parti de Marine Le Pen bouleverse désormais l'échiquier politique, et redistribue les cartes, laisse entendre The Independant :

"Malgré son incapacité à remporter le scrutin, le parti de Marine Le Pen s'est néanmoins imposé au cours de ces deux tours comme une force politique en constante progression qui menace de reléguer le centre-droit (ndlr : les Républicains pour le journal britannique) dans une position de simple parti d'opposition...parmi d'autres".

Le FN, victime du système, stratégie pour 2017 ?

Le Soir lance un avertissement sur l'ascension des frontistes. Dans l'Hexagone et ailleurs."Nos sociétés doivent d'urgence s'ébrouer et rassurer. Car la France n'est évidemment pas seule concernée", écrit le journal.

 "Le tous contre le FN a fonctionné", titre El Mundo ce lundi matin. Mais le quotidien espagnol se garde bien de crier victoire. Car, bien que le Front national ne gagne aucune région, il consolide sa position et représente "l'une des trois principales forces politiques en France".

Le quotidien avance que la formation de Marine Le Pen se présentera aux élections présidentielles de 2017 comme la victime d'un "vaste complot des deux principaux partis de droite et de gauche".

Un scrutin sans vainqueur, selon Le Guardian et Der Spiegel

De l'autre côté de la Manche, Le Guardian estime que le FN a bien été contenu pendant ce scrutin. Mais cette situation n'est que "temporaire car le parti connaît une progression continue". Pas de cri de joie, pour le quotidien britannique. C'est un scrutin...sans vainqueur, écrit-il.

"Les partis de l'establishment ont jusqu'à la dernière minute essayer de déjouer ce qu'ils considèrent comme un parti raciste, xénophobe, islamophobe et très dangereux." Mais ils ne se sont pas "penchés sérieusement sur les raisons qui ont fait que les électeurs se sont détournés des partis de gouvernement pour affluer vers le FN".

Le Guardian estime que le vote frontiste est désormais appréhendé "comme protestataire mais aussi comme une alternative" par ses électeurs.

"Front national en France : une élection sans vainqueur" titre ce lundi matin l'édition en ligne de Der Spiegel. "Si le Front National pourrait être arrêté à ce scrutin régional, cela s'explique davantage par le fonctionnement du système électoral que par une volonté du peuple français", écrivait dimanche soir -alors que tous les résultats n'étaient pas encore connus-le quotidien allemand.

La dynamique FN confortée, pour Le Temps

"Les régions refusent le Front national", écrivait hier soir Le Temps :

"Aucune région française ne sera dirigée par le Front national. Bien que porté par une dynamique électorale sans précédent, et crédité dimanche à 21h30 de 28,8% des voix au niveau national à l'issue du second tour, le parti de Marine Le Pen échoue aux portes des treize grandes collectivités territoriales redécoupées en décembre 2014".

Pour autant, "sur le plan national, la dynamique FN n'est pas stoppée", note le quotidien helvète :

"Si le total des voix de droite atteignait, à l'heure d'écrire ces lignes, 40,6% des voix contre 30,6% à la gauche, le parti créé par Jean Marie Le Pen améliore de nouveau son score et atteint son niveau record, à près de 29% des voix. Il est donc conforté comme premier parti politique français, un mois jour pour jour après les attentats terroristes du 13 novembre, et un an et demi avant les élections présidentielles de 2017".

L'ancrage idéologique confirmé

Le quotidien italien Corriere della Sera dresse ce lundi matin un constat bien sombre. "Le Front national est battu mais ses idées restent au centre des discussions". Des idées, qui, au fil du temps, ont su revêtir un masque plus acceptable, laisse entendre le Financial Times : "le parti anti-immigration a élargi sa cible depuis que Marine Le Pen a succédé au Père, et adoucit sa rhétorique xénophobe (...)".

Si la candidate frontiste échoue aux portes du pouvoir, "son appel est plus fort que jamais pour le nombre croissant de mécontents en France", analyse Hugh Schofield de la BBC.

Quant au "ouf" de soulagement unanime face à l'échec des frontistes, "c'est aussi le bruit que vous faites quand vous recevez un coup de poing dans l'abdomen", ose le journaliste.

Nicolas Sarkozy, victime du "ni-ni", pour Le Devoir

Au Québec, Le Devoir se concentre sur les autres formations politiques, estimant que la cote de popularité de Hollande a sauvé le scrutin régional :

"La remontée soudaine dans les sondages de François Hollande depuis les attentats du 13 décembre aura donc servi les socialistes, qui sauvent largement leur mise. Ce résultat est d'autant plus important que cette élection est la dernière avant la présidentielle, dans un an et demi".

La droite parvient certes à changer la couleur de la carte de France -elle a remporté dimanche soir sept régions-, mais ce score n'est pas synonyme de victoire, selon le quotidien québécois :

"Même majoritaire avec sept régions, le grand perdant de cette élection demeure sans aucun doute Nicolas Sarkozy. Le président des Républicains devait non seulement faire « barrage » au Front national, mais remporter une large majorité. Il n'aura fait ni l'un ni l'autre".