Affaire Khashoggi : l'Arabie Saoudite admet "une énorme et grave erreur"

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al Joubeïr, a déclaré dimanche que le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi dans le consulat d'Arabie saoudite à Istanbul était une "énorme et grave erreur".
L'Arabie Saoudite reste sous la pression de la communauté internationale
L'Arabie Saoudite reste sous la pression de la communauté internationale (Crédits : Mohamed Abd El Ghany)

L'Arabie Saoudite commence à faire amende honorable dans une affaire hors norme. Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al Joubeïr, a déclaré dimanche que le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi dans le consulat d'Arabie saoudite à Istanbul était une "énorme et grave erreur" et a promis à sa famille que les coupables seraient punis. "C'est une terrible erreur. C'est une terrible tragédie. Nos condoléances les accompagnent. Nous ressentons leur douleur", a affirmé le ministre dans une interview à la chaîne de télévision Fox News. Malheureusement, une énorme et grave erreur a été commise et je les assure que les responsables en seront tenus pour responsables".

Premier responsable saoudien à prendre la parole

Le chef de la diplomatie saoudienne est le premier haut responsable saoudien à prendre la parole depuis que l'Arabie saoudite a reconnu samedi la mort de Jamal Khashoggi. Adel al Joubeïr a déclaré dans cette interview que le journaliste saoudien avait été abordé par une "équipe de sécurité saoudienne" lorsqu'il était entré au consulat et que le récit par l'équipe de ce qui s'était passé par la suite était différent de celui des autorités turques, ce qui avait incité l'Arabie saoudite à ouvrir une enquête.

"Il a été tué au consulat. Nous ne savons pas comment dans le détail. Nous ne savons pas où se trouve le corps", a déclaré Adel al Joubeïr. "Nous sommes déterminés à retourner chaque pierre".

Après deux semaines de dénégation, Ryad a reconnu samedi la mort du journaliste saoudien, qui vivait depuis un an aux Etats-Unis et se montrait critique envers le prince héritier Mohamed ben Salman. Dans un premier temps, Ryad a expliqué qu'il était mort dans une bagarre au consulat d'Arabie saoudite à Istanbul. Puis une source saoudienne haut placée a ensuite indiqué que le journaliste âgé de 59 ans avait été tué accidentellement par une prise d'étranglement.

Trump évoque des mensonges de l'Arabie Saoudite

Pour autant, l'Arabie Saoudite reste sous la pression de la communauté internationale. A commencer des Etats-Unis, qui dépit de la confusion des déclarations, ont durci le ton envers Ryad. Donald Trump a évoqué des "mensonges" dans les explications sur la mort du journaliste Jamal Khashoggi. "Il y a manifestement eu tromperie et mensonges", a-t-il estimé dans un entretien publié tard samedi soir par le Washington Post, journal auquel collaborait Jamal Khashoggi, exilé aux Etats-Unis depuis 2017 après être tombé en disgrâce auprès du pouvoir saoudien.

"Leurs histoires partent dans tous les sens", a ajouté le locataire de la Maison Blanche, qui avait jugé "crédible" la veille la version de Ryad selon laquelle le journaliste aurait été tué au cours d'une rixe au consulat saoudien à Istanbul.

Dans le même temps, Donald Trump a cependant tenu à ménager le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, surnommé MBS, "une personne forte", qui "aime vraiment son pays", selon lui. "Personne ne m'a dit qu'il était responsable. Personne ne m'a dit qu'il n'était pas responsable. Nous ne sommes pas arrivés à ce point", a assuré le président américain, évoquant la "possibilité" que MBS n'ait eu qu'a posteriori connaissance des événements.

"J'aimerais qu'il ne soit pas responsable. Je pense que c'est un allié très important pour nous. Notamment avec l'Iran qui mène tellement d'activités néfastes à travers le monde, c'est un bon contrepoids", a-t-il encore confié au Washington Post, mentionnant à plusieurs reprises au cours de l'entretien l'importance des liens économiques entre les Etats-Unis et l'Arabie saoudite.

Berlin, Paris, Londres et... Ankara maintiennent la pression sur Ryad

L'Allemagne, la France et le Royaume-Uni veulent savoir ce qui s'est vraiment passé au consulat saoudien d'Istanbul. Ils demandent à l'Arabie saoudite de donner des faits pour expliquer ce qui est arrivé au journaliste Jamal Khashoggi pour être considérée comme crédible, ont déclaré dimanche l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni dans un communiqué commun publié à Londres. "Rien ne peut justifier ce meurtre et nous le condamnons dans les termes les plus fermes", ont estimé les trois pays. Les pays soulignent qu'il faut faire davantage pour établir la vérité et les responsabilités pour les crimes commis.

"Nous soulignons que des efforts supplémentaires sont nécessaires et attendus pour établir la vérité d'une manière exhaustive, transparente et crédible, ont déclaré les trois ministres des Affaires étrangères de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni sur la mort de Jamal Khashoggi. Nous nous déterminerons en dernier ressort en fonction de la crédibilité des explications supplémentaires que nous recevrons sur ce qu'il s'est passé, ainsi que de notre conviction qu'un événement aussi indigne ne puisse plus se reproduire et ne se reproduira plus. Nous demandons donc que l'enquête soit poursuivie de manière approfondie jusqu'à ce que les responsabilités soient clairement établies, et que les auteurs des faits en répondent dans le cadre d'un véritable procès".

Ryad est également sous la pression d'Ankara, qui fait peser sur le régime saoudienne une menace considérable en menant une enquête tambour battant. C'est d'ailleurs grâce à leurs déclarations et leur enquête que la communauté internationale a commencé à réagir. Et Ankara maintient la pression : le président turc Recep Tayyip Erdogan a assuré qu'il ferait toutes les déclarations nécessaires sur la mort du journaliste saoudien lors d'une réunion avec des membres de l'AKP, le parti au pouvoir, mardi au Parlement. "Je ferai une déclaration à ce sujet mardi lors de la réunion du groupe du parti", a déclaré le chef de l'Etat turc lors d'un discours prononcé dimanche à Istanbul.

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Commentaires 11
à écrit le 22/10/2018 à 9:48
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On dirait qu'à chaque fois que les saoudiens sont mal pris, ils nous envoient le seul type du royaume qui sait se raser pour essayer de calmer le jeu.

le 23/10/2018 à 5:26
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Excellent.

à écrit le 22/10/2018 à 9:11
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Une bonne façon de se racheter serait de faire la paix au Yemen et de sauver des millions de gens de la famine. S'il jugent les vies humaines importantes...

à écrit le 22/10/2018 à 8:46
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Partout dans le monde existent des pratiques similaires à celles des Nazi, peut-être pas avec la même volumétrie mais les mêmes méthodes. Malheureusement on reconnait le passé mais pas le présent avec identiquement les mêmes horreurs et tragédies.

le 22/10/2018 à 11:51
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Pratique similaire à celles des nazis … des trotskistes et des staliniens.

à écrit le 22/10/2018 à 8:44
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.....pour une fois que la Turquie marche dans le sens de la justice :a saluer !

le 22/10/2018 à 9:17
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La Turquie est en faveur des frères musulmans principaux opposants à l'Arabie. Normal que la Turquie fasse du travail pro ce n'est que par intérêt de déstabiliser l'Arabie.

à écrit le 21/10/2018 à 22:31
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Un meurtre dans une ambassade et sans corps a presenter qualifié d une erreur... mais dans leur esprit l erreur est simplement de s etre fait prendre. La communauté internationale devrait boycotter ce pays ou au moins lui interdire tout débouche pour...

le 22/10/2018 à 8:45
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..." ..devrait boycotter.." ! Vous n'y pensez pas : les postures et le business son deux domaines bien distinct !.

à écrit le 21/10/2018 à 21:48
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"Malheureusement, une énorme et grave erreur a été commise et je les assure que les responsables en seront tenus pour responsables". "Les responsables ne seront tenus pour responsables". Soit il y a "une énorme et grave erreur" de traduction, soi...

à écrit le 21/10/2018 à 19:34
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"On aurait jamais du le torturer avant de l'assassiner on est désolé on ne pensait pas que cela froisserait autant nos alliés américains. Et on ne pensait pas non plus avoir des services secrets aussi peu secrets"

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