La "vérité" sur Khashoggi : Erdogan ménage le roi Salmane mais ne cite pas une fois MBS son prince héritier

Par latribune.fr  |   |  596  mots
"Pourquoi donc ces quinze personnes étaient-elles à Istanbul le jour du meurtre ? Nous cherchons des réponses à cette question. De qui donc ces personnes recevaient-elles leurs ordres ?" Le président Erdogan (ici, le 23 octobre au parlement turc s'adressant au députés de son parti au pouvoir l'AKP) a demandé que tous les suspects soient jugés à Istanbul, réitérant sa volonté de trouver le commanditaire de cet assassinat. (Crédits : HANDOUT)
Le corps de Jamal Khashoggi reste introuvable, mais la préméditation ne fait aucun doute en l'état actuel de l'enquête, a expliqué devant son parlement le président de la Turquie. Erdogan réclame non seulement que les responsables soient jugés sur le sol turc, mais aussi de connaître le vrai commanditaire du meurtre du dissident saoudien en exil.

[Article publié le 23.10.2018 à 12:47, mis à jour à 13:24]

Détaillant les résultats de l'enquête en cours sur la mort de Jamal Khashoggi, le président turc Recep Tayyip Erdogan, a déclaré mardi que des preuves solides tendaient à démontrer que le meurtre du journaliste et dissident saoudien, le 2 octobre dernier à l'intérieur du consulat d'Arabie saoudite à Istanbul, a été planifié. Ceci renforce donc les soupçons de guet-apens et de meurtre en bande organisée (la circonstance aggravante de "bande organisée" diffère de celle de "réunion", la première supposant nécessairement une préméditation).

L'intervention de M. Erdogan a eu lieu quelques heures après l'ouverture à Ryad d'un forum international sur l'investissement, marqué par des désistements en cascade de dirigeants étrangers et chefs d'entreprises.

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Les tentatives de faire porter la responsabilité de ce meurtre à des agents agissant hors de tout contrôle, comme l'a suggéré Ryad, "ne peut nous satisfaire", a ajouté le président turc, qui a cependant dit ne pas douter de la sincérité du roi Salmane d'Arabie.

Tous les responsables devront rendre des comptes

Dans son discours au Parlement, Recep Tayyip Erdogan s'est toutefois bien gardé de donner des noms, notamment celui de Mohammed ben Salmane ("MBS"), ne citant pas une seule fois le nom du prince héritier saoudien que plusieurs parlementaires américains soupçonnent ouvertement d'avoir ordonné le meurtre.

Le président Erdogan a ajouté que la Turquie ne bouclerait pas son enquête tant qu'elle n'aura pas obtenu toutes les réponses à ses questions.

"Nos services ont rassemblé des éléments démontrant que le meurtre a été planifié", a déclaré le président turc. "Imputer une telle affaire à quelques agents des services de sécurité et de renseignement (saoudiens) ne peut nous satisfaire et ne peut satisfaire la communauté internationale."

Il ajoutait :

"De celui qui a donné l'ordre jusqu'à celui qui l'a exécuté, tous doivent rendre des comptes", a-t-il insisté.

Le corps reste introuvable

Erdogan a ajouté qu'il n'avait pas été possible de déterminer où se trouvent les restes de Khashoggi et il a exigé que l'Arabie saoudite révèle l'identité de la personne qui s'est occupée du corps.

Le président turc a révélé que 3 agents saoudiens étaient arrivés en Turquie la veille de la disparition du journaliste. Le trio, a-t-il ajouté, s'est rendu dans une forêt proche d'Istanbul ainsi qu'à Yalova, une ville située sur la mer de Marmara, à 90 km au sud d'Istanbul, deux sites où la police turque, qui n'a toujours pas retrouvé le corps de Khashoggi, a procédé à des fouilles.

Erdogan a par ailleurs confirmé que 15 Saoudiens étaient arrivés à Istanbul le jour même de la disparition de Khashoggi. Il a ajouté que les caméras de sécurité installés à l'intérieur du consulat avaient été démontées.

Erdogan demande que les suspects soient jugés en Turquie

Les 18 interpellations auxquelles les autorités saoudiennes disent avoir procédé correspondent aux informations du renseignement turc, a poursuivi le président turc lors d'une rencontre avec les élus de son parti, l'AKP, au Parlement.

Erdogan a demandé que tous les suspects soient jugés à Istanbul, réitérant sa volonté de trouver le commanditaire de cet assassinat.

"Pourquoi donc ces quinze personnes étaient-elles à Istanbul le jour du meurtre ? Nous cherchons des réponses à cette question. De qui donc ces personnes recevaient-elles leurs ordres ?"

(Avec AFP et Reuters)