Ukraine  : la France répond à l'appel de Kiev et se dit prête à financer 12 nouveaux canons Caesar

Par latribune.fr  |   |  1225  mots
La France a déjà cédé ou vendu à l'Ukraine 30 Caesar depuis le début de la guerre en février 2022. (Crédits : VIACHESLAV RATYNSKYI)
Une annonce faite par le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, à l'occasion du lancement ce jeudi à Paris d'une « coalition artillerie » visant à renforcer les capacités militaires de Kiev face à la Russie. De son côté, Joe Biden a fait venir à la Maison Blanche les chefs du Congrès pour les presser de poursuivre l'aide américaine à l'Ukraine.

[Article publié le jeudi 18 janvier 2024 à 08H58 et mis à jour à 14H49]

Douze canons Caesar supplémentaires. C'est ce que la France est disposée à financer pour l'Ukraine, a annoncé ce jeudi le ministre des Armées, Sébastien Lecornu. Ces douze Caesar représentent un investissement de 50 millions d'euros.

« J'ai décidé de débloquer une somme de 50 millions d'euros » - sur le fond de soutien français à l'Ukraine -  « ce qui va permettre d'acheter douze canons Caesar » a déclaré le ministre français des Armées.

La France a la capacité d'en produire 60 autres, selon le ministre, soit quelque 250 millions d'euros, « une somme qui me semble-t-il est accessible pour les différents budgets des alliés » a-t-il poursuivi.

Le ministre s'exprimait lors du lancement à Paris de la « coalition artillerie ».  23 nations alliées de l'Ukraine étaient, en effet, attendues ce jeudi à Paris pour participer à cet événement piloté par la France et les Etats-Unis. C'est l'un des volets du groupe de contact pour la défense de l'Ukraine, dit groupe de Ramstein, réunissant plus de 50 pays soutenant Kiev.

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L'atelier « vise à fédérer les efforts pour aider - dans le court et le long terme -l'Ukraine à disposer d'une force d'artillerie adaptée aux besoins de la contre-offensive et de son armée de demain », a ainsi expliqué le ministère français des Armées. Le ministre ukrainien de la Défense Roustem Oumerov, longtemps annoncé présent, a annulé au dernier moment sa venue en France « pour des raisons de sécurité », a fait savoir Paris. Il y assiste néanmoins par visioconférence. « ll n'y a pas d'alternative à une artillerie moderne, nous devons continuer nos efforts et augmenter notre production de munitions », a-t-il déclaré.

La France prête à « renforcer la capacité ukrainienne de produire sur son sol »

Cette annonce de Sébastien Lecornu fait écho aux propos du nouveau ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, qui, lors de sa première visite en Ukraine, avait évoqué la possibilité de « renforcer la capacité ukrainienne de produire sur son sol » les armes dont elle a besoin. Emmanuel Macron avait également annoncé mardi lors de sa conférence de presse de nouvelles livraisons à Kiev d'une « quarantaine » de missiles (longue portée) Scalp et « plusieurs centaines de bombes » (des AASM selon une source proche du dossier), « pour ne pas laisser gagner la Russie ».

De même, mercredi, le ministère français des Armées s'est félicité d'un triplement des capacités de production de munitions en France, passées de 1.000 unités produites par mois avant la guerre en Ukraine à 3.000 espérées courant 2024.

Six canons automoteurs commandés en septembre dans le cadre d'un contrat commercial direct entre Nexter et l'Etat ukrainien, « sur fonds propres de Kiev », seront livrés « dans les prochaines semaines », 72 autres devant trouver des financements collectifs, a également précisé le ministère.

Au total, la France a déjà cédé ou vendu à l'Ukraine 30 Caesar depuis le début de la guerre en février 2022. Le Danemark a également fourni à l'Ukraine 19 exemplaires d'une version blindée à huit roues. Monté sur camion, le Caesar peut tirer des obus de 155 mm à 40 kilomètres de distance. Pour faire face à la demande, Nexter, branche française du groupe franco-allemand KNDS, a accéléré la production du Caesar, passant de trois ans à 18 mois pour sa fabrication et de deux exemplaires produits chaque mois à six mensuels.

Des canons qui datent de l'ère soviétique

De quoi répondre aux demandes de l'Ukraine. En décembre, le ministère de la Défense avait, en effet, déclaré qu'il était « très important pour l'Ukraine de renforcer sa puissance de feu grâce à la fourniture de systèmes d'artillerie par les alliés », précisant être intéressé par l'acquisition de davantage de Caesar.

Une aide nécessaire pour Kiev comme l'explique le consultant en risques internationaux Stéphane Audrand selon qui « le grand enjeu pour l'Ukraine c'est d'achever sa transition d'un matériel soviétique vers un matériel occidental ». Et pour cause, les canons datant de l'ère soviétique sont adaptés à des obus de 122 mm, alors que les systèmes occidentaux utilisent des obus de 155 mm. Pour armer les canons, l'Union européenne s'est donnée pour objectif de fournir à l'Ukraine un million de munitions d'ici le printemps 2024. Mais seuls 300.000 obus ont été livrés à ce jour, selon des parlementaires européens.

Joe Biden presse les parlementaires à voter une nouvelle aide pour l'Ukraine

Du côté des Etats-Unis, le président américain, Joe Biden, a fait venir mercredi à la Maison Blanche les chefs du Congrès pour les presser de poursuivre l'aide américaine à l'Ukraine, pour l'heure interrompue faute d'accord entre parlementaires républicains et démocrates sur une rallonge financière.

Le démocrate a été clair : « L'incapacité du Congrès à agir met en danger la sécurité des Etats-Unis, l'Otan et le reste du monde libre », selon un communiqué diffusé par la Maison Blanche après la rencontre. Celui qui s'était jusqu'ici tenu à l'écart des tractations parlementaires, a toutefois, selon la même source, relevé des « progrès encourageants » des discussions en cours au sein de l'une des deux chambres du Congrès, le Sénat, où son parti est majoritaire.

C'est une autre affaire à la Chambre des représentants, à majorité républicaine. Son chef, le conservateur Mike Johnson, a dit en sortant que la réunion avait été « productive », et il a affirmé « comprendre l'importance » de l'aide à l'Ukraine. Le républicain a toutefois déclaré qu'à ses yeux, « la plus grande priorité (était) la frontière » avec le Mexique, où arrivent chaque jour des milliers de migrants. Le président américain demande 61 milliards de dollars pour continuer l'assistance militaire à l'Ukraine, mais les républicains de la Chambre des représentants réclament en retour un net durcissement de sa politique d'immigration.

Alors que Kiev a fait état ce matin d'une attaque russe de 33 drones contre l'Ukraine dans la nuit de mercredi à jeudi, le front est quasiment gelé depuis de nombreux mois, près de deux ans après l'invasion russe en février 2022.

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban veut une aide à l'Ukraine encadrée sur un an

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui bloque une aide de l'Union européenne à l'Ukraine, a explicitement réclamé jeudi la possibilité d'une révision annuelle, sur fond de difficiles négociations à Bruxelles à l'approche d'un sommet. « Si nous voulons soutenir l'Ukraine, alors faisons-le en dehors du budget de l'UE et sur une base annuelle!  C'est la seule position démocratique tenable à cinq mois des élections » du Parlement européen, a-t-il déclaré sur X (ex-Twitter). Il clarifie ainsi ses propos après s'être déjà dit prêt mardi à soutenir Kiev « sans que cela nuise au budget commun. » Le responsable nationaliste - seul dirigeant de l'UE à avoir maintenu des liens étroits avec le Kremlin après l'offensive russe en Ukraine - a mis en décembre son veto au versement d'une aide de 50 milliards d'euros sur quatre ans à ce pays en guerre. Un sommet extraordinaire a été fixé au 1er février pour tenter de trouver un compromis.

(Avec AFP)