Pour les Etats-Unis, la Chine empêche l'allégement de la dette des pays pauvres

Par latribune.fr  |   |  833  mots
Janet Yellen, la secrétaire américaine au Trésor. (Crédits : Jonathan Ernst)
Le FMI et la Banque mondiale appellent régulièrement la Chine, premier créancier du monde, à s'engager dans la restructuration de la dette des pays pauvres et en développement, notamment en Afrique, à travers le cadre commun de négociation mis en place par le G20. Les Etats-Unis dénoncent le manque de coopération de la Chine, accusée de profiter de la situation.

[Article mis à jour à 18h00]

Les tensions entre les deux plus grandes puissances mondiales s'expriment sur tous les terrains de jeux, y compris d'Afrique. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a accusé vendredi la Chine, principal créancier des pays pauvres et en développement, de faire obstruction aux efforts internationaux visant à alléger la dette de ces pays, notamment ceux du continent africain.

« L'obstacle à de plus grands progrès est un important pays créancier, à savoir la Chine », a déclaré la ministre de l'Economie et des Finances de Joe Biden, vendredi lors d'une conférence de presse au siège du Fonds monétaire international (FMI), à Washington. « Il y a donc eu beaucoup de discussions sur ce que nous pouvons faire pour amener la Chine à la table et favoriser une résolution plus efficace de ces problèmes », a-t-elle précisé, alors que les réunions d'automne du FMI et de la Banque mondiale, qui ont également vu se réunir les G7 et G20 Finances, touchent à leur fin.

« Très peu de pays » demandent que leur dette soit traitée dans le cadre commun du FMI, avait souligné la ministre plus tôt dans la journée, lors d'une réunion avec ses homologues des pays de la zone euro. Parmi ceux qui l'ont fait, « la Chine est un facteur important expliquant pourquoi cela ne fonctionne pas » et Pékin « ne participe pas de manière constructive », a-t-elle dénoncé.

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La pandémie a aggravé les difficultés des pays pauvres

Les dégâts économiques provoqués par la pandémie de Covid-19 ont conduit de nombreux pays à devoir emprunter encore, avec des situations de surendettement, renforcées par la hausse des taux d'intérêts qui doit permettre de juguler l'inflation.

La situation dans les pays africains et dans d'autres pays en développement « est extrêmement préoccupante », a souligné la secrétaire au Trésor.

« Les problèmes d'endettement deviennent de plus en plus aigus pour les pays africains », a alerté Mme Yellen, qui a reconnu « l'importance de faire des progrès en vue de disposer d'un cadre meilleur et plus efficace pour résoudre le surendettement ».

L'encours total des prêts officiels chinois est évalué entre 500 et 1.000 milliards de dollars, concentrés dans les pays à revenu faible et intermédiaire, et « pas moins de 44 pays doivent désormais une dette équivalant à plus de 10% de leur PIB à des prêteurs chinois », avait précisé fin septembre un conseiller de Mme Yellen.

Alléger la dette est « vital » pour les pays africains

Les gouvernements africains ont exhorté samedi les créanciers à accélérer l'allègement de la dette, estimant que les retards limitaient la croissance sur un continent confronté à toute une série de défis, de la forte inflation à l'insécurité alimentaire.

S'exprimant lors d'une conférence de presse en ligne du Fonds monétaire international (FMI), le ministre zambien des Finances Situmbeko Musokotwane a déclaré que l'allègement de la dette était « vital » pour ramener l'économie mondiale « à la normale ».

« Notre capacité à participer à l'économie mondiale est limitée », a déclaré M. Musokotwane. « Tout ce que nous pouvons faire est d'exhorter nos partenaires, les créanciers, à considérer cela comme une question d'urgence. C'est ce que nous demandons. De la rapidité, de la rapidité, de la rapidité, voilà ce dont nous avons besoin ».

Fin 2020, la Zambie était devenue le premier pays africain en défaut de paiement depuis le début de la pandémie de coronavirus avec une dette extérieure estimée à 17,3 milliards de dollars. Le mois dernier, elle a obtenu un prêt de 1,3 milliard de dollars du FMI pour l'aider à rétablir la stabilité budgétaire.

Le ministre zimbabwéen des finances, Mthuli Ncube, a déclaré au panel du FMI que les appels de Mme Yellen à une plus grande participation de la Chine étaient « appropriés ». « Nous entrons dans une période très difficile au niveau mondial », a-t-il déclaré. « Nous ne voulons pas que l'endettement freine la croissance des pays africains, simplement parce que les créanciers sont trop lents à faire ce qu'il faut », a-t-il ajouté.

Plus tôt dans la semaine semaine, le FMI a estimé que l'Afrique subsaharienne était confrontée à un « contexte le plus difficile depuis des années », la reprise de la région étant perturbée par une inflation galopante, des taux d'intérêt en hausse et un ralentissement mondial.

Le FMI a appelé à une meilleure mise en œuvre du « cadre commun », en soulignant que les niveaux d'endettement avaient augmenté mais que la hausse des taux d'intérêt mondiaux signifiait que l'accès au financement risquait de "devenir beaucoup moins clément". Alors que la région traverse sa troisième année de crise, les responsables politiques disposent d'une marge de manœuvre limitée pour faire face.