Qui pour succéder à Lagarde à la tête du FMI ? Un Français ?

Par Delphine Touitou, AFP  |   |  1010  mots
(Crédits : Yuri Gripas)
Qui va succéder à la Française Christine Lagarde à la tête du Fonds monétaire international? Très probablement un Européen, mais lequel?

La directrice générale de l'institution de Washington a été choisie mardi pour prendre les rênes de la Banque centrale européenne (BCE). Et avant même la confirmation de son départ pour Francfort, les jeux sont ouverts.

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Depuis sa création en 1944, la nationalité des candidats a été déterminante. Un Européen a en effet toujours été nommé pour diriger le FMI tandis qu'un Américain a toujours dirigé la Banque mondiale.

Quoique aujourd'hui contesté par les pays émergents, ce partage de rôle immuable a ainsi porté David Malpass, ancien sous-secrétaire au Trésor américain, à la présidence de la Banque mondiale au printemps dernier.

Pour le FMI, des noms, français, commencent à circuler dont le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, le politicien  français et actuel commissaire européen Pierre Moscovici ou encore Benoît Coeuré.

Ce dernier, membre du directoire de la BCE, pourrait être contraint de démissionner avec l'arrivée de Christine Lagarde. "Car il y a une règle non écrite selon laquelle il ne peut y avoir deux personnes de la même nationalité à la BCE", a expliqué à l'AFP Carsten Brzesk, économiste chez Ing.

Pour la direction du FMI, "il faut que ce soit un Européen", exhorte une source française sous couvert d'anonymat tout en se gardant bien de se prononcer sur la nationalité.

"Mon point de vue est que cela devrait être ouvert à quiconque dans le monde", réagit Mark Sobel, un ancien responsable du Trésor sous les administrations républicaine et démocrate.

L'option bulgare

Pour autant, réaliste, il observe que "la facilité avec laquelle les États-Unis ont préservé le duopole (Banque mondiale/FMI) signifie que les Européens voudront certainement garder la main" encore cette fois-ci. Et de critiquer l'attitude des pays émergents qui ne font ni front commun, ni ne prennent les devants.

Jusqu'à présent, cinq des onze dirigeants du FMI ont été des ressortissants français. Et, en 75 ans d'existence de cette institution internationale, ce sont eux qui ont servi le plus longtemps.

Au FMI, des voix avancent néanmoins un autre nom, celui de la Bulgare Kristalina Georgieva. "Certes, elle est totalement associée à la Banque mondiale", dont elle a même assuré la présidence par interim avant l'arrivée de David Malpass, souligne-t-on en interne. "Mais elle est extrêmement respectée, appréciée et pourrait faire consensus".

Si elle était sélectionnée, il s'agirait seulement de la deuxième femme à occuper ces fonctions après Christine Lagarde. Le choix d'un non-Français pourrait aussi apaiser les critiques éventuelles selon lesquelles la France s'arroge de trop nombreux postes au sein des institutions prestigieuses.

Pour autant, ce ne serait pas inédit dans l'histoire puisqu'entre 1991 et 1995, des Français étaient simultanément présents à la tête du FMI, de l'OCDE, de la Commission européenne ainsi que de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement. Le comité de direction du FMI comprend 24 administrateurs représentant les 189 membres, seuls Washington, Tokyo (6,15%) et Pékin (6,09%) représentant leur pays à eux seuls.

Agustin Carstens, ancien dirigeant mexicain de la banque centrale mexicaine, estime qu'il est "urgent" de réformer le FMI pour donner plus de voix aux pays émergents et améliorer ainsi la légitimité du fonds.

En principe, le processus de sélection d'un nouveau directeur général est "ouvert" et "fondé sur le mérite". Les candidatures de tous les pays membres sont en outre recevables en théorie.

Le bon candidat doit aussi se targuer d'un "parcours professionnel exceptionnel", et faire la preuve de compétences en matière de diplomatie incontournable pour diriger une institution internationale.

Pour l'heure, aucune indication sur le calendrier n'a été donnée.

La candidature de Christine Lagarde à la BCE doit être d'abord formellement validée par les ministres des finances européens, probablement la semaine prochaine. Puis Mme Lagarde devra être auditionnée par le parlement européen. Ce qui pourrait intervenir d'ici la fin du mois de juillet. Enfin, sa nomination devra être approuvée lors d'un Conseil européen, en octobre a priori, pour une prise de fonction en novembre.

En attendant l'arrivée d'un nouveau directeur général au FMI, c'est David Lipton, 65 ans, qui officie.

Premier directeur général adjoint depuis le 1er septembre 2011, il avait été notamment assistant spécial du président Obama et travaillé au Trésor américain sous l'administration Clinton, de 1993 à 1998.

Le Britannique Osborne sur les rangs

L'ancien ministre britannique des Finances George Osborne s'est mis sur les rangs pour succéder à Christine Lagarde à la tête du Fonds monétaire international (FMI), rapporte jeudi la presse britannique.

Plusieurs journaux citent l'entourage de M. Osborne qui jugerait être le mieux placé pour obtenir des soutiens pour sa candidature auprès des autorités britanniques, américaines et chinoises.

L'ancien chancelier de l'Echiquier (2010-2016) du gouvernement conservateur de David Cameron devra obtenir d'abord le soutien du prochain locataire du 10, Downing Street, un poste qui fait lui-même l'objet d'une compétition au sein du Parti conservateur entre Boris Johnson et Jeremy Hunt.

D'après le quotidien conservateur Daily Telegraph, M. Osborne, qui avait milité contre le Brexit, aurait noué des contacts cordiaux avec les équipes des deux candidats. Depuis 2017, l'ancien ministre des Finances est rédacteur en chef du quotidien londonien Evening Standard qui s'est prononcé récemment en faveur de M. Johnson, le favori dans cette course.

M. Osborne espère obtenir des soutiens en Chine, son mandat aux Finances à Londres ayant coïncidé avec un rapprochement sino-britannique. Il espère en avoir aussi aux Etats-Unis, où il aurait de nombreux amis au Parti républicain, croit savoir le Financial Times. D'après le quotidien des milieux d'affaires, l'ex-chancelier considère que la période actuelle favoriserait "un communicant et exécutant politique habile... pas un technocrate".