Pourquoi le Tibet a déjà du mal à digérer l'arrivée de KFC à Lhassa

Par latribune.fr  |   |  591  mots
L'enseigne de restauration rapide qui revendique une présence dans 125 pays et territoires, va s'installer à Lhassa, au Tibet.
La chaîne de restauration rapide Yum! Brands a annoncé l'implantation prochaine du tout premier KFC dans le centre-ville de Lhassa, dans la région autonome du Tibet. En 2004 déjà, le Dalaï Lama lui-même s'était opposé à ce projet.

Quelques mois après avoir ouvert son premier restaurant au Myanmar (la Birmanie), KFC a mis le cap sur Lhassa. Jeudi 10 décembre, le groupe de restauration rapide américain Yum! Brands a annoncé qu'il ouvrirait prochainement sa première enseigne Kentucky Fried Chicken au Tibet, suscitant l'inquiétude de l'ONG Free Tibet, dix ans après l'échec d'un projet d'installation dans la région.

Selon l'agence de presse Chine Nouvelle, le nouveau restaurant KFC sera installé dans le centre commercial Shenlishidai, situé dans le centre-ville de Lhassa. La cité historique, chef lieu de la région autonome du Tibet et capitale du royaume du Tibet depuis le VIIe siècle, est classée au patrimoine mondial de l'UNESCO.

"Nous avions déjà des restaurants rapides au Tibet"

Le futur restaurant ouvrira ses portes fin janvier 2016, a fait savoir Chen Biao, directeur du centre commercial, cité par l'agence Chine Nouvelle. Situé sur deux étages, il couvrira une superficie de 540 mètres carrés.

"Avant que KFC ait choisi d'entrer au Tibet, nous avions déjà des restaurants rapides tels que Dicos", a raconté le directeur du centre commercial à Chine Nouvelle, ajoutant que les clients, au Tibet, acceptent bien le poulet frit et les hamburgers.

L'agence de presse ajoute que KFC prévoit également de construire un entrepôt frigorifique de près de 5 hectares dans la banlieue de la ville, en prévision de sa future expansion dans la région.

 Un développement économique à la sauce tibétaine?

Un porte-parole de Yum! Brands a indiqué à l'AFP que le restaurant servirait aussi bien "les consommateurs locaux (que) les touristes", et que, en plus de créer des emplois, il incorporerait "des éléments de décor locaux", et "soutiendra(it) le développement d'une chaîne d'approvisionnement sur place".

Néanmoins, comme le Dalaï Lama, qui en 2004 s'était lui-même vivement opposé à un premier projet d'installation de KFC au Tibet au nom de la protection des poulets, dont l'abattage "cruel" "viole les valeurs tibétaines", certains restent sceptiques devant les arguments de l'enseigne. C'est le cas de l'ONG Free Tibet:

"En principe, il n'y a rien de mal à voir une entreprise occidentale s'installer au Tibet. Mais cela a toujours été une source d'inquiétude car jusqu'à présent, très peu (de firmes étrangères) se sont montrées soucieuses d'apporter des bénéfices au Tibet et aux Tibétains", a réagi Alistair Currie, porte-parole de l'ONG.

KFC doit s'adapter, exige Free Tibet

Au-delà des "éléments de décor", Free Tibet demande à KFC de s'assurer que soient recrutés sur place des Tibétains, qu'ils soient formés et promus correctement, et que le restaurant utilise la langue tibétaine --et non pas seulement le chinois mandarin.

"Yum! Brands doit prouver que ses engagements ne sont pas superficiels et de convenance. Pour l'instant, le compte n'y est pas", insiste Alistair Currie.

Nombre de Tibétains se plaignent de restrictions imposées à leurs traditions bouddhistes, d'une répression de leur culture, et de discriminations économiques de la part des Chinois Han -- majoritaires en Chine -- arrivés en masse sur le plateau himalayen ces dernières décennies. Ce que Pékin réfute, pointant ses investissements de modernisation de la région.

De la statue de la liberté au Taj Mahal, les enseignes Yum ont planté leurs drapeaux aux quatre coins de la planète, 41.000 restaurants dans plus de 125 pays et territoires, indique la marque sur son site.(Capture d'écran Yum.com)

 (Avec AFP)