Nucléaire : le groupe russe Rosatom va construire une centrale au Burkina Faso

Par latribune.fr  |   |  721  mots
« Nous prévoyons, si nous le pouvons, de construire des centrales nucléaires d'ici 2030, de façon à résoudre le problème du déficit énergétique », a notamment déclaré jeudi le ministre Boussim. (Crédits : MAXIM SHEMETOV)
Le Burkina Faso a signé ce vendredi un accord avec Moscou pour construire une centrale nucléaire. L'objectif est d'ériger, d'ici à 2030, de nouvelles centrales, dans ce pays d'Afrique de l'Ouest où moins d'un quart seulement de la population a un accès à l'électricité. Ce contrat illustre la montée en puissance de la Russie dans la région au détriment de la France.

Nouvelle illustration de la montée en puissance de la Russie en Afrique. Ce vendredi, le groupe russe nucléaire Rosatom a signé un accord avec le Burkina Faso pour construire une centrale nucléaire dans ce pays d'Afrique de l'Ouest où moins d'un quart de la population a accès à l'électricité. Un accord qui intervient à l'occasion de la Semaine russe de l'énergie à Moscou, à laquelle le ministre de l'Energie du Burkina, Simon-Pierre Boussim, participe. Pour rappel, le continent africain, ne compte qu'une seule centrale nucléaire, en Afrique du Sud, à Koeberg près du Cap. Rosatom a lancé la construction d'une centrale en Egypte.

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Doubler par deux sa production électrique d'ici à 2030

Alors que fin 2020, seulement 22,5% des Burkinabè - dont 67,4% en zone urbaine et 5,3% en milieu rural - avaient accès à l'électricité, selon les chiffres de la Banque africaine de développement, le gouvernement burkinabè souhaite doubler sa production d'électricité d'ici à 2030.

« Nous prévoyons, si nous le pouvons, de construire des centrales nucléaires d'ici à 2030, de façon à résoudre le problème du déficit énergétique », a notamment déclaré jeudi le ministre Boussim, cité par l'agence de presse russe TASS. Le but étant de « donner un coup de fouet à l'industrialisation de l'Afrique », a-t-il ajouté.

Le Burkina Faso importe une grande partie de son électricité de la Côte d'Ivoire et du Ghana voisins et en produit une autre partie localement, principalement par énergie hydroélectrique ou solaire.

Un rapprochement avec Moscou depuis le deuxième coup d'Etat

Gouverné par le capitaine Ibrahim Traoré, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en septembre 2022 (le deuxième en huit mois), le Burkina s'est éloigné de la France, son partenaire historique et ancienne puissance coloniale. Le pouvoir en place a dès lors obtenu le départ des soldats français sur son territoire en février. Dans sa recherche de nouveaux alliés, le pays d'Afrique de l'Ouest s'est rapproché de Moscou. Au-delà de cette nouvelle centrale nucléaire, Vladimir Poutine a annoncé en juillet, lors du sommet de Saint-Pétersbourg, la livraison gratuite dans les mois à venir de céréales à six pays africains dont le Burkina. Début septembre, une délégation russe conduite par le vice-ministre de la Défense, Yunus-Bek Yevkurov, s'est également rendue à Ouagadougou pour échanger avec Ibrahim Traoré sur des questions de développement et de coopération militaire. Et le 30 septembre, dans une interview à la télévision nationale, le capitaine Traoré a affirmé que la plupart des équipements de l'armée burkinabè étaient russes.

Le Burkina Faso est confronté depuis plusieurs années à des violences jihadistes meurtrières et récurrentes sur une grande partie de son territoire, qui ont fait plus de 17.000 morts et plus de deux millions de déplacés internes. Le Burkina a fait alliance avec le Mali et le Niger, deux pays dirigés par des régimes militaires qui entretiennent également de bonnes relations avec Moscou, dans le cadre de l'Alliance des Etats du Sahel (AES), une coopération de défense.

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La Russie, champion du nucléaire avec la Chine

Sur fond de crise énergétique et climatique, d'autres pays expriment un intérêt renouvelé pour l'atome. L'énergie nucléaire génère environ 10% de l'électricité mondiale, dans 31 pays, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Mais aujourd'hui, les vrais super actifs du nucléaire civil sont la Chine à domicile et la Russie à l'exportation. En 2020-2022, sur les 25 chantiers lancés dans le monde (première coulée du béton du réacteur), tous se trouvaient soit en Chine, soit hors de Chine mais portés par l'industrie russe, analyse le World Nuclear Industry Status Report (WNISR), rapport d'experts indépendants basé sur des données publiques. En 2023, quatre constructions ont été lancées dont trois en Chine et une par le russe Rosatom en Egypte.

La Chine dépasse désormais la France avec 57 tranches sur son territoire; elle en a 24 autres en construction. Mais si la Chine œuvre à domicile, la Russie domine le marché international, avec 24 réacteurs en chantier dont 5 chez elle.

 (Avec AFP)