Pour lutter contre la pauvreté, l'ONU propose un plan à... 3.500 milliards de dollars par an

Par latribune.fr  |   |  820  mots
Le respect des 17 objectifs, qui doivent entrer en vigueur au 1er janvier 2016, sera volontaire pour chaque Etat, qui choisira les moyens pour les atteindre.
Les pays membres de l'ONU ont mis la dernière main dimanche à un plan d'action pour éradiquer l'extrême pauvreté dans le monde d'ici à 2030 tout en maîtrisant le réchauffement climatique. Ce nouveau plan succède aux 8 "Objectifs du millénaire" adoptés en 2000.

Publié lundi 3 août 2015 à 9:28, mis à jour le 4.08.2015 à 11:19

En 2000, les Nations unies lançaient les Objectifs du Millénaire pour le développement. Mais quinze ans plus tard, les résultats sont mitigés. Si l'ONU assure qu'un milliard de personnes sont sorties de la pauvreté, les inégalités persistent.

 A l'issue d'une semaine de négociations intenses au siège de l'ONU, à New York, experts et diplomates des 193 pays ont adopté un projet d'une trentaine de pages intitulé "Transformer notre monde, programme de développement durable d'ici à 2030".

Ce programme sera soumis pour adoption formelle aux chefs d'Etat et de gouvernements de la planète les 26 et 27 septembre à New York, en marge de la session annuelle de l'Assemblée générale de l'ONU.

17 objectifs de développement durable d'ici à 2030

Il comprend 17 objectifs de développement durable déclinés en 169 "cibles". Le premier est "d'éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde". Pour mémoire, un milliard de personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour, notamment en Afrique subsaharienne et en Asie.

Il faut aussi "permettre à tous de vivre en bonne santé", "assurer l'accès de tous à une éducation de qualité" et "parvenir à l'égalité des sexes" en éliminant toute forme de discrimination et de violence envers les femmes.

D'autres objectifs concernent la réduction des inégalités, "un travail décent pour tous", "des modes de production et de consommation durables" et "des sociétés pacifiques et ouvertes à tous" car paix, développement et bonne gouvernance vont de pair.

L'objectif numéro 13 enjoint aux gouvernements de "prendre d'urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions". Les responsables de l'ONU soulignent le lien avec la négociation climatique qui doit se conclure fin décembre à Paris, même si les deux initiatives avancent séparément. Le document appelle à conclure à Paris "un accord ambitieux et universel sur le climat".

Des objectifs à atteindre mais sur la base du volontariat

Le respect des 17 objectifs, qui doivent entrer en vigueur au 1er janvier 2016, sera volontaire pour chaque Etat, qui choisira les moyens pour les atteindre. Mais des "indicateurs" devraient permettre de juger des progrès accomplis et d'assurer un "suivi systématique".

"Notre génération pourrait être la première à éradiquer la pauvreté, tout comme nous sommes les derniers à avoir une chance de sauver la planète", affirme le texte.

S'exprimant au nom du G77 (qui compte aujourd'hui 134 pays en développement), l'ambassadeur sud-africain Kingsley Mamabolo a cité Nelson Mandela, affirmant sous les applaudissements: "Cela semble toujours impossible, jusqu'à ce que nous le fassions."

"C'est un cadre volontaire certes mais un engagement politique très significatif", estime un négociateur occidental. La liste des objectifs et cibles, explique-t-il, ne changera pas d'ici fin septembre car personne ne prendra le risque politique de rouvrir cette boite de Pandore.

Un des points saillants du document est l'idée que "personne ne doit être laissé de côté". "Nous nous attelleront à tendre la main en premier lieu à ceux qui sont loin derrière", promet le programme.

Un plan à 3.500 milliards de dollars par an, au minimum...

La clé du succès sera le financement de cet effort colossal. Une conférence internationale réunie à la mi-juillet à Addis Abeba, en Ethiopie, avait chiffré la facture à 2.500 milliards de dollars sur 15 ans et a lancé un appel à la générosité des entreprises.

Mais dimanche, l'ONU a estimé qu'il faudra dépenser au moins 3.500 milliards de dollars par an étalés sur quinze ans pour éradiquer l'extrême pauvreté tout en maîtrisant le réchauffement climatique.

"Les chiffres généralement évoqués vont de 3.500 à 5.000 milliards de dollars par an, année après année", a indiqué à la presse l'ambassadeur kenyan à l'ONU Macharia Kamau, dont le pays a co-présidé les négociations avec l'Irlande.

"Cela semble un chiffre astronomique", a-t-il reconnu, estimant qu'il s'agissait d'un programme "certes ambitieux mais pas impossible à réaliser".

A titre de comparaison, les PIB des Etats-Unis et de la France représentent respectivement quelque 17.000 milliards de dollars et 3.000 milliards de dollars.

L'aide au pays pauvres très en deçà des promesses

Devant la baisse de l'aide publique au développement provoquée par la crise économique, les rédacteurs du programme "reconnaissent le rôle des différents secteurs privés (..) et de la société civile dans la mise en œuvre du programme".

En principe, chaque pays riche devrait consacrer au moins 0,7% de son produit intérieur brut à aider les pays pauvres, mais bien peu le font.  A l'instar de Paris qui ne consacre que 0,36% de son PIB à l'aide publique au développement. La France plaide d'ailleurs pour un mode de calcul plus large que ce pourcentage et demande à ce que la lutte contre Ebola et que les interventions militaires, au Mali ou en Centrafrique soient comptabilisées comme de l'aide au développement.

(Avec AFP)