Manifestations en Tunisie : Hollande annonce un soutien de 1 milliard d'euros axé sur l'emploi

Par latribune.fr  |   |  696  mots
Un soldat de l'armée tunisienne tente de disperser les manifestants massés devant les locaux de la préfecture de Kasserine, point de départ de la contestation.
Le gouvernement de Beji Caïd Essebsi fait face à un mouvement de contestation grandissant depuis quatre jours avec la multiplication des manifestations de chômeurs initiées après le suicide d'un homme à Kasserine- à qui on aurait refusé un emploi - dans l'une des "régions défavorisées" que la France entend soutenir avec ce plan.

Un milliard d'euros sur cinq ans pour "aider les régions défavorisées et la jeunesse" tunisiennes, en "mettant l'accent sur l'emploi". Voici, selon les termes de l'Élysée,  "l'un des axes majeurs" du plan de soutien annoncé par François Hollande dans un communiqué publié ce vendredi, à l'issue de sa rencontre avec le Premier ministre tunisien, Beji Caïd Essebsi,  dont le pays est en proie à un mouvement de contestation sociale de plus en plus tendu depuis quatre jours.

"La convention de conversion de 60 millions d'euros de dette signée aujourd'hui afin de permettre la construction d'un hôpital dans la région de Gafsa en est une première illustration concrète", ajoute l'Élysée.

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De Paris, le chef d'État tunisien a ajouté que la situation sur le terrain était "maîtrisée."

"La situation se calme. C'est un problème économique. Ce sont des demandes d'emploi. On va essayer de résoudre ce problème, qui est l'un des objectifs principaux de ce gouvernement", a-t-il déclaré à la presse dans la cour de l'Elysée.

Risques de troubles à l'ordre public... et menace terroriste

Car après le retour de l'état d'urgence fin novembre, les Tunisiens doivent désormais se préparer à vivre un couvre-feu nocturne ce vendredi soir. Le ministère tunisien de l'Intérieur a annoncé dans l'après-midi l'instauration d'un couvre-feu national de 20h à 05h à compter de ce vendredi, alors que les manifestations de chômeurs ont donné lieu à des confrontations avec les forces de l'ordre. Un policier a été tué mercredi après avoir été attaqué par des manifestants à Fériana, au sud de Kasserine, où la contestation a débuté il y a quatre jours, a annoncé le ministère de l'Intérieur. Les manifestations ont commencé après le suicide de Ridha Yahyaoui, jeune homme de 28 ans qui se serait vu refuser un poste dans la fonction publique.

Les autorités tunisiennes ont justifié le couvre-feu par les troubles à l'ordre public et les risques pour la propriété privée ainsi que par la crainte d'attaques terroristes, alors que le pays a encore récemment été la cible d'un attentat revendiqué par le groupe Etat islamique. Des rassemblements ont été signalés dans plusieurs villes ce vendredi, y compris à Kasserine, dont la situation n'est pas sans rappeler celle de la ville de Sidi Bouzid, berceau de la révolution de jasmin. En effet, c'est là que le jeune Mohamed Bouazizi, sans emploi, s'était immolé par le feu en 2010, devenant ainsi l'un des catalyseur de la contestation.

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Dans la capitale Tunis, des protestataires ont bloqué ce vendredi l'une des principales artères de la ville et enflammé des pneus tandis que les forces de l'ordre ont interpellé 19 personnes, a dit un responsable des services de sécurité. La veille, la police avait fait usage de grenades lacrymogènes pour disperser plusieurs milliers de jeunes rassemblés devant les bureaux de la préfecture à Kasserine.

"Du travail ou une autre révolution"

Les forces de l'ordre sont également intervenues à Jamdouba, à Beja et à Skira, ainsi qu'à Sidi Bouzid où les manifestants scandaient "du travail ou une autre révolution", selon des témoins et les médias locaux.  Un journaliste de la chaîne Al-Jazeera en reportage à Kasserine affirmait vendredi midi que l'armée était déjà en place pour vérifier que le couvre-feu serait bien appliqué dès sa mise en place. Alors que le président tunisien, Beji Caïd Essebsi, est censé prendre la parole samedi, le correspondant d'Al-Jazeera ajoute que le gouvernement fait face à une pression intense sur le front de la lutte contre le chômage et la corruption. Depuis la révolution de 2010-2011, la situation économique du pays ne s'est pas vraiment améliorée: avec une croissance attendue à moins de 1% pour 2015, le taux de chômage au niveau national dépasse 15% et atteint le double chez les diplômés.

(Avec Reuters)