École, santé, impôts, énergie, Ukraine... Ce qu'a annoncé Emmanuel Macron

Par latribune.fr  |   |  2131  mots
Emmanuel Macron (Crédits : LUDOVIC MARIN/AFP)
Emmanuel Macron prenait la parole ce mardi devant plusieurs centaines de journalistes. L'occasion pour le chef de l'Etat de développer son propos du 31 décembre dernier lors de ses vœux aux Français pendant lesquels il avait annoncé un « réarmement civique » après « le réarmement économique » et « le réarmement de l'Etat et de nos services publics ».

« Une France plus forte et plus juste » : Emmanuel Macron a annoncé une série de mesures, mardi lors d'une conférence de presse, pour donner corps à son concept de « réarmement », une semaine après la nomination de son nouveau gouvernement, avec à sa tête Gabriel Attal. Lors d'un propos liminaire, le chef de l'Etat a esquissé « le sens profond » de son action, après une année 2023 marquée par l'adoption des lois sur les retraites et sur l'immigration. « Je suis convaincu que nous avons tous les atouts pour réussir » et que « nous n'en avons pas fini avec notre histoire de progrès et que nos enfants vivront mieux demain, que nous ne vivons aujourd'hui », a-t-il assuré. Alors que son nouveau Premier ministre, Gabriel Attal, ne prononcera que le 30 janvier sa déclaration de politique générale, le chef de l'État a, bien au-delà des « grand axes » annoncés par l'Élysée, distillé plusieurs mesures concernant l'école, l'économie et la sécurité.

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Réarmement civique

Premier axe: la jeunesse et l'école. Pour ce qu'il nomme le « réarmement civique », Emmanuel Macron souhaite que chaque génération de Français apprenne « ce que la République veut dire ». « Et cela dès l'enfance », avec notamment la reprise « du contrôle de nos écrans. ».

« Sur la base de recommandation d'experts nous déterminerons le bon usage des écrans dans la famille, à la maison comme en classe », a déclaré le chef de l'Etat, en précisant qu'il y aura peut-être « des interdictions » et des « restrictions ».

Dans la même veine, l'instruction civique fera son grand retour au collège à raison d'une heure par semaine dès la 5e dès cette année. Et Le théâtre va également devenir un passage obligé dès la rentrée prochaine, tandis que « l'histoire de l'art retrouvera sa place au collège et au lycée. »

Par ailleurs, « la tenue unique sera expérimentée dès cette année dans une centaine d'établissements tous volontaires. Elle sera évaluée méthodiquement et si elle est concluante, elle sera généralisée en 2026. »

Généralisation du service national universel

Le président Emmanuel Macron a annoncé mardi que son gouvernement irait vers « une généralisation du service national universel » (SNU) en classe de seconde, lors d'une conférence de presse. Promesse de campagne du chef de l'Etat, le SNU a été lancé en 2019. Il comporte un « séjour de cohésion » et une « mission d'intérêt général » et ne concerne jusqu'à présent que des jeunes volontaires. En juin dernier, le gouvernement avait annoncé que le SNU serait intégré à partir de mars 2024 au temps scolaire, avec un stage de 12 jours pour les élèves en classe de seconde qui seraient volontaires.  Sa généralisation, évoquée à plusieurs reprises ces derniers mois, se heurte à de vives résistances.  Ses détracteurs s'appuient sur l'avis rendu début 2018 par le Conseil d'orientation des politiques de jeunesse (COJ) qui préconisait qu'il ne soit pas obligatoire, et sur un rapport sénatorial de mars 2023 recommandant de « surseoir » à sa généralisation, en raison du flou et du coût du dispositif.  Un nouveau rapport parlementaire publié en octobre dernier faisait état de son côté de « débuts chaotiques » et de résultats « mitigés ».

Autre point sur lequel Emmanuel a insisté, « assurer l'ordre », « en contrôlant mieux nos frontières », explique-t-il, citant la loi immigration, en « luttant contre les inégalités grâce à un doublement de la présence policière dans les rues », « en luttant contre la drogue » ou  « contre l'Islam radical .»

Relancer la natalité

Par ailleurs, Emmanuel Macron veut relancer la natalité. Il a promis la création d'un « congé de naissance » de six mois pour remplacer le congé parental, ainsi que le lancement d'un « grand plan » pour lutter contre le « fléau » de l'infertilité, deux mesures visant à relancer la natalité en France. Une annonce qui fait suite à l'annonce par l'Insee ce même jour d'un recul de 6,6% du nombre des naissances en France en 2023, passant sous la barre symbolique des 700.000 pour la première fois depuis la fin de la Seconde guerre mondiale.

« Après l'allongement du congé de paternité, je crois profondément que la mise en place d'un nouveau congé de naissance serait un élément utile dans une telle stratégie », a fait valoir le chef de l'Etat. Face à l'infertilité en hausse, « un grand plan de lutte contre ce fléau sera engagé pour permettre justement ce réarmement démographique », a ajouté Emmanuel Macron.

« Il sera mieux rémunéré et permettra aux deux parents d'être auprès de leur enfant pendant six mois s'ils le souhaitent », a-t-il précisé, estimant que le congé actuel « crée beaucoup d'angoisse parce qu'il est extrêmement peu et mal rémunéré », et crée ainsi « des situations impossibles ».

« Surtout, il sera plus court que le congé parental actuel, qui peut aller jusqu'à trois ans et qui éloigne beaucoup de femmes du marché du travail », a observé le chef de l'Etat.

Selon l'Elysée, l'idée est de « débloquer les freins économiques et sociaux au désir d'enfant ». La ministre des Solidarités Aurore Bergé avait déjà promis en novembre la création en 2025 de ce « nouveau droit » pour les familles, indiquant à l'époque que ce congé « pourrait » coexister avec l'ancien congé parental, actuellement rémunéré à hauteur de 429 euros par mois. Elle avait assuré que les deux parents pourraient « le prendre en même temps ou l'un après l'autre, à temps plein ou à temps partiel ».

Régulariser nombre de médecins étrangers

Emmanuel Macron a par ailleurs souhaité « régulariser nombre de médecins étrangers qui tiennent parfois à bout de bras nos services de soins ». Pour « mettre fin au scandale des déserts médicaux », il faut « permettre des coordinations plus simples » entre médecine de ville et hôpital, et avec les professions paramédicales, mais aussi « régulariser nombre de médecins étrangers qui tiennent parfois à bout de bras nos services de soins, et que nous laissons dans une précarité administrative qui est complètement inefficace », a plaidé le chef de l'Etat. Concernant les déserts médicaux, Emmanuel Macron a rappelé que la France compte de 100.000 médecins généralistes, dont « 25 à 30% ont plus de 70 ans ». « On doit créer plus de postes mais pendant les 5 à 7 ans qui viennent il faut réorganiser les choses. »

Franchise médicale à un euro

Au sujet des franchises médicales, actuellement de 50 centimes sur une boîte de médicaments et qui pourrait passer à 1 euro, Emmanuel Macron a rappelé qu'il n' « 'y avait pas d'argent magique et que si ce n'est pas le consommateur qui paye c'est le contribuable. »

« Je n'ai pas le sentiment qu'on fait un crime terrible, je pense que le passage à 1 euro de la franchise médicale par boîte de médicament est une bonne mesure, mais je pense que ça responsabilise et que c'est une bonne mesure », tout en estimant qu'il faudrait protéger les personnes touchées par des affections de longue durée avec un plafond de « 50 euros par an ».

L'éventuelle hausse des franchises médicales et des participations forfaitaires, déjà envisagée par l'exécutif sans être encore formellement annoncée, a suscité de vives critiques des oppositions lors des débats sur le budget de la Sécurité sociale pour 2024.

Baisse d'impôts

Le président de la République Emmanuel Macron a annoncé mardi que la baisse d'impôts de deux milliards d'euros qu'il envisage pour les classes moyennes aurait lieu dès 2025.

« On aura entre autres, dans notre trajectoire financière, deux milliards de baisses d'impôts sur nos compatriotes qui sont dans ces catégories en 2025 », a-t-il dit, en précisant que « le gouvernement reviendrait sur le détail de la mesure ».

Cette baisse d'impôts supplémentaire est envisagée depuis le printemps 2023, mais son timing exact avait évolué au cours des mois, avec une possibilité qu'elle soit repoussée en fin de quinquennat, ou « dès que possible ».

Le président de la République a évoqué longuement dans son propos introductif que « tous nos compatriotes qui gagnent déjà trop pour être aidés et pas assez pour bien vivre, la France populaire, la France des classes moyennes, celle qui dit "quand vous proposez quelque chose ce n'est jamais pour moi". Et pourtant, c'est celle qui tient le pays », a-t-il estimé.

Pour lui, « l'effort et le mérite ne sont pas suffisamment reconnus, et si nous avons déjà beaucoup fait pour que le travail paye mieux que l'inactivité, ce n'est pas assez, il y a une France de l'angle mort ». Au passage, il a confirmé que pour les fonctionnaires, « le principal critère d'avancement et de rémunération devra être également le mérite », et une réforme en ce sens « dans les prochaines semaines ».

Il a confirmé également qu'il y aurait « une normalisation » dans la protection contre l'inflation, après que la France « a beaucoup protégé face à l'inflation ces dernières années ».

Hausse des prix de l'électricité

A ce titre, à propos de la hausse des factures d'électricité qui ne dépassera pas 10% selon Bruno Le Maire, Emmanuel Macron a affirmé que le prix de allait « revenir dans la norme », toute en affirmant qu'il resterait « substantiellement inférieur » à ce qui est payé par le consommateur chez nos voisins européens.

« Le prix (de l'électricité) va revenir dans la norme et surtout il restera, quel que soit ce que le gouvernement annonce dans les prochains jours, substantiellement inférieur à ce qui est payé en Allemagne, en Espagne, en Italie », a-t-il déclaré.

« Là où ça aurait dû augmenter de plus de 100% l'année dernière, ça a dû augmenter de 25% (...) Et on va continuer d'avoir un prix de l'électricité nettement inférieur à nos voisins », a-t-il ajouté, tout en refusant de se substituer au gouvernement « pour faire les annonces précises » attendues prochainement. « Au moment où les prix reviennent dans la norme, il est légitime qu'il y ait en effet des augmentations », a-t-il ajouté.

Concernant l'énergie toujours, Emmanuel Macron a indiqué qu'il annoncerait « dès l'été les grands axes pour les 8 prochains » EPR, aujourd'hui en option, après le lancement de six nouveaux réacteurs de manière ferme, lors d'une conférence de presse.

« J'ai annoncé les sites des six nouveaux réacteurs, les travaux, les investissements et tout le travail commencent à EDF. Dès l'été, j'annoncerai les grands axes pour les huit prochains », a-t-il déclaré.

Eviter que la Russie l'emporte en Ukraine

Concernant les relations internationales, le chef de l'Etat a dit vouloir « une Europe plus souveraine qui assume d'avoir pour allier les Etats-Unis mais qui ne doit pas en dépendre ». « Il faut parler à tout le monde, chercher des alliés pour éviter cette grande division du Nord face au Sud ». Interrogé sur la principale menace qui pèse sur la France, Emmanuel Macron a répondu « l'Ukraine ».

« Nous ne pouvons pas laisser la Russie gagner car la sécurité même de l'Europe est mise à mal. Nous devons tout faire, c'est le principal sujet à mes yeux de mobilisation ».

Aussi, Emmanuel Macron a-t-il annoncé la finalisation d'un nouveau plan de livraisons d'armes à Kiev : « une quarantaine de missiles SCALP et des bombes », a-t-il précisé. « La France avait développé des productions qui vont permettre de fournir beaucoup plus de matériel en particulier des chars Caesar » a-t-il dit, précisant que l'aide aller également concerner les besoins de formation de l'Ukraine. Emmanuel Macron se rendra en Ukraine en février. « Nous aurons à prendre des décisions nouvelles dans les semaines et mois qui viennent, nous Français et Européens, pour ne pas laisser la Russie gagner »

Le président la République a également vanté les mérites de l'armée française renforcée très fortement par une première Loi de programmation militaire (LPM) qui permet de préserver notre dissuasion nucléaire. Quant à la deuxième LPM, elle permet de consolider notre modèle d'armée historique, de consolider notre nucléaire et d'aller sur les risques cyber, exo-atmosphériques et donc le spatial et le maritime qui sont les grands risques stratégiques du XXIe siècle, a-t-il poursuivi.

« Nous sommes équipés, nous sommes armés et nous le serons encore davantage demain », a-t-il dit en rappelant la nécessité de « développer une défense européenne » avec « davantage de programmes communs, d'investissement » et « une culture militaire plus intime avec nos partenaires ».