Ukraine : Macron s'entretient avec Poutine, "dernier effort pour éviter un conflit majeur" (Élysée)

Par latribune.fr  |   |  1195  mots
(Crédits : JOHANNA GERON)
Le président français Emmanuel Macron s'entretient ce dimanche par téléphone avec Vladimir Poutine, un effort diplomatique en urgence pour tenter d'éviter une invasion russe de l'Ukraine, où les tensions sont de plus en plus fortes sur le front dans l'Est. Pour l’Élysée, cette discussion constitue "les derniers efforts possibles et nécessaires pour éviter un conflit majeur en Ukraine".

Moins de quinze jours après sa visite à Moscou, Emmanuel Macron doit s'entretenir ce dimanche à 11 heures avec Vladimir Poutine pour tenter d'éviter une invasion russe de l'Ukraine, où les tensions sont de plus en plus fortes sur la ligne de front dans l'est. Cet entretien par téléphone intervient après que le président français s'est entretenu samedi soir avec son homologue ukrainien Volodimir Zelenski pour parler des moyens d'enclencher une désescalade avec la Russie et de favoriser une solution diplomatique dans l'est de l'Ukraine, où les incidents armés se multiplient entre forces gouvernementales et séparatistes pro-russes, notamment dans la banlieue de Donetsk, à proximité de la ligne de front. Ces derniers ont annoncé samedi une "mobilisation générale" des hommes en état de combattre, après avoir ordonné l'évacuation de civils vers la Russie voisine. La région russe de Rostov, frontalière de l'Ukraine, a même déclaré l'état d'urgence pour faire face à un possible afflux de réfugiés en provenance des zones séparatistes.

Escalade

"Je l'ai informé de l'aggravation sur la ligne de front, de nos pertes, des pilonnages", a écrit le chef de l'Etat ukrainien sur Twitter.

Emmanuel Macron "prendra tous les risques pour préserver la paix en Europe, il prendra toutes les initiatives utiles", a rapporté de son côté l'Elysée. Volodymyr Zelensky, aurait dit ne pas vouloir "riposter aux provocations le long de la ligne de contact" et a "confié à Emmanuel Macron de dire à Vladimir Poutine la disponibilité de l'Ukraine à dialoguer", a souligné la présidence française. Pour autant, plus tôt dans la journée de samedi, le président ukrainien avait exhorté les Occidentaux à cesser leur politique "d'apaisement" vis-à-vis de Moscou et à augmenter leur aide militaire à Kiev, "bouclier de l'Europe". Des déclarations qui intervenaient peu après la nouvelle démonstration de force de la Russie avec des tirs d'essai de missiles hypersoniques, supervisés personnellement par Vladimir Poutine. Des nouvelles armes que le chef du Kremlin a précédemment qualifiées "d'invincibles" et pouvant porter des charges nucléaires.

"La situation est très dangereuse mais il reste de la place pour la diplomatie", a-t-on ajouté à l'Elysée pour qui cette discussion par téléphone entre les présidents français et russe constitue "les derniers efforts possibles et nécessaires pour éviter un conflit majeur en Ukraine", a souligné l'Elysée.

"Une action militaire russe contre l'Ukraine porterait la guerre au cœur de l'Europe", a martelé un conseiller présidentiel français, en évoquant un risque de conflit "en Ukraine et autour". Il n'y aurait alors "pas d'autre option possible qu'une réaction très forte", a-t-il ajouté.

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La Russie peut attaquer à tout moment, selon Washington

Alors que depuis près de trois mois, ils n'ont cessé de sonner l'alerte sur les préparatifs d'une offensive russe en Ukraine, les Etats-Unis ne cessent de marteler ces derniers jours que la Russie peut lancer une attaque sur l'Ukraine "à tout moment". Vendredi, Joe Biden s'était dit, pour la première fois, "convaincu" que Vladimir Poutine avait décidé d'envahir l'Ukraine "dans les prochains jours", et que la multiplication actuelle des heurts sur la ligne de front dans l'est du pays visait à créer une "fausse justification" pour lancer l'offensive.

Ce dimanche, le président américain doit participer à une rare réunion du Conseil de sécurité nationale consacrée à la crise ukrainienne, quelques jours avant un entretien entre son secrétaire d'Etat Antony Blinken et son homologue russe Sergueï Lavrov, jeudi 24 février.

 Le Kremlin nie toute intention d'attaquer l'Ukraine voisine, que le Kremlin veut faire revenir dans sa sphère d'influence. Accusé par Washington et Kiev d'avoir massé 150.000 soldats aux frontières orientales ukrainiennes, Moscou conditionne la désescalade à des "garanties" pour sa sécurité, comme le retrait d'Europe de l'Est de l'infrastructure militaire de l'Otan et l'assurance que l'Ukraine n'adhèrera jamais à l'Alliance atlantique, des demandes inacceptables pour les Occidentaux.

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"C'est de plus en plus chaud"

Sur le terrain les heurts se multiplient. Les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont affirmé samedi avoir constaté une "augmentation spectaculaire" des violations du cessez-le-feu, avec un total de 1.566 infractions en 24 heures, un record cette année.

"C'est de plus en plus chaud", a confié à l'AFP un soldat ukrainien de 26 ans, Andriï, posté près du front.  Le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiy Reznikov, a répété que Kiev n'avait pas l'intention de mener d'offensive, mais qu'il ne laisserait pas les populations civiles et ses troupes être visées par des tirs "sans impunité", dans un message sur Facebook.  Moscou a soutenu samedi qu'un tir ukrainien était tombé en territoire russe, près de la frontière ukrainienne, sans faire de victimes. Des informations démenties par Kiev.

La France recommande à ses ressortissants de quitter l'Ukraine

Face à cette aggravation des tensions, la France recommande désormais à tous ses ressortissants de quitter l'Ukraine et appelle ceux se trouvant dans les zones les plus exposées au risque de guerre dans l'est du pays à s'en éloigner "sans délai".

"Il est recommandé à tous les ressortissants français dont le séjour en Ukraine n'a pas de motif impérieux de quitter le pays", souligne la diplomatie française dans ses conseils aux voyageurs actualisés samedi.

Jusqu'ici, le ministère des Affaires étrangères français conseillait seulement de "différer tous les déplacements en Ukraine". Les Français se trouvant "dans les oblasts [divisions administratives, ndlr] de Kharkiv, Lougansk et Donetsk" ainsi que dans la région de Dnipro, près de la Russie, sont "appelés à quitter sans délai ces zones", insiste par ailleurs le Quai d'Orsay. L'Allemagne a appelé de son côté ses ressortissants à quitter "urgemment" l'Ukraineet a mis en garde "contre tout déplacement" dans le pays.

La compagnie allemande Lufthansa a parallèlement annoncé qu'elle suspendait ses vols réguliers vers Kiev et Odessa (sud) à partir de lundi, et jusqu'à la fin du mois de février.

"La sécurité de nos passagers et membres d'équipage est notre priorité première", a souligné un porte-parole, précisant  que des vols restaient planifiés samedi et dimanche, pour permettre aux personnes qui le souhaiteraient de quitter le pays, et que la compagnie continuerait à desservir Lviv, à l'ouest de l'Ukraine.

Air France maintient pour l'instant ses vols vers l'Ukraine, selon un porte-parole.

"Le prochain vol pour Kiev est prévu demain (dimanche) à 09H40. On suit la situation de près, évidemment, mais pour l'instant le vol est maintenu", a-t-il précisé à l'AFP. Un autre vol direct est prévu mardi.

(Avec AFP et Reuters)

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