Canada : la France en perte de vitesse commerciale

Par Grégoire Normand  |   |  674  mots
Malgré la bonne relation affichée entre Justin Trudeau et Emmanuel Macron, les échanges commerciaux entre la France et le Canada sont peu dynamiques. (Crédits : Reuters)
En visite officielle en France jusqu'à mardi soir, le Premier ministre canadien doit s'entretenir avec Emmanuel Macron. Au programme des discussions figurent notamment le développement des échanges commerciaux entre les deux puissances économiques à travers l'accord du Ceta et l'Accord de Paris sur le climat.

Le Premier ministre canadien Justine Trudeau est en visite officielle à Paris jusqu'à mardi où il doit s'exprimer devant l'Assemblée nationale. Ce déplacement intervient dans un contexte tendu pour le chef du gouvernement canadien. En effet, l'industrie pétrolière est actuellement confrontée à une forte opposition concernant l'élargissement d'un vaste oléoduc, le Trans Mountain, qui relie les sables bitumineux d'Alberta au port de Vancouver. Malgré ces tensions, Emmanuel Macron et son homologue devraient discuter de commerce avec le Ceta (le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada), la future réunion du G7 et les enjeux climatiques. L'occasion de revenir sur les échanges commerciaux entre les deux puissances économiques.

La France en perte de vitesse

Selon les chiffres du service économique de l'ambassade de France au Canada, les échanges de biens entre les deux Etats ont été relativement stables en 2016, s'élevant à 5,91 milliards d'euros (contre 5,95 milliards d'euros en 2015, soit -0,8 milliards).

Cette légère diminution des exportations repose sur plusieurs facteurs. Le recul des ventes passant de 3,2 milliards d'euros en 2015 à 3 milliards en 2016 s'explique par une baisse de la compétitivité-prix à l'exportation "résultant de l'appréciation de l'euro vis-à-vis du dollar canadien courant 2016 (+3,4 %)." L'évolution du taux de change a pu également "favoriser la croissance des importations hors énergie pour les produits agricoles et les équipements mécaniques" ajoute le service de représentation. Les dernières données relatives au premier semestre 2017 n'annoncent pas de bonnes nouvelles pour le commerce extérieur français. Le solde commercial français est devenu déficitaire au cours de cette période après un excédent observé aux premiers semestres 2015 et 2016. Au regard de ces chiffres, le Canada n'est donc pas un partenaire commercial privilégié de la France comme le souligne une étude du service des douanes :

"Si l'UE est le deuxième partenaire du Canada, derrière les Etats-Unis, le poids du Canada est encore faible dans les échanges de l'UE : le Canada ne représente que 0,7 % des exportations et 0,6 % des importations de la France."

L'UE réalise moins de 1% de ses échanges avec le Canada. Ce n'est donc pas un partenaire privilégié du Vieux continent, à l'exception du Royaume-Uni. Le royaume a construit des relations privilégiés avec les pays du Commonwealth : "Le Canada représente 1,5 % des exportations et 2,1 % des importations britanniques."

Quelles opportunités pour le Ceta ?

L'accord du Ceta (accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne), qui est entré en vigueur en septembre dernier, devrait permettre de développer les échanges commerciaux entre les deux zones économiques. C'est un accord dit de troisième génération qui prévoit à la fois une baisse des droits de douane, mais aussi une réduction des barrières non-tarifaires relatives aux normes sociales, environnementales et sanitaires. Le ministère de l'Economie espère favoriser les exportations de produits agricoles transformés, de vins et spiritueux, cosmétiques ou encore de produits pharmaceutiques.

Le document n'est pas encore ratifié par l'ensemble des parlements nationaux des 27. Il est donc difficile de procéder à l'heure qu'il est à une évaluation de l'impact macroéconomique de cet accord. Les controverses suscitées par cet accord en France invitent ainsi les prévisionnistes à la plus grande prudence.

Le Canada pourrait se détourner des Etats-Unis

L'actuelle guerre commerciale menée par l'administration Trump au nom d'un protectionnisme exacerbé pourrait inciter le Canada à se tourner vers l'Union Européenne. Par proximité, les Etats-Unis ont toujours représenté un partenaire commercial de choix pour le Canada. "Ils fournissent ainsi plus de la moitié des importations canadiennes et représentent les trois quarts du débouché canadien" selon une étude du service des douanes français publiée à l'automne dernier. Mais la politique commerciale du président Trump pourrait affaiblir les échanges économiques entre le Canada et les Etats-Unis. Une opportunité que devrait chercher à saisir le président Macron actuellement empêtré dans un climat social défavorable avec la multiplication des mouvements sociaux.