Chine : les tensions entre Pékin et Bruxelles mettent les entreprises européennes « sous pression »

Par latribune.fr  |   |  742  mots
76% des entreprises européennes ont indiqué revoir leur exposition à la Chine et diversifier leurs chaînes d'approvisionnement, selon l'étude de la Chambre de commerce de l'UE (photo d'illustration). (Crédits : Michaela Rehle)
Les entreprises européennes en Chine sont « sous pression ». Le faute à un climat des affaires de plus en plus « politisé », sur fond de tensions géopolitiques entre Pékin et les pays occidentaux, pointe la Chambre de commerce de l'UE. Celles-ci sont ainsi contraintes d'« allouer davantage de ressources pour prévenir les risques » sur le marché chinois.

Les tensions géopolitiques entre les pays occidentaux et la Chine ont des répercussions directes sur les entreprises européennes, si l'on en croit un rapport de la Chambre de commerce de l'Union européenne (UE). Celles-ci sont contraintes d'« allouer davantage de ressources pour prévenir les risques » sur un marché chinois « devenu moins prévisible », peut-on lire dans ce document publié ce mercredi. Elles sont ainsi plus de la moitié (55%) à faire part d'un climat des affaires « davantage politisé que l'an dernier », note la Chambre, qui représente plus de 1.700 entreprises installées en Chine.

Il faut dire que les relations entre l'UE et la Chine, déjà en dents de scie, se sont particulièrement tendu l'an dernier après l'ouverture par la Commission européenne d'une enquête sur les subventions chinoises aux voitures électriques, reflet d'un durcissement de ton à l'égard de ce pays. En parallèle, la rivalité entre la Chine et les États-Unis s'est, elle aussi, encore accentuée après plusieurs perquisitions et interrogatoires visant des entreprises américaines de conseil.

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Les entreprises restent malgré tout en Chine

Ce « sentiment général d'insécurité » a poussé, depuis deux ans, 76% des entreprises européennes à revoir leur exposition à la Chine et à diversifier leurs chaînes d'approvisionnement. Toutefois, seuls 12% des entreprises ont pris la décision de créer une alternative complète hors de Chine, tandis que 1% d'entre elles ont choisi de quitter définitivement le marché chinois, selon l'étude.

Pour « naviguer entre les risques » et mieux les appréhender, s'entourer de cabinets de consultants est « indispensable » pour les entreprises étrangères et peut même devenir un « avantage compétitif » en Chine, estime la Chambre.

À cela s'ajoutent les contraintes réglementaires de la Chine, dont les entrepreneurs étrangers se plaignent de longue date. De nouveaux textes sont entrés en vigueur depuis quelques mois. En juillet dernier, une nouvelle version de la loi anti-espionnage a ainsi vu le jour, notamment. Les professionnels regrettent des lois aux contours vagues et sujettes à de nombreuses d'interprétations. Si bien que, selon un précédent rapport de la Chambre de Commerce de l'UE, une entreprise européenne sur deux a fait état d'« obstacles » pour ses activités en Chine et 62% a considéré rater des opportunités d'affaires.

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Une prise de distance qui ne passe pas

Dans les faits, les relations entre l'UE et la Chine ont changé après la révélation de fragilités des chaînes d'approvisionnement, mises en lumière par la crise du Covid-19. Les répercussions de la crise sanitaire ont renforcé les désirs de souveraineté des Européens dans le domaine industriel.

La guerre en Ukraine, elle, a montré le risque d'une dépendance envers la Russie pour la fourniture de gaz. Dans ce contexte, l'UE a mis au cœur de sa politique pour la sécurité de ses approvisionnements la notion de « réduction des risques » (« de-risking »).

La démarche « ne vise aucun pays en particulier », indique la Chambre. Ce concept « ne signifie pas que la Chine constitue un risque », a expliqué l'été dernier le ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire. « Cela signifie que nous voulons être plus indépendants (...) Nous ne voulons pas nous rendre compte, comme nous l'avons fait lors de la crise du Covid, que nous sommes trop dépendants de certains composants très spécifiques ». Ce concept, comme le souligne l'étude, est très différent de celui de « découplage » mis en place par les États-Unis. Celui ci vise à isoler économiquement la Chine, voire à couper tout lien commercial avec elle.

L'Union européenne assure considérer la Chine comme « un partenaire », même si elle la voit aussi comme « un concurrent et un rival systémique ». Ce que Pékin n'apprécie que peu. « Ce triple positionnement n'est ni conforme à la réalité ni viable dans la pratique », a critiqué au début du mois le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi. « C'est comme si une voiture était à une intersection et que les feux rouge, jaune et vert étaient tous allumés. Dans quelle direction conduire ? », a-t-il feint de s'interroger lors d'une conférence de presse.

(Avec AFP)